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"Je ne pensais plus jamais la revoir": flot d'émotions lors de la visite de Françoise à sa maman au home de Flobecq, décimé par le coronavirus

À la Providence Saint-Christophe, les visites aux résidents ont repris dans des conditions strictes. Françoise a revu sa mère pour la première fois depuis deux mois.

La question des visites dans les maisons de repos, où ont eu lieu de nombreux décès, est très délicate pendant cette période d'épidémie de Covid-19. Le 13 mars dernier, les visites y ont d'abord été totalement interdites. Mi-avril, la Première ministre annonçait un assouplissement, sous certaines conditions, pour éviter que des personnes âgées n'y meurent seules. Cette semaine, une circulaire déterminant les modalités pratiques des visites a été publiée et envoyée aux 602 maisons de repos de Wallonie. À Flobecq, lundi, Françoise a pu rendre visite à sa mère. Via le bouton orange Alertez-nous, elle nous a raconté "le bonheur" ressenti lors de ces retrouvailles.

Gisèle a l'habitude des visites quotidiennes de sa fille, pas des "chat" par vidéo

Françoise, 62 ans, et sa maman Gisèle, 89 ans, ont habité 30 ans l'une à côté de l'autre, dans des maisons voisines à Lessines. Une relation mère-fille "assez fusionnelle", note Françoise. Il y a deux ans, l'état de santé de Gisèle imposait de la placer dans une maison de repos. Elle a rejoint le home la Providence Saint-Christophe, à Flobecq. "C'était vraiment à contre cœur, mais c'était un geste d'amour", confie sa fille.

Françoise avait pris l'habitude de rendre visite à sa mère tous les jours. Fin février, souffrant d'une rhino-pharyngite, elle a préféré éviter de venir la voir par crainte de lui transmettre. "La pauvre, elle pèse 40 kilos, elle est assez faible", explique Françoise. Quand elle était enfin guérie, les visites dans les maisons de repos étaient interdites dans le cadre des mesures prises pour endiguer l'épidémie de coronavirus.

Depuis mi-mars, Françoise essayait de communiquer avec Gisèle par le biais d'une application de chat vidéo. Pas habituée à cette technologie, Gisèle n'a pas pu en profiter. Ce qui était frustrant pour Françoise : "Il n'y avait pas le contact, elle ne parlait pas, n'entendait pas bien, ne me regardait pas. C'était affreux !"

Le Covid-19 a fait des ravages au home de Flobecq, Gisèle atteinte du virus

Le home Saint-Christophe a été particulièrement touché par le Covid-19. Le bourgmestre de Flobecq, Philippe Mettens, évoque "une période de chaos à la fin du mois de mars et au début du mois d'avril". Sur trois semaines, 17 personnes y sont décédées, indique le bourgmestre. Entre le 9 et le 12 avril, tous les résidents et le personnel a été testé : 75% des résidents étaient positifs, 51% du personnel soignant également. "C'est à ce moment là qu'on a pris la mesure de la catastrophe", raconte Philippe Mettens.

Françoise a appris que sa mère avait été testée positive au coronavirus, mais ne présentait pas de symptômes de la maladie. 

Après deux mois sans visite, Gisèle ne reconnaissait plus sa fille

Après de longues semaines d'inquiétudes, alors qu'elle pensait peut-être ne plus jamais la revoir, Françoise a pu rendre visite à Gisèle ce lundi 27 avril. "On rentre d'abord dans une tente, puis dans un sas, on se désinfecte les mains", raconte-t-elle. Accompagnée par une infirmière, sa mère est apparue derrière une vitre. Mère et fille ont communiqué via un "baby phone".

Gisèle, "un peu atteinte par la maladie d'Alzheimer", dit sa fille, ne l'a d'abord pas reconnue. "Le plus dur pour moi ça a été qu'elle me dise 'bonjour madame'. J'ai eu les larmes aux yeux", confie Françoise. "Il y a un impact très important sur l'état de santé des résidents qui est lié à leur psychologie, au fait qu'ils ne voient plus leur famille", remarque Philippe Mettens. "Si on leur supprime ce contact (avec la famille, Ndlr), on supprime le lien à la vie", expliquait Georges Dallemagne, député cdH et médecin de formation, sur le plateau de Bel RTL.

Françoise a tenté de rafraîchir la mémoire à sa mère. Elle y est enfin parvenue en lui montrant, à travers la vitre, une photo de son petit fils âgé de 2 ans sur son smartphone. Gisèle a cette photo dans sa chambre. "C'est comme ça qu'elle est remontée à moi, en passant par ma fille, la maman du bébé", explique Françoise.

Après les larmes de chagrin, les larmes de joie

La tristesse a cédé la place à une joie intense. "Quand elle m'a reconnue... si vous saviez quel bonheur. C'était un moment merveilleux", confie Françoise. "Elle a ouvert des grands yeux qui se sont remplis de larmes, le miens aussi évidemment. Je n'oublierai jamais ce regard... de délivrance peut-être", raconte-t-elle. Car si elle a bien tenté d'expliquer à sa mère qu'elle n'avait pas le droit de lui rendre visite, "à leur âge, ils ne comprennent pas vraiment", explique Françoise.

Le temps imparti à la visite, trente minutes, s'est vite écoulé. Françoise a demandé sa permission pour une prochaine rencontre. "Elle me faisait des grands signes pour me dire oui et me faire des bisous", se souvient-elle. "J'avais du mal à partir", confie-t-elle. Si les visites sont désormais possibles, elles restent limitées. Rendez-vous a été pris dans 15 jours. 

Françoise tient à adresser un "très, très grand merci" aux infirmières, aides-soignantes, nettoyeuses, pour leur patience et leur gentillesse. Elle exprime également toute sa reconnaissance envers le home Saint-Christophe pour avoir permis ce moment exceptionnel. "Je pensais ne plus jamais la revoir, donc c'est un grand soulagement", souligne-t-elle.

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