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Amende de 75€ et policiers: à deux reprises, le contrôle de tickets SNCB achetés sur internet par Stefano vire au "cauchemar"

Par deux fois, le scénario a été le même pour Stefano. Un problème surgit lors du contrôle de son ticket acheté via internet. L’accompagnateur de train décide alors de lui donner une amende et d’appeler en renfort la police. Le Bruxellois se dit désormais stressé à l’idée de monter à bord d’un train. Pour la SNCB, les accompagnateurs de train n'ont fait qu'appliquer le règlement. La société mais aussi l'asbl navetteurs.be conseillent aux usagers de toujours payer l'amende, avant de la récupérer plus tard en prouvant leur bonne foi.

"Je suis traumatisé par ces expériences, au point de faire des rêves et cauchemars de situations similaires. J’imagine que, même en ayant acheté un billet classique, je le perds et j'ai mal au ventre quand je suis dans le train, tant que le contrôleur n'est pas passé et que tout n’est pas en ordre", confie Stefano, un navetteur régulier.

En colère contre la SNCB, ce Bruxellois de 35 ans nous a contacté via notre bouton orange Alertez-nous pour partager deux mésaventures vécues sur le rail.

En juillet dernier, le trentenaire prend le train à Bruxelles avec un ami pour se rendre à Ostende. Comme souvent, il achète un ticket via internet. Lors du trajet aller, le voyage se passe sans souci. Mais le retour est nettement plus compliqué. Selon lui, le contrôle de son ticket a viré au drame. "J’ai été complètement humilié par un contrôleur qui refusait de m'écouter et de voir mes preuves de paiement indiscutables car sa machine ne retrouvait pas le titre de transport qui devait être normalement enregistré sur ma carte d'identité", raconte Stefano.


"Il a refusé de m’écouter et s’est mis à me crier dessus dans un train bondé"

En constatant qu’il ne dispose pas de ticket valide à bord, l’accompagnateur de train lui demande de payer le "tarif à bord", soit le prix du voyage majoré de 7 euros.

Mais le Bruxellois refuse d’obtempérer. D’abord parce qu’il estime avoir déjà acheté un ticket et puis il n’a pas de carte de crédit, ni d’argent liquide pour payer. "J’ai essayé de m’expliquer et de montrer que la somme avait bien été débitée de mon compte via l’application de ma banque. En vain. Il a refusé de m’écouter et s’est mis à me crier dessus dans un wagon bondé, en répétant sans cesse 'ma machine, ma machine, ma machine', comme si celle-ci était supérieure à n'importe quel autre système informatique pouvant rencontrer un problème technique", déplore Stefano.

"A la gare suivante, à Bruges, quatre agents de police et deux gardes Securail sont montés à bord en renfort. Pourtant, je n’ai été ni agressif, ni violent. J’étais à deux doigts de m’effondrer en larmes", confie-t-il. Le contrôleur lui dresse alors un constat d’irrégularité (C170). Ce qui équivaut à une amende de 75 euros. "Mais il ne m’a pas expliqué qu’il suffit de présenter ensuite ses preuves d’achat pour se faire rembourser."


"Des mois pour que la SNCB confirme l'annulation des amendes"

Choqué par ce comportement qu’il juge "inhumain", Stefano décide de porter plainte et contacte le service clientèle de la SNCB. Le problème est identifié: le Bruxellois a acheté un billet week-end en ligne, sans spécifier la date de retour. 

"Ce n’est signalé nulle part qu’il faut, dans ce cas, indiquer le jour du trajet retour. On est censé le deviner", déplore le navetteur.

La société de chemin de fer lui propose de payer un montant de 25 euros pour clore son dossier. Stefano trouve cette décision injuste puisqu’il a bien payé son ticket de train. Il fait alors appel au service de médiation pour les navetteurs (ombudsrail), un intermédiaire indépendant entre la société et les clients. 

"Cela a duré des mois pour que la SNCB, malgré les preuves de paiement via les extraits de compte, stoppe enfin sa procédure et que je ne reçoive plus de lettres d'amendes pour 'fraude'! J'ai dû demander l'aide au médiateur des chemins de fer pour trouver un compromis et enfin obtenir une réponse confirmant l'annulation des amendes accumulées entre-temps", souffle Stefano.


"J’étais dans un état de stress intense à l'idée de revivre la même expérience"

Plus récemment, début mars, le navetteur affirme avoir été confronté au même problème. "Imaginez-vous la panique que j'ai ressentie lorsque, lors d'un autre voyage, j’ai dû faire face au même "braquage" d'un contrôleur qui a approché sa machine de mes yeux "pas de titre de transport". Et il a refusé aussi mes explications", se souvient Stefano. "Arrivé en gare de La Louvière, j’étais dans un état de stress intense à l'idée de revivre la même expérience. Je n’étais donc pas étonné de voir deux policiers que le contrôleur avait appelés. Comme si ce n'était pas assez d'être traité d'office comme un fraudeur, vous devenez tout d'un coup une personne dangereuse", déplore-il.

Cette fois, il n’y a aucune explication au problème rencontré. Le Bruxellois contacte à nouveau le service clientèle en leur fournissant une preuve de paiement de son ticket, à savoir un extrait de compte.


La SNCB s’excuse pour "cette situation désagréable"

Environ un mois plus tard, il reçoit un courrier de leur part. La SNCB revient d’abord sur les faits. Ne pouvant pas vérifier la présence d’un titre de transport valable sur la carte d’identité, l’agent d’accompagnement a proposé un billet au tarif à bord. "Vous n’avez pas pu donner suite à cette proposition. Nous appliquons dans ce cas un montant forfaitaire de 75 euros", explique le service clientèle.

Ensuite, il présente ses excuses à Stefano pour cette "situation désagréable", avant de confirmer que le titre de transport était "effectivement valable" et d’annuler l’amende de 75 euros. "Le constat d’une situation irrégulière par le personnel est parfois perçu comme une atteinte à l’honorabilité ou un abus de pouvoir. Malheureusement, nous déplorons aussi dans nos trains la présence de personnes indélicates qui abusent de déclarations mensongères et de faits frauduleux", souligne la SNCB.

Pour Stefano, cette lettre justificative est insuffisante et décevante. Dans les deux cas, il estime que la réaction de la société de chemin de fer est inacceptable. "La SNCB joue à chaque fois la politique de l'autruche et ne prend pas entièrement ses responsabilités", estime le voyageur qui ressent un profond sentiment d’injustice. "Même si la SNCB s’excuse pour la situation, ils ne mesurent pas l'ampleur et les conséquences de ce qui m'est arrivé. Et je ne vois pas en quoi les problèmes de fraude et des gens qui mentent me regardent et surtout pourquoi ça pourrait expliquer et excuser que des personnes honnêtes vivent un tel cauchemar!"


"Que le navetteur soit de bonne ou de mauvaise foi, le contrôleur doit suivre le règlement"

Thierry Ney, le porte-parole de la SNCB, peut difficilement mesurer les faits. 'Je ne peux pas commenter ce cas particulier puisque je n’étais pas présent." Mais il rappelle que l’une des missions de l’accompagnateur de train est de vérifier les titres de transport, en respectant la procédure. "Que le navetteur soit de bonne ou de mauvaise foi, si son titre de transport n’est pas valide, le contrôleur doit suivre le règlement, en adoptant l’attitude la plus professionnelle possible vis-à-vis de la clientèle. Si une personne refuse d’obtempérer, il a la possibilité de faire appel à la police des chemins de fer et à une équipe de Securail", indique-t-il.

"Si le navetteur est de bonne foi, il pourra le prouver en contactant le service clientèle qui mènera une enquête et tranchera de manière impartiale et analytique", souligne le porte-parole. Enfin, Thierry Ney assure qu’un contrôleur peut être contacté suite à une plainte d’un voyageur. "En tout cas, une chose est sûre, l’agressivité ne résout évidemment rien."


"Je me suis senti humilié devant tous ces regards qui ne savent pas si vous êtes une 'crapule' qui fraude"

Stefano avoue s’être emporté lors du deuxième voyage début mars. "Je ne pouvais plus contrôler ma colère. Je suis d’ailleurs prêt à présenter mes excuses pour mon emportement au contrôleur et aux policiers. Mais honnêtement, qui peut me jeter la pierre? Qui aurait été insensible et ne se serait pas senti humilié devant tous ces regards qui ne savent pas si vous êtes une "crapule" qui fraude ou qui pourraient se demander si vous êtes une personne dangereuse car la police débarque ?"


"Mieux vaut payer l’amende et contacter le service clientèle"

De son côté, Gianni Tabone, président de l’asbl navetteurs.be, recommande également aux navetteurs de rester le plus calme possible. "Je comprends évidemment cette réaction, mais si je peux donner un conseil aux usagers, c’est d’essayer de ne pas envenimer la situation."

D’après lui, deux situations peuvent se présenter dans ce cas de figure. "Soit vous tombez sur un accompagnateur qui va suivre et appliquer la règle. Soit vous tombez sur un contrôleur compréhensif qui va fermer les yeux. Mais en cas de contrôle de la brigade volante comme on l’appelle, celui-ci risque d’être sanctionné en interne pour ne pas avoir respecté le règlement et le voyageur devra payer plus cher", indique le responsable de l’association de voyageurs. "Mieux vaut donc payer l’amende et contacter ensuite immédiatement le service clientèle. Si vous êtes une personne de bonne foi, vous obtiendrez gain de cause dans 99,9% des cas et vous serez rapidement remboursé de tous les frais", assure-t-il.

En tout cas, d’après lui, ce souci ne semble pas fréquent. "C’est la première fois que j’entends ce genre de problème. Même sur les réseaux sociaux, je n’ai pas lu ce genre de mésaventures. Ce qui arrive par contre régulièrement, ce sont des automates en panne dans les gares alors qu’ils ne sont pas signalés comme tel", indique Gianni Tabone.


"La SNCB devrait faire en sorte que les différents systèmes de paiement fonctionnent"

Face à ces problèmes avec les différents canaux de vente (guichet, automate, application, site internet), Stefano estime que la société de chemin de fer devrait davantage se remettre en question. "La SNCB fait des affiches de prévention contre les amendes si on achète son ticket à bord et/ou ventant 'tous les moyens de paiement possible' pour acheter son ticket... Ne serait-il pas plus intelligent de faire d’abord en sorte que les paiements fonctionnent, que les automates dans les petites gares soient réparées, etc.", interroge le trentenaire.


8% des billets de train sont désormais achetés via internet

D’autant plus que d’après les chiffres fournis par la SNCB, la vente automatisée rencontre un succès grandissant. 48% des achats se font via les automates et 8% des billets sont achetés via internet.

Aujourd’hui, le Bruxellois confie être toujours très marqué. "Ce n’est pas une tentative de gonfler cette affaire mais je me sens traumatisé par ces deux événements. Je ne cache pas que je suis une personne sensible et que j'ai du mal à classer ça quelque part", avoue-t-il. En témoignant, Stefano souhaite en tout cas sensibiliser la SNCB, avec l’espoir que tous les contrôleurs fassent leur travail "en restant humains".

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