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Christophe redoute l’instauration du Bus à Haut Niveau de Service à Charleroi: "Cela va étouffer les petits commerces"

A Mont-Sur-Marchienne dans l'entité de Charleroi, le projet BHNS (Bus à Haut Niveau de Service) en inquiète plus d’un. A l’étude depuis 4 ans, le gouvernement wallon - au travers de la Sofico (Société wallonne de Financement Complémentaire des Infrastructures), du Service Public Wallon Mobilité et infrastructures- et de l’OTW (Opérateur de Transport de Wallonie) veut désormais mettre les bouchées doubles pour réaliser le premier BHNS en Belgique. Une enquête publique est annoncée auprès des riverains à la ville de Charleroi. Elle se tiendra du 22 mai au 22 juin avec 4 jours de consultations possibles.

Le concept de Bus à Haut Niveau de Service est apparu en 2004 à Nantes en France et se répand depuis, partout chez nos voisins de l’Hexagone. Ce plan de circulation vise à désengorger les centres-villes durant les heures de pointe et à offrir une même cadence de service que les trams ou les métros mais à bord de bus, sans la nécessité donc de construire des voies ferrées.

Un chantier titanesque et un budget important pour créer une première à Charleroi

En Belgique, il n’y a pas encore de BHNS mais la ville de Charleroi ambitionne de devenir la première à offrir ces services. Le plan prévoit que des bus relieront Montigny-le-Tilleul à Charleroi via la N53 et l’avenue Paul Pastur d’un côté alors qu’ils feront le lien entre Charleroi et le lieu-dit Ma Campagne à Gerpinnes de l’autre. Des bus seront prévus toutes les 10 à 15 minutes.

"55.000 ménages sont concernés (...) Il s’agit aussi d’une belle opportunité de transformer la N53 et la N5 en boulevards urbains", précise un communiqué de presse du projet. Et de préciser le coût de ce chantier titanesque: "Ce projet ambitieux pour Charleroi et les Carolos est porté par l’ensemble des pouvoirs publics et financé à hauteur de 50 millions euros par le Gouvernement Wallon au travers de la SOFICO (Société wallonne de Financement Complémentaire des Infrastructures) qui finance les travaux d’infrastructures nécessaires à la réalisation du BHNS. Elle bénéficie pour ce chantier de l’assistance de son partenaire technique, le Service public de Wallonie Mobilité et Infrastructures. Le TEC, quant à lui, est financé à concurrence de 3,5 millions d'euros pour la prise en charge des études, 5 millions d'euros pour l’achat du matériel roulant et 1,6 million d'euros par an pour l’exploitation de la ligne."

Un sens unique controversé

A Mont-Sur-Marchienne, le projet BHNS passe également par l’instauration de sens uniques, ce qui n’est pas au goût de tout le monde. Christophe, gérant d’un magasin d’informatique, qui sert également de point Mondial Relay, est fermement opposé à l’instauration de ce sens unique avenue Pastur : "Mont-sur-Marchienne est l’une des seules communes qui bénéficie encore d’un petit centre-ville avec une activité commerciale et on veut étouffer ses petits commerces", estime-t-il. Il a déclenché le bouton orange Alertez-nous pour nous faire part de son inquiétude et de l’impact que ces aménagements pourraient avoir sur son activité commerciale.

"Chaque jour, je reçois entre 200 et 300 personnes qui viennent retirer leur colis au sein de ma boutique. Oseront-elles encore venir malgré ce sens unique? De même, on veut nous retirer les places de parkings aux alentours, dont celles notamment situées juste devant le musée de la photographie. Déjà que cet endroit draine une certaine circulation mais si ses visiteurs sont privés de places de stationnement, comment vont-ils s’y rendre ?" Christophe qui est aussi un riverain de la zone en question estime que ces aménagements "vont cadenasser" le quartier et que pour rentrer chez lui en voiture, "il devra parfois effectuer 2km en voiture au lieu de 50 mètres".

Concernant ce sens unique, Franco Meggetto, porte-parole de l’échevin Xavier Desgain (ECOLO) chargé de la Mobilité et Sécurité routière de la ville de Charleroi, se veut catégorique. "Des changements ont été apportés au plan initial". Et de développer: "Un sens unique avait été imaginé dans la descente de l’avenue Pastur et de la rue du beau site. Le premier projet "sens unique" a provoqué une levée de boucliers incroyable. L’échevin Xavier Desgain a alors promis que le sens unique ne sera plus opérationnel qu’à l’heure de pointe. On a fait une demande pour que cette heure soit déterminée avec précision aux alentours de 7h à 9h. Quelques commerces sont là et ont peur qu’on ne puisse pas accéder en descendant à leur devanture. Mais ils ne seront pas impactés par ce sens unique. D’autres craignent que cela soit des prémices à un sens unique définitif. Il n’en est pas question. L’échevin l’a garanti. Ce sens unique n’est pas définitif et permanent. C’est un engagement qu’on a pris", promet le porte-parole de l’échevin.

"Manque de transparence" et tracts anonymes

Christophe dénonce aussi ce qu'il appelle "un manque de transparence des autorités". "Cela fait 4 ans que ce dossier nous inquiète. On a fait pas mal de démarches, dont 6 réunions de concertation avec les autorités"... 

Des rencontres ont été organisées par les instances en place à Charleroi. "Les autorités de la ville ont organisé des groupes de concertation avec des riverains emblématiques de chaque tronçon. Nous n’avions aucune obligation légale de faire cela, mais la Ville a organisé un processus de concertation en dehors des obligations légales. De plus, l’enquête publique qui est habituellement de 2 semaines, a été prolongée à 1 mois pour laisser le temps aux riverains de prendre connaissance du projet", justifie le porte-parole de l’échevin carolo.

Mais un tract anonyme, distribué la semaine dernière dans les boîtes aux lettres du quartier, est venu raviver les inquiétudes de nombreux riverains à quelques jours de l’ouverture de l’enquête publique. "Ces plans ne sont pas ceux que la commune nous avait promis", déplore Christophe.

Le porte-parole de l’échevin de la Mobilité Xavier Desgain (ECOLO) a pris connaissance de ce flyer et déplore cet acte "malintentionné de désinformation". Joint par nos soins, il nous détaille : "Des tracts anonymes ont été piratés et distribués aux riverains la semaine dernière, provoquant un vent de panique au sein de la population concernés. Ces plans étaient des documents de travail et des tracés parallèles. Mais ils sont tout à fait obsolètes. Ce sont des documents truffés d’erreur", tente de rassurer Franco Meggetto.

Et de promettre qu’il n’y aura pas de "mauvaise surprise" pour les riverains lors de l’enquête publique.

Le BHNS, un "dossier difficile"

Les autorités communales sont conscientes que ce dossier est "difficile": "Personne n’aime le changement et nous sommes face à beaucoup de gens inquiets. C’est un dossier difficile sur lequel on fait face à une opposition très vive. Même si la ville n’est pas impliquée financièrement dans ce dossier, c’est à la ville d’organiser l’enquête publique parce qu’elle sera traversée par le chantier. On essaye d’obtenir des aménagements pour que les riverains soient le moins possible impactés", promet Franco Meggetto.

Le BHNS de Charleroi devrait en amener d’autres en Wallonie : la mise en service de quatre lignes de BHNS à Liège à l’horizon 2025. "Et la Wallonie est également en attente de la confirmation du financement européen d’un projet BHNS d’infrastructures BHNS sur la N51 sur 4 communes de Mons à Boussu", complète Martin Duflou, Expert, Directeur de l'Autorité Organisatrice du Transport du SPW Mobilité Infrastructures.

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