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Demotte concerné personnellement par la crise des certificats verts: voici pourquoi

"Collines Sous Levant" a offert des panneaux photovoltaïques a des centaines de ménages de Flobecq. Pour rembourser la banque, elle compte sur le certificats verts, dont la valeur pourrait chuter, selon les décisions attendues de la Région wallonne. Détail remarquable: son Ministre président, Rudy Demotte, a bénéficié du projet de cet asbl...

La Région wallonne devrait bientôt revoir le principe de rachat des certificats verts, issus de l'énergie produite par les panneaux photovoltaïques d'une habitation. Le système n'est plus viable (une dette de 2,8 milliards s'est creusée), et il on évoque une baisse de la valeur minimum du CV (65€).

Conséquence: ceux qui comptaient amortir rapidement l'installation coûteuse de panneaux photovoltaïques vont devoir attendre. Si la colère gronde déjà parmi ces victimes, imaginez son ampleur chez les "tiers payeurs". Il s'agit des entreprises qui "offraient" l'installation et se payaient en encaissant elles-mêmes les CV auprès de la Région wallonne au prix minimum de 65 euros si elles ne parvenaient pas à les vendre plus cher sur le marché (par exemple à des fournisseurs d'électricité comme Electrabel obligés d'acheter un certain quota de CV). 

 

Une asbl et un beau projet

Le cas de "Collines Sous Levant" est particulièrement sensible. Imaginée en 2009, cette asbl avait pour but de permettre l'accès aux photovoltaïques pour les habitants de Flobecq, même ceux ayant moins de moyens. "C'est un beau projet, social, écolo… on a pu aider beaucoup de gens qui ne savaient plus payer leur électricité", nous a expliqué Marcel Dekeyser, le coordinateur de l'asbl.

"Les incitants des autorités publiques ont permis à des sociétés 1/3 payeur de se faire beaucoup d'argent. C'est à l'antipode de notre projet, qui a des visées socio-économiques et écologiques", a confirmé Philippe Mettens, le bourgmestre de Flobecq. "ORES (le gestionnaire de réseau, NDLR) est impliqué, ils ont installé des compteurs intelligents dans les habitations pour mesurer la consommation et la production. C'est un projet pilote, qui pourrait s'étendre en Wallonie".

 

Un service quatre étoiles 

Les premières installations ont débuté en avril 2011. Au total, 298 maisons ont été équipées. Il y avait certains critères à respecter: "Les gens pouvaient choisir leur installateur, ils nous soumettaient le dossier et on acceptait le devis. Et ils n'ont pas déboursé un franc. L'asbl avançait l'argent, et remboursait la banque avec les CV des installations".

Et ce n'est pas tout: en plus d'avoir leur électricité gratuite, les bénéficiaires du projet ne doivent se soucier de rien. Administratif, panne, problème. "Les gens appellent et Marcel débarque", nous a expliqué le bourgmestre de Flobecq.

 

D'où vient l'argent ?

Les initiateurs du projet ont du se battre pour trouver les fonds nécessaires. L'idée de base vient d'un travail post-universitaire, qui n'a pas tout de suite convaincu les banques. Après quelques échecs, le bourgmestre de Flobecq est intervenu. "La banque Triodos a financé les 4,5 millions € du projet, et la commune s'est portée garante", a expliqué M. Dekeyser, le coordinateur de l'asbl.

 

Comment rembourser la banque ?

L'asbl "Collines Sous Levant" était, comme son nom l'indique, sans but lucratif. L'installation, dont le devis avait été préalablement jugé acceptable, était donc remboursée rapidement. "Du moins à l'époque, car le CV était alors de 80€ environ. Nous avons été prudents, en se basant sur un CV à 70€. Quand il est descendu au prix minimum garanti de 65€, ce n'était pas encore un drame. La durée du remboursement était alors estimée à 11 ans".

Mais comme on l'a dit, il est probable que la Région wallonne soit obligée de diminuer le montant du rachat des CV, pour arrêter de creuser sa dette dans un système qu'elle a pourtant elle-même imaginé.

 

Une catastrophe

Si la valeur du CV passe en dessous des 65€, "ce serait une catastrophe". "Si ça diminue vraiment, il va se passer quelque chose. C'est un cas que l'on n'a même pas envisagé, mais ce serait très grave. Car nous sommes loin d'être les seuls", estime M. Dekeyser.

Philippe Mettens, le bourgmestre de Flobecq, suit de près l'actualité, cette semaine. Il craint lui aussi une baisse de la valeur de rachat des CV. "On ne sait pas quelle sera la décision des autorités. J'ai l'impression qu'ils lancent des ballons d'essais, pour voir comment réagissent les gens".

 

Faillite de l'asbl = intervention de la commune ?

La faillite ? Ils ne veulent pas en entendre parler. "Ce projet est solide, il y a des liens contractuels. Si les conditions changent, il y aura des réactions devant les juridictions", a expliqué le bourgmestre.

D'ores et déjà, l'asbl pense à trouver un nouvel accord avec la banque, qui comptait sur les CV pour être remboursée rapidement. Et si la valeur des CV diminue, il faudra plus d'années pour rembourser la banque. Or, les panneaux solaires ont une durée de vie limitée, environ 20 ans. Il y aura donc un seuil à ne pas franchir…

 

Le budget annuel de la commune est de 3 millions €

N'oublions pas que la commune s'est porté garante du montant que la banque a prêté, soit 4,5 millions d'euros. "Vous savez, le budget annuel de notre commune est de 3 millions d'euros". Ce qui peut se traduire par: "De toute façon, on ne serait pas rembourser la banque à la place des CV".

Plus raisonnablement, Philippe Mettens envisage, comme le coordinateur de l'asbl, une période d'amortissement plus longue.

 

Rudy Demotte a bénéficié de ce projet !

Ce qui rassure le bourgmestre, c'est que Flobecq est le fief de Rudy Demotte, le Ministre président de la Région wallonne. Et là où l'histoire se corse, c'est que Demotte, ancien conseiller communal (1994-2000) puis bourgmestre empêché (2000-2011) de Flobecq, a bénéficié du projet.

"Son toit est équipé de panneaux, et ils ont été installés grâce à notre asbl", nous a confirmé le bourgmestre actuel. C'est une épine de plus dans le pied de Rudy Demotte: comment mettre à terre – mais nous n'en sommes pas là – un projet dont il a bénéficié ?

 

Pas de cerise ?

Vous l'avez compris: les gens n'ont pas déboursé un euro pour installer leurs panneaux. Ils bénéficient donc de l'électricité gratuite et si l'asbl tombe par terre, ils ne risquent pas grand-chose: personne ne devrait aller retirer leurs panneaux. Mais ils auraient pu être encore plus gagnants.

"Il devait y avoir une cerise sur le gâteau. Une fois que la banque aurait récupéré son argent, les gens auraient touché leur certificats verts eux-mêmes pendant quatre ou cinq ans!". Il est plus que probable, désormais, qu'ils n'auront pas de cerise. Mais c'est un moindre mal.

 

> VOS REACTIONS SUR NOTRE PAGE FACEBOOK: "Ouf, ce pauvre Rudy ne finira pas à l'ombre d'un panneau photovoltaïque. J'avais très peur pour lui!" (Olivier)

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