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En voulant programmer son mariage à Bastogne, Prescillia apprend que tous les documents officiels de sa famille sont incorrects: "C'est incompréhensible"

En voulant fixer une date pour son mariage, une jeune femme de 20 ans apprend que sa famille doit d'abord renouveler tous ses documents officiels. Le souci ? Un problème avec l’orthographe du nom de famille de son père. Pourquoi survient-il soudainement ? Et comment l’expliquer ?

"Ma fille vient d’apprendre que tous nos documents officiels ne sont pas corrects ! Du coup, son mariage est annulé tant que nous ne les renouvelons pas… à nos frais", s’insurge début mars Isabelle, une habitante de Bastogne, en province de Luxembourg. Animée par un mélange de crainte et d’incompréhension, cette mère de quatre enfants a décidé de témoigner via notre bouton orange Alertez-nous.

"Visiblement l’orthographe du nom de famille de mon mari comprend soudainement une erreur", confie-t-elle.

C’est en effet ce que révèle la commune à Prescillia, sa fille âgée de 20 ans, suite à sa demande pour une date de mariage le 28 août. "En préparant les documents nécessaires, le service état civil a remarqué qu’il y avait un problème au niveau de l’orthographe. Pourtant, nous n’avons jamais eu de soucis. On a pris l’avion pour les vacances il y a deux ans, on est passés chez le notaire il y a environ un an. Et personne ne nous a recalés pour ça. C'est incompréhensible", assure Isabelle qui habite à Bastogne avec sa famille depuis 15 ans.

Quel est le problème avec le nom de famille ? 

Quel est exactement le problème ? D'après la commune, une lettre du nom devrait être une majuscule et pas une minuscule. "La jeune femme est née à Liège. Pour le mariage, j’ai donc demandé qu’ils migrent son acte de naissance. Chez nous, au niveau du registre national, son nom de famille est Van den Abbeel avec un "d" minuscule alors que sur son acte de naissance j’ai constaté que c’est un "D" majuscule", explique Katty Calay, responsable du service état civil de Bastogne.

Cette différence pose problème car aujourd’hui les communes et les consulats belges travaillent avec la BAEC, la banque des actes d’état civil. Les fonctionnaires signent électroniquement les actes et les enregistrent dans ce registre central digitalisé.

"Cette numérisation met un terme à l’archivage physique de millions d’actes dans les maisons communales, les tribunaux et les consulats. Les anciens actes papier migrent systématiquement des 589 registres communaux et des 102 registres consulaires vers la nouvelle banque de données. Le nombre total d'actes établis depuis 1945 est estimé à 15 à 20 millions", explique le porte-parole du SPF (Service Public Fédéral) Justice.

La nouvelle banque d'actes digitalisée coince en cas d’erreur

Dans la BAEC, chaque citoyen est identifié par un ensemble de données personnelles. Si une commune y intègre, par exemple, un acte de naissance, un contrôle s’opère automatiquement via le numéro de registre national. "S’il y a une différence entre les données personnelles déjà connues dans la BAEC et les données de l'ancien acte papier à migrer, la banque de données centrale affiche un message d'erreur. Une faute d’orthographe ou de frappe dans les noms, prénoms et adresses est considérée comme une erreur matérielle", indique le SPF Justice.

En résumé, la BAEC permet de vérifier les orthographes et de constater des erreurs ou des anomalies. "Un accent ou un trait d’union qui manque. Cela ne passe pas. Tout est bloqué car les données doivent correspondre avec ce nouveau système", confirme Katty Calay.

D’après la responsable du service de l’état civil, elle constate beaucoup d’erreurs avec les accents dans sa commune. "Comme le nom de famille Léonard. A une époque, à Bastogne, on notait tout en majuscules. On ne détaillait pas s’il y avait un accent ou pas, alors qu’au registre national l’accent apparaît. Du coup, quand on a une naissance ou un mariage, cela peut bloquer car cela ne correspond pas", détaille Katty Calay.

"Il faut vérifier quelle est la bonne orthographe"

Que faut-il faire face à un tel blocage ? "Il faut vérifier quelle est la bonne orthographe. On se base en général sur les deux générations antérieures. On consulte les actes de naissance des parents et des grands-parents", explique l’employée communale.

Dans le cas de Prescillia, elle s’est fiée au jugement antérieur d’un tribunal. "Il s’est avéré que le nom du grand-père, né à Sainte-Ode, avait été encodé avec un petit "d" et il y a eu un jugement rectificatif par le tribunal qui dit que la véritable orthographe c’est avec un "D" majuscule. On avait bien la preuve que cela doit être un "D" majuscule pour tout le monde. C’est la raison pour laquelle toute la famille doit changer ses documents", explique Katty Calay.

D’après elle, c’est la commune où la famille était domiciliée précédemment qui a encodé une erreur en notant un "d" minuscule. "Prescillia est née en 2001 et la famille est arrivée à Bastogne en 2006. Mais, à leur arrivée dans la commune, nous ne l’avons pas décelée puisque nous nous fions à ce qu’il est mentionné dans le registre national. C’est ça le problème", souligne la responsable. "Mais quand il y a un mariage ou une naissance, on s’en rend compte puisque le système bloque. L’erreur est évidemment humaine", ajoute-t-elle.

L'avantage de la BAEC: tous les actes disponibles dans sa commune 

La BAEC permet ainsi d’éviter ce genre de problème à l’avenir puisque toutes les données digitalisées sont uniformisées. Cette banque d’actes digitale présente également un autre avantage pour les citoyens. "Auparavant, si quelqu’un avait besoin d’un acte de naissance par exemple, il devait obligatoirement solliciter le service de l’état civil de sa commune de naissance. Aujourd’hui, grâce à cette super banque digitalisée, un habitant de Bastogne né par exemple à Rocourt peut me le demander, à sa commune de domicile. Via cette base de données, je peux lui fournir son acte de naissance", explique Katty Calay.

Qui doit payer les frais ? 

Par contre, Isabelle déplore que le changement de tous les documents soit à sa charge. "On doit renouveler les cartes d’identité de tout le monde, mon mari et nos quatre enfants. On a reçu les convocations. Il faut aussi changer le permis de conduire de mon mari, notre acte de mariage, etc. Cela représente quand même un coût que nous devons payer", déplore la mère de famille. "En fait, la commune de Bastogne estime que ce n’est pas elle qui a commis l’erreur et rejette la faute sur une autre commune. Bref, ils se renvoient la balle", souffle-t-elle.

La responsable du service de l’état civil dit "comprendre" la frustration de la famille. "Il faudrait voir avec le service population qui est chargé du paiement des documents ou le bourgmestre", conseille-t-elle. "Si l’erreur vient de la commune de Bastogne, en général le service population fait une demande au collège et les documents sont délivrés gratuitement. Dans ce cas-ci, ce n’est pas le cas. C’est nous qui nous rendons compte de l’erreur", précise la fonctionnaire.

Il y a quelques jours, Prescillia reçoit une bonne nouvelle à ce sujet. "Ma fille m’a laissé un message ce matin pour me dire que le bourgmestre nous fait toutes les cartes et les papiers au frais de la commune", se réjouit sa maman. Et Benoit Lutgen l'assure, la célébration de son mariage aura bien lieu. "Il n'a jamais été question de le suspendre ou de l'annuler", soutient le bourgmestre. 

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