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Réforme des bourses d'étude: sans nouvelle de sa demande depuis 5 mois, Isabelle est sommée de payer son minerval

La réforme de l'octroi des bourses d'étude n'est pas sans conséquences. Isabelle, qui a remis sa demande d'allocation en novembre dernier, n'était toujours pas au courant de la raison du blocage de son dossier à la Fédération Wallonie-Bruxelles. Du coup, son université s'impatiente et lui réclame le paiement de son minerval réduit normalement à 0€ pour les 'boursiers'. Suite à notre intervention, le traitement de son dossier s'est (enfin) débloqué.

Au début de l'année académique 2016-2017, les étudiants du supérieur, les hautes-écoles et les universités ont dû s'adapter aux nouvelles règles émises par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Le ministre de l'Enseignement supérieur, Jean-Claude Marcourt, avait décidé de réformer les critères d'octroi des bourses d'études, pour l'adapter au décret Paysage qui accorde plus d’autonomie aux étudiants pour élaborer leur cursus.

Comme tout changement de réglementation, cela ne s'est pas fait sans heurts. Les secrétariats des établissements de l'enseignement supérieur, tout comme les étudiants, se sont retrouvés assez démunis face aux modifications des critères d'octroi, qui ont rapidement nécessité quelques éclaircissements.

Isabelle n'a "toujours aucune réponse" de la Fédération, son université lui réclame le minerval...

On pensait que tout avait fini par s'arranger avec le temps, mais ça ne semble pas être le cas pour tout le monde. "Je suis étudiante à l'université. Je suis boursière et comme beaucoup d'étudiants je n'ai toujours aucune réponse de la Fédération Wallonie-Bruxelles sur l'avancement de mon dossier. Impossible de les joindre, impossible de savoir quand nous aurons une décision", a déploré Isabelle (nom d'emprunt) qui nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous, plus de 5 mois après l'introduction de sa demande de bourse.

Dernièrement, Isabelle a reçu un message de son université, qui s'impatiente de ne pas savoir si oui ou non, cette élève en dernière année de droit est considérée comme 'boursière', et n'a donc aucun minerval à payer.

"On nous réclame la décision avant le premier mai, faute de quoi les droits d'inscription provisoire (0 €) ne seront plus accordés et je devrai payer le minerval alors que justement cette bourse j'en ai besoin et que je n'ai pas envie de l'avoir fin juin. Je perds patience", nous a-t-elle expliqué.

Pour résumer, au lieu de toucher de l'argent pour payer une partie de ses frais de scolarité (en moyenne, un 'boursier' reçoit 1.080 euros par an), elle devrait donc au contraire débourser de l'argent pour son inscription, qui s'élèverait "à 835€".

Et Isabelle n'est pas la seule. Lors de la parution de cet article, un autre étudiant a tenu à réagir sur RTL info. "Je viens de lire votre article sur les bourses d'études. J'ai introduit la mienne le 14 septembre et j'ai téléphoné plusieurs fois à la Fédération. On me dit que le dossier suit son cours mais sans plus d'information. De son coté l'Université me presse afin d'avoir plus d'infos, sans quoi mon minerval sera à taux complet. Depuis septembre c'est l'attente".

Un "retard" qui n'est pas de son ressort

Nous avons soumis le problème d'Isabelle à l'attaché de presse de Jean-Claude Marcourt, le ministre de l'enseignement supérieur. "Le dossier a été rentré très tard, à la fin du mois de novembre, or il pouvait l'être à partir du mois de juillet", a-t-on appris dans un premier temps.

Mais ce retard n'est pas le fruit d'une négligence de la part d'Isabelle. "Le dossier à rentrer était identique à celui des années précédentes. Je ne sais pas le remettre plus tôt, à cause de la procédure et de la règlementation". Pour faire simple, ce qui pose problème, d'après Isabelle, c'est qu'"il faut une attestation d'inscription provisoire pour faire une demande de bourse", or pour être inscrit sans payer de minerval, il faut prouver qu'on a fait... une demande de bourse. Bref, c'est l'œuf ou la poule, et chaque année Isabelle prend du retard pour trouver une parade. D'ailleurs, d'habitude, Isabelle "reçoit l'argent de la bourse en mars", soit plus de 6 mois après l'introduction de sa demande. Ce qui n'est déjà pas très pratique pour planifier un budget serré.

Quand je vais sur le site de la Fédération ou que je téléphone, on me dit que ma demande est en cours de traitement, et que je serai contactée s'il manque un élément...

Nous apprenons à Isabelle l'origine du blocage de sa demande

L'autre problème, selon l'attaché de presse de Jean-Claude Marcourt, c'est que le dossier d'Isabelle "est incomplet" car elle "n'a pas intégré les revenus du beau-père". Or depuis les changements imposés par la réforme, l'octroi d'une aide financière dépend désormais de l'ensemble des ressources du ménage au sein duquel vit l'étudiant, et non plus du seul avertissement extrait de rôle (fiche récapitulative des revenus annuels) de la personne dont il est à charge.

Mais surprise: personne n'a dit à Isabelle que son dossier était incomplet. "Quand je vais sur le site de la Fédération ou que je téléphone, on me dit que ma demande est en cours de traitement, et que je serai contactée s'il manque un élément", nous explique-t-elle, très étonnée d'être mise au courant par nos soins de la raison du blocage de son dossier. "C'est vous qui me l'apprenez".

Car "en effet", elle "n'a pas intégré les revenus de son beau-père dans sa déclaration".

La situation se débloque en quelques heures

Suite à notre intervention, la situation d'Isabelle s'est éclaircie comme par magie, en quelques heures, alors qu'elle attend des nouvelles depuis des mois, sans pouvoir en obtenir (le numéro de téléphone diffuse un message automatique en fonction du numéro de la demande encodé).

"Elle était dans les dossiers en traitement", nous a expliqué le porte-parole du Ministre de l'enseignement supérieur. "L'administration va lui envoyer la notification par courrier en lui précisant qu'il manque un élément au dossier - je pense que le courrier a été adressé ce 4 avril", soit la date de notre appel. Coïncidence ?

Son université nie les faits

Tout devrait finalement rentrer dans l'ordre pour Isabelle. Son école, elle aussi, a réagi étonnement rapidement après notre intervention. "Ils m’ont envoyé deux messages en essayant de savoir qui m’avait fait part de ces informations et que c’était un malentendu, pour après me rassurer sur ma situation".

Or, Isabelle est formelle, on a dit à des étudiants qu'ils allaient bientôt devoir payer le minerval. "Je trouve ça un peu fort que (mon université) ne reconnaisse pas que le message qu’ils ont envoyé aux boursiers disait ce que j’ai dit". Mais Isabelle ne veut pas "être dans leur collimateur à trois mois de la fin de ses études", raison pour laquelle nous avons utilisé un prénom d'emprunt et que nous n'avons pas cité son université.

Des renforts à la Fédération

Ce qu'il faut retenir du témoignage d'Isabelle, c'est que la Fédération Wallonie-Bruxelles a encore des efforts à faire dans le suivi des demandes d'allocation de bourse, qui doivent respecter de nouvelles règles mises en place sans doute un peu trop à la hâte, ou du moins sans prendre en compte toutes les conséquences.

"Effectivement, la régularisation (du traitement des demandes) est en cours, le Ministre a renforcé le personnel administratif à hauteur de 7 temps plein en février afin de le résorber", nous a confirmé le porte-parole de Jean-Claude Marcourt. "Le problème étant avant tout dû au passage au numérique qui provoque des bouleversements dans les pratiques et a nécessité des agencements dans les logiciels".

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