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La galère de Christelle, victime de la même discrimination 30 fois de suite: "Au mot CPAS, ils me disent non"

Christelle habite Gosselies. La jeune femme, mère célibataire de 3 enfants qui ont entre 10 et 6 ans, est atterrée. Alors qu’elle recherchait un logement disposant de 3 chambres pour eux quatre, elle n’a jamais pu en visiter un seul! Au mot CPAS, les propriétaires raccrochaient. Elle parle de discrimination. Une discrimination non pas raciale, mais bien sociale, en augmentation selon le syndicat des locataires.

"Je suis au CPAS, je bénéficie du revenu d’intégration sociale et j’ai 3 enfants. Mais tous les propriétaires refusent de me louer une maison car je bénéficie du CPAS ! Je trouve cela injuste, c’est de la discrimination", nous a écrit Christelle via notre page Alertez-nous.

 

Un 1er enfant très jeune, pas de travail car manque de qualification, ...

La jeune femme élève ses enfants. C’est devenu son travail par la force des choses. Tombée enceinte à 18 ans, elle a bien essayé de trouver un emploi. Mais sans qualification, c’est le chômage qui lui a d'abord permis de vivre. Puis, alors qu’elle était enceinte de son 2ème enfant et en était à 8 mois de grossesse, elle s'est vue retirer ses allocations. Elle n’avait pas suffisamment cherché du travail aux yeux de l’Onem... pendant sa grossesse! Voilà comment Christelle s'est finalement retrouvée au CPAS. Durant quelques années, elle a loué une petite maison de deux chambres à Gosselies pour 475€ par mois. Mais sa petite dernière ne pouvant bientôt plus dormir avec ses frères au regard de la loi, elle a décidé il y a peu de ne pas renouveler son bail et de chercher un logement plus grand.

"Quand ils entendent que je suis au CPAS, ils refusent de me faire visiter"

Après avoir signifié à son bailleur qu'elle quitterait le logement à la fin de son bail, Christelle a "commencé à chercher des maisons avec 3 chambres". "Au téléphone, j’explique aux propriétaires que j’ai 3 enfants, que j’ai l’argent pour la garantie locative… et que je suis au CPAS. Là, leur ton change. Ils me disent systématiquement "non". Qu’ils recherchent quelqu’un qui travaille parce que c’est plus sûr, qu’il serait solvable. En 3 mois, ça m’est arrivé une trentaine de fois! Alors que je touche 1089€ et que je peux demander au CPAS de payer le loyer eux-mêmes et de ne me verser que le solde restant. C’est quand même une sécurité", s'étonnait-elle. 

La discrimination sociale est apparue il y a environ 5 ans

Dépitée, elle s'est finalement fait une raison. "J’ai abandonné les recherches. Comme j’ai dû finalement trouver un logement en urgence, j’ai signé un bail d’un an dans un appartement avec seulement 2 chambres et je dors dans le salon sur un clic clac". Mais la jeune maman est révoltée: "C’est discriminatoire." Pour José Garcia, le secrétaire général du syndicat des locataires de Belgique, c’est en effet bel et bien de la discrimination, au même titre que celle envers les personnes aux noms à consonance étrangère ou aux couples homosexuels. "Hélas, nous constatons ce type d’attitude, la discrimination par rapport à une situation sociale, depuis bien 5 ans", explique-t-il.

Seule solution: piéger les mauvais bailleurs puis les attaquer en justice

Le problème, c’est que "la seule jurisprudence qui existe, c’est en matière d’homosexualité, où une agence immobilière et un bailleur ont déjà été condamnés." Pour le reste, encore faut-il que les victimes comme Christelle "piègent" les mauvais bailleurs imprudents ; ceux qui déclarent ouvertement qu'ils refusent un locataire à cause de sa situation au CPAS. Pour cela, il faut impliquer un témoin ou enregistrer la conversation téléphonique, pour pouvoir ensuite prouver la discrimination en justice. Les mauvais bailleurs "intelligents", eux, ne donnent jamais clairement la raison de leur refus. Ensuite, il faut porter plainte et surtout se constituer partie civile et prendre un avocat pour poursuivre les bailleurs, ce qui engendre des frais qu'une personne pauvre hésite souvent à avancer.

Stupide: un emploi ça se perd, un revenu d'intégration sociale pas

Cette attitude de certains propriétaires, M. Garcia a d'autant plus de mal à la comprendre qu'elle est stupide. Ceux qui pratiquent cette discrimination par rapport aux personnes qui émargent au CPAS sont en effet bien mal informés. "Toutes les statistiques démontrent que ce sont les pauvres qui paient le plus régulièrement leur loyer. De plus, quelqu’un qui a un travail peut le perdre, alors qu’un revenu d’intégration sociale, ça ne se perd pas, à moins d’avoir fraudé", ce qui est beaucoup plus rare qu’une perte d’emploi.

 

38.000 ménages en attente d'un logement social rien qu'en Wallonie

Finalement, Christelle a rendez-vous dans quelques semaines avec son CPAS pour faire une demande de logement social auprès de la Sambrienne. Elle n’espère cependant rien: puisqu’elle a déjà un logement, elle ne fera pas partie des urgences et sera placée sur liste d’attente. Selon les derniers chiffres de 2013, la Wallonie compte 101.049 logements publics, pour quelque 38.000 ménages en attente. La valse des coups de téléphone aux propriétaires réfractaires devra donc certainement recommencer un jour…

 

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