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"Cette année, ils y vont gaiement": Jean-Louis, 74 ans, est scandalisé par le montant réclamé par Unisono pour "sa" petite salle de village

On a peut-être tendance à l'oublier, mais les organisateurs d'événements ne peuvent pas utiliser gratuitement de la musique lors de leurs activités. Ils doivent payer différents organismes afin que les artistes soient correctement rémunérés. Mais les montants réclamés sont parfois très élevés, surtout pour les petites structures.

Il existe des petites salles qui représentent l'âme d'un village. C'est le cas de la salle Rimbiévaux de Rémersdael, dans les Fourons. Elle est sortie de terre en 1974 et peut accueillir 300 personnes dans ses 300m2. Elle avait pour objectif d'offrir à la communauté un lieu de rencontre et d'animation. "J'ai participé à la construction avec mes propres mains il y a déjà 50 ans", se souvient Jean-Louis, un habitant de 72 ans. Le retraité est aujourd'hui le secrétaire de l'ASBL qui gère le local. Il nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous afin de dénoncer le prix de la facture qui lui a été présentée par Unisono pour l'utilisation de musique dans la salle pour l'année 2022.

Unisono, c'est quoi?

Unisono est, pour faire simple, la nouvelle manière d'obtenir une licence lorsqu'on diffuse de la musique dans un lieu accessible au public (on appelait ça auparavant "payer la Sabam"). D'ailleurs, la plate-forme Unisono a été lancée en 2020 suite à une collaboration entre les différentes sociétés de gestion de droits que sont Sabam, PlayRight et SIMIM. Le but de ces sociétés est de rémunérer correctement l’ensemble des ayants droit, comme les artistes.

Une facture de 733€ pour 2022

Après deux années de pandémie où certaines réductions ont été appliquées, Jean-Louis s'étonne d'un retour à la normale dans les tarifs. "En 2020 et 2021, j'ai payé 360,42€ et 409,62€", se souvient-il. "Mais pour cette année, on me réclame 733€! Pour une petite salle de village, j'estime que c'est énorme. Ils pensent que tout a repris comme avant le covid alors que pas du tout." Le retraité reproche une politique trop agressive de la part d'Unisono. "Ils nous ont fait des petites réductions bien utiles durant deux ans", reconnaît-il. "Mais cette année, ils y vont gaiement." Jean-Louis craint pour tout le secteur des petites salles de village. "Si toutes les salles d'associations sont taxées de cette façon, j'ai peur pour les activités", soupire-t-il. "Il y en a déjà moins et on comprend pourquoi certains renoncent à être organisateurs. Unisono se sert largement sur les petites activités de villages."

"Pour que les créations des artistes soient correctement rémunérées"

Nous avons contacté Unisono pour comprendre pourquoi les factures de Jean-Louis affichaient ce montant. La plate-forme souhaite directement faire la distinction entre deux frais. Les organisateurs d'événements doivent généralement payer les droits d'auteurs pour les auteurs-compositeurs et la Rémunération Équitable pour les producteurs et les artistes-interprètes. Dans le cas de Jean-Louis, seule la Rémunération Équitable est à régler "comme c'est une salle polyvalente", précise Benoit Gheysels, Music Manager à Unisono. Il indique également que beaucoup d'artistes vivent des revenus issus des droits d'exploitation de leur travail et qu'Unisono devait donc s'assurer de récupérer les droits d'auteurs et la Rémunération Équitable "pour que les créations des artistes soient correctement rémunérées."

Le tarif saisonnier n'est plus d'application en 2022

Benoit Gheysels confirme qu'un tarif préférentiel a bien été appliqué en 2020 et 2021. "Pour les établissements qui ont dû obligatoirement fermer à cause du covid", dit-il. "C'est en fait le tarif pour les exploitations saisonnières qui a été élargi. Il a été accordé à la demande de l’établissement si celui-ci avait été complètement fermé durant 3 mois consécutifs au cours de l’année."

Mais en 2022, les établissements n'ont, à l'heure actuelle, pas été contraints de fermer leurs portes durant 3 mois. Ce qui change tout. "A priori, les salles polyvalentes n’ayant pas dû fermer 3 mois consécutifs à cause du covid en 2022, le tarif saisonnier ne sera donc pas d’application", affirme le Music Manager d'Unisono.

Pas de réductions prévues donc cette année. Mais pour Jean-Louis, le problème est plus global. Il considère que le prix à la base est beaucoup trop élevé. "Ce sont des montants énormes pour nous", se plaint-il. "Nous ne faisons que 3-4 bals durant l'année en plus de quelques soupers. Ça s'ajoute évidemment à d'autres frais. Ça fait beaucoup."

Comment expliquer ces montants considérés comme excessifs par l'homme de 72 ans?

"La rémunération équitable repose sur un arrêté royal et donc avec des tarifs fixes", explique Benoit Gheysels. "Dans le cas des salles polyvalentes, on fonctionne avec des licences annuelles non-obligatoires. C’est un forfait avantageux qui est déjà rentabilisé à partir de cinq événements." Selon lui, il est toujours possible de trouver des solutions en cas de problèmes de paiement. "Nous essayons toujours de tenir compte des situations exceptionnelles comme, récemment, les inondations", dit-il. "Et un plan de paiement pour les exploitants en difficulté peut toujours être demandé à Unisono."

Mais tous les organisateurs respectent-ils les règles?

Jean-Louis se pose la question du respect de ces demandes de licence. "Peut-être que les autres petites salles fonctionnent en noir, je ne sais pas ce qu'il se passe", dit-il. "Parce que ça devient impossible à gérer." Alors, peut-il y avoir des fraudes dans ces petites structures?. "Des contrôles sont, en effet, effectués lorsqu’Unisono présume une utilisation de musique n’ayant pas fait l’objet d’une demande d’autorisation ou n’étant pas couverte par une licence annuelle ou autre", indique Benoit Gheysels, Music Manager à Unisono. "Chaque dossier d’événement dans ce genre de salles est examiné de manière individuelle et tous les paramètres contractuels sont pris en compte lors du traitement."

Jean-Louis s'inquiète en tout cas pour l'avenir des petites salles de village comme la sienne. Selon lui, ça risque de freiner les ambitions de la nouvelle génération. "Je comprends que les jeunes hésitent à reprendre les activités car beaucoup trop de choses leur tombent sur le dos", soupire le retraité.

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