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Au chômage depuis un an, Chantal accepte des missions d'intérims mais elle perd de l'argent: "J'ai travaillé pendant une semaine, j'ai perdu 103€"

Ce n'est pas la première qu'on vous évoque cette situation absurde à plus d'un point: un chômeur qui accepte certains jours de travail en intérim peut perdre de l'argent à la fin du mois. Chantal est un nouvel exemple. L'ONEM nous a expliqué en partie les raisons du problème, et a avancé quelques solutions.

Perdre son travail à 55 ans est souvent devenu, hélas, synonyme de fin de carrière. Il est difficile de retrouver du travail de manière fixe et quand c'est le cas, les conditions ne correspondent que très rarement au profil et à l'expérience du candidat.

Ce constat, Chantal (nom d'emprunt) le fait amèrement depuis plus d'un an. Mais comme si ça ne suffisait pas, elle vient de se rendre compte qu'en acceptant des petits boulots en intérim, elle… perdait de l'argent, au lieu d'en gagner. "C'est un piège", nous a-t-elle confié après avoir contacté la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous.

Sans emploi à 56 ans, elle reste "une battante"

C'est avec une pointe de désillusion que Chantal nous a dressé le bilan de sa carrière. Aide-soignante de formation, elle est passée par la caisse du Delhaize avant de reprendre la mercerie de ses parents qu'elle a gérée seule durant 6 ans. "Je vendais des tissus, des machines à coudre, etc".

En 2006, elle est devenue "employée dans le secteur du service à domicile", travaillant dans une entreprise de nettoyage 28h par semaine. "A l'époque, je gagnais 1.300€ par mois".

Mais l'aventure s'est mal terminée, car on ne lui proposait plus que 6 heures par semaine dans une autre société. Le contrat s'est terminé et elle s'est retrouvée au chômage, à 56 ans. Une situation délicate, car Chantal se rend compte qu'il y a "un problème avec les personnes de plus de 50 ans pour retrouver du travail: j'envoie des CV partout, je suis polyvalente, mais je ne trouve rien".

Elle estime pourtant rester "une battante" et "est encore très motivée pour travailler".

680€ de chômage, seule avec un enfant aux études

"J'ai 10 ans de travail comme salariée, mais pas à temps plein, donc je ne touche que 680€ par mois". C'est forcément très peu, surtout quand on est "isolée, et avec un enfant à l'université".

Avec un loyer de 615€, Chantal a forcément "très difficile à joindre les deux bouts", mais peut compter, heureusement, sur la pension alimentaire de son ex-mari pour aider son fils.

Elle ne peut pas, "et ne veut pas", rester au chômage. Même si "le nettoyage est un métier assez physique", elle accepte de travailler "quelques heures" par semaine pour une société d'intérim en titres services.

Elle gagne moins quand elle travaille…

Mais rapidement, Chantal a eu l'impression qu'en acceptant ces petits boulots précaires, elle "perdait de l'argent". Elle a donc fait ses comptes pour s'en assurer.

"Au chômage je touche 680€/mois, et sur ma fiche, mon indemnité est de 23€/jour. Au mois d'avril j'ai effectué un intérim d'une semaine dans une entreprise de nettoyage, mais je ne travaillais que 3 heures par jour. A la fin de ce mois, je n'ai reçu du chômage que 391€, car on m'a retiré deux fois 23€ donc 46 euros/jour de travail, alors que je ne travaillais que 3 heures par jour. J'ai donc reçu 391€ d’allocations de chômage et 186,08€ de salaire. La perte sur le mois s'élève à 102,92€".

C'est donc un nouveau témoignage d'une situation complètement paradoxale, et qui a pour effet très pervers de décourager certains chômeurs à accepter des petits boulots en intérim.

Que répond l'ONEM ?

Nous avons soumis l'histoire de Chantal à l'ONEM qui reconnait que "l'application de ces règles (voir plus bas) peut avoir comme conséquence, en théorie, qu’un chômeur complet perçoive plus qu’un chômeur qui effectue des prestations de travail (à temps partiel) en intérim". L'Office National de l'Emploi ne souhaite hélas pas commenter les cas particuliers. On doit donc se contenter de la théorie.

"La réglementation chômage prévoit que le chômeur qui exerce des prestations de travail durant son chômage doit biffer sa carte de contrôle pour chaque journée travaillée. Il ne peut alors bénéficier d’allocations durant ces journées. Celles-ci sont non indemnisables, même s'il n'a travaillé qu'une partie de la journée. Seules les journées complètes de chômage peuvent être indemnisées", nous a expliqué la porte-parole. Jusque-là, on suit.

"En outre, une règle particulière s'applique aux samedis. Les samedis qui suivent 4 ou 5 jours non indemnisables (parce que le chômeur a travaillé ces jours-là) ou les samedis situés entre un vendredi et un lundi travaillés, ne sont pas indemnisables. Les samedis qui sont précédés par 2 ou 3 jours d'activité sont, quant à eux, indemnisés pour moitié". Les choses se compliquent, mais on comprend que Chantal aurait dû perdre son indemnité du lundi au samedi, soit 6 x 23€, donc 138€. Elle aurait donc du toucher 522€ du chômage. Elle n'en a touché que 390.

Il y a donc une autre règle de calcul qui nous échappe (Dieu sait qu'il y en a…), et qui a visiblement doublé la perte d'indemnité par jour de travail presté.

Des solutions ?

Cependant, l'ONEM nous a appris que "pour éviter une telle situation, un mécanisme de correction existe".

Visiblement, "si un chômeur reprend un emploi à temps partiel, il peut, sous certaines conditions, percevoir une allocation à charge de l’ONEM en complément de sa rémunération". Cette allocation est appelée 'allocation de garantie de revenu (AGR)', et "vise à garantir au chômeur un revenu global (rémunération + allocation) qui est au moins égal à son allocation de chômage si l'emploi à temps partiel ne dépasse pas 1/3 temps ; est supérieur à son allocation de chômage si son emploi à temps partiel dépasse 1/3 temps".

Consultez les pages "Quelles catégories de travailleur à temps partiel peut-on distinguer pour le secteur chômage?" et "Avez-vous droit à l’allocation de garantie de revenus ?"sur le site de l'ONEM pour en savoir plus.

Chantal, quant à elle continue de chercher "de 7h à 17h" du travail. Mais avec ce qui vient de lui arriver, elle estime que "elle ferait mieux de rester tranquille en attendant un temps plein". D'autant plus qu'à chaque fois qu'elle travaille, elle doit "remplir de nombreux papiers", demander "un cachet à la commune". Tout ça pour gagner moins. Mais pour retrouver de la dignité et se réinsérer dans la société.

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