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Constant, 50 ans de carrière, l’un des plus anciens maîtres-tailleurs de Belgique: "Il fallait 40 heures pour confectionner un costume"

Constant Kalavasis est l’un des plus anciens maîtres-tailleurs du pays. L'homme passionné transmet désormais son savoir à sa fille Christel.

"Vendredi 13 octobre à Verviers, nous avons fêté les 50 ans de travail de mon papa en tant que maître-tailleur", débute Christel via le bouton orange Alertez-nous. La femme de 38 ans a tenu à nous raconter l'histoire de son père et de ce métier en voie de disparition.

Constant coupe et confectionne des vêtements sur mesure pour homme depuis son adolescence. "J'avais 13 ans lorsque j'ai décidé de faire ce métier. J'ai vu une école de tailleurs dans une rue de Verviers et je me suis dit: 'pourquoi pas moi'. Je me suis inscrit". En 1967, Après quatre ans de formation, j'ai été engagé chez D.D. Ancion, une maison spécialisée dans les vêtements confectionnés et sur mesure", détaille Constant.

"A l'époque, il y avait beaucoup de tailleurs à Verviers. C'était une ville de tissus, de tisserands. Il y avait beaucoup de magasins, c'était très agréable", se rappelle l'homme de 67 ans.

"On a même fait des vêtements pour le film Australia"

Il faut savoir qu'un maître tailleur possède de nombreuses compétences. Il doit être "coupeur" afin de fabriquer les patrons et couper les pièces, "saladeur" lorsqu'il prépare les doublures, les poches, les boutons. Il doit être "apiéceur" en montant la veste du costume.

Cet artisan est également "culottier" lorsqu'il assemble les pièces du pantalon, mais aussi "giletier" quand il assemble des pièces du gilet et enfin "boutonniériste" lorsqu'il réalise toutes les boutonnières du costume.

Ces tâches sont individualisées dans les grandes entreprises qui confectionnent des vêtements. "Il fallait 40 heures pour confectionner un costume", se souvient L'homme. "On a fait pas mal de vêtements pour les orchestres de Verviers et pour d'autres évènements. On a même fait des vêtements pour le film Australia", confie-t-il.


"Les gens étaient beaucoup plus élégants"

Depuis le début de sa carrière, l'homme passionné par la couture, n'a jamais quitté la boutique. Il se remémore la "belle époque" avec nostalgie. Selon lui, les hommes portaient une grande importance à leurs vêtements dans les années 70 et 80. "C'était l'époque des beaux films comme Borsalino. Les gens étaient beaucoup plus élégants. On ne s'habillait pas comme tout le monde. C'était une autre époque", constate le père de famille.

 
 Image d'illustration

"Il n y a plus aucune école pour former des tailleurs"

Depuis sa fondation en 1840, l'entreprise créée par Monsieur Ancion a transmis ses valeurs de maître-tailleur en maître-tailleur. Pourtant le métier s'est marginalisé dès le 19ème siècle à cause de l'industrie de la confection. Désormais, ce domaine appartient essentiellement à l'industrie du luxe. "Il n y a plus aucune école dans la région pour former des tailleurs", précise Christel. 

 
Image d'illustration

Selon Constant, tout a vraiment changé durant les dix dernières années. "Les chaînes de magasins ont tout bousculé. Les gens n'achètent plus une qualité ou une belle finition. Ils achètent une marque et ça c'est dommage", constate le maître-tailleur.

Ces changements ont peu à peu bouleversé la profession. La boutique dans laquelle Constant travaille depuis cinq décennies a dû s'adapter comme les autres. Désormais, l'artisan ne fait plus de sur-mesure. Il vend des vêtements déjà confectionnés par des fournisseurs européens. Les moments de couture se limitent aux retouches. "Quand j'ai commencé à travailler, il y avait 10 tailleurs, maintenant il y a ma femme, ma fille, une vendeuse et moi. Dans l'arrondissement, il n'y a plus d'atelier qui fait du sur-mesure", regrette-t-il.


Désormais patron du magasin, il transmet son savoir à sa fille Christel. Cette dernière s'est lancée dans cette profession tout naturellement car elle baigne dans cet univers depuis son plus jeune âge. "Elle est née dans le magasin pratiquement", plaisante Constant, heureux de partager son savoir avec son enfant. Cette dernière travaille officiellement dans le magasin depuis 6 ans.

Mais malgré la relève assurée, le maître-tailleur est inquiet pour l'avenir de la profession. "Notre clientèle nous fait encore vivre mais elle vieillit. Ça ne s'améliore pas. On attend un centre commerciale pour "redynamiser" Verviers car la ville se vide de ses commerces", espère Constant. 

 

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