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Facebook a fermé plusieurs groupes d'étudiants d'une même année: "Une semaine avant le blocus, c'est une catastrophe!"

Partage d'informations, de tuyaux, de documents, de questions: les groupes Facebook d'une promotion d'études supérieures sont une mine d'or pour les étudiants. Et quand ils ferment soudainement à quelques jours du début du blocus, c'est la panique. RTL info s'est penché sur l'origine du problème, et rien n'est simple…

De manière plus ou moins discrète, Facebook est en train de faire un sacré ménage par rapport à tous les contenus qu'il permet d'héberger. Il est vrai que ces dernières années, le premier réseau social au monde avait du mal à contenir l'imagination débridée de ses deux milliards d'utilisateurs.

Devenu une véritable usine à gaz en multipliant ses espaces de publication et d'échange (profil d'un particulier, page d'une entreprise, groupes, etc…), Facebook a bien du mal à contrôler les milliards de messages, infos, photos, vidéos, concours ou objets mis en vente chaque jour. On le conçoit aisément.

Mais les conséquences de ce contrôle pratiquement impossible ont été très lourdes dernièrement. Campagne de fake news (pour lui et contre sa rivale Hillary Clinton) orchestrée de près ou de loin par l'entourage de Trump afin de faciliter son élection à la présidence des États-Unis ; recrutement et propagande de l'État islamique ou d'autres groupes terroristes. Deux exemples qui font froid dans le dos, et qui ont obligé Facebook à réagir.

Il semblerait que les premiers effets des changements annoncés soient visibles. Le site Nordpresse qui publie du contenu satirique sous forme d'articles de presse a vu sa page Facebook et ses 204.000 fans supprimée cette semaine. Les Décodeurs, rubrique en ligne du journal Le Monde qui veille notamment sur la propagation de fausses informations sur internet, évoque "le discret ménage de Facebook" et la fermeture de nombreuses pages incitant à la haine, principalement d'extrême-droite.

Groupes d'étudiants fermés: des dommages collatéraux ?

Ce ménage de Facebook du mois de décembre a également modifié la manière dont on peut utiliser le réseau social. A cause des abus, dit ce communiqué de presse du réseau social, la possibilité de 'tagger un ami', tout comme celle de faire des sondages/concours/jeux en demandant aux gens de réagir de telle ou telle manière à une publication, a disparu (en partie, du moins, visiblement). Il entend ainsi lutter contre "les pièges à engagement" ("engagment bait"), qui polluent de nombreux fils d'actualité.

Mais il pourrait y avoir des conséquences plus fâcheuses. Plusieurs étudiants ont contacté cette semaine la rédaction de RTL info via le bouton orange Alertez-nous pour signaler la fermeture inopinée de groupes Facebook rassemblant tous les membres d'une année d'étude d'une faculté, et qui leur sert de véritable forum.

"Ce matin (mardi 19 décembre, NDLR), à l'approche du blocus, les groupes Facebook des étudiants en médecine de l'UCL (BAC3, MASTER1, 2, 4) ainsi que les groupes de BAC1 en sciences économiques et gestion à Solvay ont été fermés", nous a écrit un étudiant souhaitant rester anonyme.

Et les conséquences ne se limitent pas du tout à une simple impossibilité de discuter. "Une semaine avant le blocus c’est une catastrophe étant donné qu’on y partage nos synthèses, notes, conseils et j’en passe", a expliqué une étudiante.

"Il y a souvent un groupe par année d'étude, par filière et par faculté", nous a confirmé un étudiant de l'Université de Liège en psychologie, également concerné par une fermeture de groupe. "On partage principalement des informations sur des cours annulés, des papiers à rendre, des choses utiles pour les étudiants comme des changements d'horaire. On trouve également des bonnes synthèses de cours".

Quant aux sujets plus sensibles comme le partage de questions d'examens récurrentes, "on utilise d'autres moyens pour se les communiquer".

Les pages, les profils et les groupes ne sont jamais fermés sans explication, et uniquement après qu'ils nous aient été signalés

Facebook n'a rien modifié de spécial par rapport aux groupes

Comme tout bon géant du web américain, Facebook verrouille savamment sa communication officielle. A part l'annonce déjà lointaine d'un meilleur contrôle des contenus publiés, le réseau social n'explique les fermetures de pages, de profils ou de groupes que par "une infraction envers les standards de la communauté", la bible du bon comportement social en ligne.

La porte-parole pour le Benelux nous a assuré que Facebook "n'avait pas" modifié les politiques de publication, de contenu ou de fonctionnement des groupes. "Les pages, les profils et les groupes ne sont jamais fermés sans explication, et uniquement après qu'ils nous ont été signalés, et que nous ayons conclu qu'ils enfreignaient effectivement notre guide d'utilisation de la communauté".

Il y aurait "quelques exceptions", d'après notre contact, "par exemple lorsqu'on détecte une activité suspecte si une page récolte vraiment beaucoup de visites soudainement, ou quand quelqu'un change de nom de profil plusieurs fois sur une courte période de temps". Dans ce cas, Facebook "gèle la page ou le profil durant un certain temps, et demande à la personne de s'identifier". C'est un moyen "de se protéger des comptes piratés", et "quand un contenu est fermé, une personne peut envoyer une demande à Facebook pour le restaurer, cette demande sera examinée".

Les universités n'ont rien à voir là-dedans

Pourquoi plusieurs groupes Facebook d'étudiants ont-ils dès lors été fermés ? Certains étudiants ayant contacté la rédaction de RTL info ont fait état de "rumeurs" impliquant les Facultés concernées. "Il semblerait que (les universités) sont à l'origine des suppressions massives. Les possibles raisons évoquées seraient que nos groupes 'enfreignent les droits professionnels'. On nous censure sans nous prévenir".

Aucune institution, aussi puissante soit-elle, ne peut faire plier Facebook et le forcer à fermer certains groupes. Pour en avoir le cœur net, nous avons tout de même contacté l'ULB et l'UCL, les deux plus grandes universités francophones du pays. Du côté de l'Université Libre de Bruxelles, "on a entendu parler de la fermeture de groupes Facebook, mais personne, d'aucun département, n'a entendu de problèmes liés à ces groupes". Pas de démarche des facultés bruxelloises, donc.

Du côté de l'Université Catholique de Louvain-la-Neuve, même son de cloche. "Les responsables de Faculté ne sont au courant de rien à ce sujet". L'UCL rappelle que des partages d'informations, même sensibles, il y en a "toujours eu au sein des étudiants", et que "quand une page fermait, une autre ouvrait". Les facultés n'ont donc ni l'envie ni l'ambition de fermer des groupes Facebook d'étudiants, "et quand bien même, il leur serait impossible de contacter Facebook directement pour faire de telles demandes".

Conclusion

Impossible de savoir pourquoi certains groupes Facebook rassemblant les étudiants d'une année de telle ou telle faculté, de telle ou telle université, en Belgique, ont été fermés.

Le réseau social N.1 dans le monde nous a garanti qu'il n'avait pas modifié sa politique de publication ou de contenu hébergé au niveau des groupes. Les universités n'ont entamé aucune démarche pour faire fermer ces groupes dont elles ne s'occupent pas du tout et qu'elles ne voient pas spécialement d'un mauvais œil.

Certains ont évoqué un rapport avec des liens Google Drive (l'espace de stockage de fichiers gratuit fourni par Google) postés sur ces groupes, qui seraient d'un seul coup mal considérés par Facebook.

Ce pourrait être une piste, impossible à vérifier. Mais elle va de pair avec les récentes conséquences de l'application de mesure et de contrôle plus strictes du contenu, par Facebook, se trouvant sur ses diverses plateformes. Qui sait si les nouvelles règles mises en place par le réseau social n'ont pas provoqué la fermeture accidentelle et temporaire de certains groupes répondant à certains critères ?

Car la bonne nouvelle, au moment de conclure notre enquête, c'est que de nombreux groupes étaient à nouveau accessibles, et que Facebook n'en a pas supprimé le contenu. "Plus de peur que de mal", concluait l'un de nos témoins.

Ce gros coup de stress doit servir de leçon aux étudiants, et à tous les autres utilisateurs. Facebook est une entreprise privée basée aux États-Unis, dont les innombrables services financés par la publicité sont gratuits pour le consommateur. En aucun cas il ne faudrait considérer cet espace de communication et d'échange d'informations comme un 'endroit' sûr, garanti, stable dans le temps.

Avant de crier au complot, à l'arbitraire, à la censure, rappelons-nous que Facebook n'a de compte à rendre à personne quant à sa manière de fixer ou modifier ses règles du jeu, tant que celles-ci n'enfreignent pas les lois en vigueur dans les pays où le réseau social est disponible. E si ça ne plaît pas, il suffit d'aller voir ailleurs…

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