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Mini-Europe et Océade vont sans doute mourir, balayés par le méga projet Néo

Néo est probablement le projet de la décennie dans la capitale, un projet urbain "unique et sans précédent". Salle de concert, logements, congrès, quartier commercial, centre de loisirs, espace vert: Néo doit transformer le plateau du Heysel et apporter à la capitale un nouveau rayonnement international. Cela ne se fait pas sans victimes. Les parcs Océade et Mini-Europe luttent, avec peu d'espoir, pour leur survie.

"Nous avons des enfants en pleurs tous les week-ends, ils ne comprennent pas pourquoi on risque de fermer", assure le responsable marketing d’Océade, Joël Musche joint par téléphone. Et sur le site web du parc aquatique bruxellois, cet appel en majuscule, en gras et en rouge, jaune, noir: "Pétition, SAUVEZ Mini-Europe et Océade !" Déjà signée par environ 37.000 personnes, la pétition veut empêcher la fermeture de deux lieux familiers du paysage bruxellois: Mini-Europe, le parc des reconstitutions miniatures des monuments européens célèbres et Océade, un peu l'Aqualibi de la capitale. Depuis une vingtaine d'années, les deux sites attirent chacun quelque 300.000 visiteurs dans le village de Bruparck, à deux pas du complexe cinéma Kinépolis. Mais leur bail sur le plateau du Heysel s’achève le 31 août et il ne sera pas reconduit par la ville de Bruxelles. C'est que celle-ci rêve d'autre chose, quelque chose de beaucoup plus grand, de beaucoup plus ambitieux. Ce quelque chose s'appelle Néo. Et face au flamboyant Néo, la tortue et le perroquet, mascottes respectivement de Mini-Europe et d'Océade, ressemblent à deux vieux clowns has-been et défraîchis bons pour la casse.

Néo, un projet urbain unique et sans précédent à Bruxelles sur le plateau du Heysel

Le bourreau s'appelle donc Néo. C'est le nom de l'élu qui sauve la race humaine des infâmes machines dans le film de science-fiction Matrix. C'est aussi l'élu qui sauvera les Bruxellois de la misère, celui qui donnera à la capitale européenne une "nouvelle ambition" comme le proclame son slogan. Imaginé en 2007, Néo est le méga projet de réaménagement du plateau du Heysel, "un projet urbain unique et sans précédent de dimension non seulement nationale mais également internationale", expliquaient les pouvoirs politiques de la ville lors d'une conférence de presse, le 19 décembre dernier. L'objectif de ce projet ambitieux: "Renforcer l’attractivité de Bruxelles en tant que zone d’investissements, soutenir la création et le développement d’activités économiques et commerciales et, de manière intégrée, doter la Ville de nouveaux outils attractifs sur les plans touristique et évènementiel."

Salle de concerts, logements, quartier commercial, espaces verts, zones de loisirs,...

Concrètement, Néo, ce sera une salle de concert de 15.000 places, un centre de convention de dimension internationale (niveau ONU à New York, précise-t-on) de 5000 places, un hôtel, 750 logements, un énorme quartier commercial, un poumon vert avec des espaces dédiés à la promenade, au sport et à la détente et, enfin, une grande zone de loisirs à vocation touristique. Au total, pas moins de 200.000 mètres carrés qui seront transformés et s'intégreront autour de l'Atomium et du stade Roi Baudouin. "Il était inconcevable, à notre époque, de laisser un site avec un tel potentiel en jachère, tel un terrain très vague et incohérent. 70 hectares de bâtis inélégants, de parkings à ciel ouvert, de voiries inadaptées, d’équipements urbains archaïques,…", explique-t-on dans le dossier de presse. "L’Atomium est le symbole de la capitale de l’Europe et ce qu’on y trouve autour, à ses pieds, ne ressemble à rien…", rajoute Henri Dineur, porteur du projet Néo.

Trois finalistes et un vainqueur désigné en janvier 2014

Pour mener à bien un tel projet, la ville a procédé à un avis de marché. Trois candidats sur sept ont été retenus. Des consortium de mastodontes à la réputation internationale et qui ont déjà réalisé des projets similaires. "S’il faut avoir les moyens de ses ambitions, il est nécessaire de travailler avec les meilleurs acteurs, des équipes professionnelles et multidisciplinaires susceptibles de concrétiser cette volonté de développement urbain harmonieux et diversifié", justifie la ville. Les trois finalistes doivent désormais soumettre leurs projets. Le vainqueur, celui qui remportera le marché, sera connu au premier semestre 2014. Après, il devra se charger de tout: le financement, la construction, la gestion et l’exploitation du quartier commercial, du centre de loisirs, des logements et des parkings intégrés au projet.

> LE PROJET NEO ET LE CV DES 3 CONSORTIUMS FINALISTES EN DETAILS

Huit mois pour sauver Océade et Mini-Europe

On feuillette les 41 pages du dossier de presse , les réalisations des finalistes sont impressionnantes, à la hauteur des ambitions de la ville pour le plateau du Heysel qui déjà aujourd'hui attire cinq millions de personnes par an, écrit-on. Et d'évoquer l'Atomium, le stade Roi Baudouin et même le Planétarium. Mais rien sur Océade et Mini-Europe. Dans le futur imprimé sur papier, ils ont déjà disparu.

La société qui gère ces parcs n'a plus que huit mois pour sauver ses deux enfants sur le site bruxellois.

Prolonger le bail ? La ville refuse

Argumentant que le chantier Néo ne démarrerait pas avant longtemps, elle a supplié à la ville une prolongation du bail de cinq ans. Proposition balayée d'un revers de la main. "Océade et Mini-Europe auraient eux aussi pu se proposer pour le projet", justifie une attachée de presse de la ville contactée par téléphone. "Faux", rétorque Joël Musche: "Nous sommes trop petits. Il nous aurait fallu un milliard de capitaux propres et des actifs immobiliers de plus de deux milliards d'euros". Et il est vrai qu'à la lecture des critères que devaient respecter les candidats pour être sélectionnés, la petite société qui gère les parcs n'avait pas l'ombre d'une chance.

Intégrer les deux parcs dans les projets présentés par les consortiums finalistes ?

La seule chance des deux parcs d’attraction est désormais de parvenir à négocier leur survie avec les trois candidats, en les convainquant qu’ils valent la peine d’être intégrés dans le projet de construction. Mais le délai est selon Joël Musche trop court: "Nous n’avons que quelques mois", déplore-t-il. En effet, l'agenda de Néo prévoit que les trois finalistes doivent faire de premières propositions à la ville en mai-juin. L'offre définitive devra, quant à elle, être livrée en janvier 2014.

"Nous aurions aimé que notre bail soit prolongé afin que nous puissions réellement négocier avec le gagnant qui va vraiment construire !", insiste notre interlocuteur. Il est vrai qu'actuellement, ne sachant pas quel finaliste gagnera, il faudrait travailler avec les trois, et donc notamment sur deux projets qui seront rejetés. Une grosse débauche d'efforts inutiles. Des contacts auraient cependant été entrepris mais le temps ne semble pas à l'optimisme.

Déménagement à Courtrai ou à Waterloo ?

Il existe une autre solution: le déménagement. Courtrai en Flandre et Braine-l'Alleud en Wallonie auraient manifesté un intérêt. Au mois d'octobre dernier, le porte-parole de la formation N-VA de Courtrai, avait confirmé que des discussions avaient été entamées en mai avec le propriétaire, Thierry Meeùs, pour accueillir l'activité touristique. Il y aurait également de la place pour Océade. Le bourgmestre de l'époque Stefaan De Clerck (CD&V) avait souligné qu'il n'excluait pas l'option sous certaines conditions. Selon lui, "le projet doit s'inscrire dans le cadre de l'Eurométrople (NDLR: Lille-Courtrai-Tournai). Car pour la seule ville de Courtrai, ce n'est pas réaliste". Quant à Braine-l'Alleud, la ville pourrait être intéressée de voir Mini-Europe installée au pied de la butte du lion de Waterloo. On a même évoqué un déménagement à l'étranger, au Monténégro, dans les Balkans.

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