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Le parcours du combattant d'une maman solo avec un enfant de 12 ans atteint d'un cancer rare: le lymphome de Burkitt

Coup de tonnerre dans la vie de Mélanie lorsqu'elle apprend, l'été dernier, que son enfant a un cancer grave et qu'il faut commencer la chimiothérapie au plus vite. Cette maman solo de 3 enfants s'est retrouvée sans salaire et a dû mettre en place toutes une série de ressources pour surmonter cette épreuve, pour que la vie de toute la famille continue.

En août dernier, alors qu'il s'apprête à faire sa rentrée en 1e année secondaire, Valentin, 12 ans, reçoit une terrible nouvelle : il est atteint d'un lymphome de Burkitt. Un coup de massue pour l'enfant, mais également pour sa maman, Mélanie, 38 ans, qui vit à Aiseau-Presles avec ses enfants de 15, 12 et 11 ans.

"Ma fille est une maman isolée avec 3 enfants, nous a interpellé Pascale, la mère de Mélanie via le bouton orange Alertez-nous. La maladie de Valentin nécessite une présence à ses côtés 24 heures sur 24. Moralement et physiquement, c'est très dur".

Lorsque le cancer du système lymphatique de Valentin est diagnostiqué, la maladie se trouve déjà à un stade avancé et la tumeur qu'on découvre dans l'abdomen est grosse de 12 centimètres de diamètre. Comme on n'opère pas ce type de cancer, il faut commencer la chimiothérapie au plus vite.


"La tumeur a grossi en très peu de temps"

Tout commence au mois d'avril, mais rien ne laisse alors supposer qu'une maladie aussi grave se cache derrière ces premiers symptômes. "Il avait des douleurs dans le ventre, des vomissements, ne savait plus s'alimenter correctement, se souvient Mélanie. Nous sommes allés dans 3 hôpitaux différents où on a fait une série de tests pour éliminer toutes les maladies classiques : appendicite, pierres aux reins, etc."

Les différents examens ne révèlent rien alors que Valentin n'est "pas bien du tout" au moment de passer son CEB, en juin dernier. Après une accalmie de quelques semaines au début des vacances d'été - Valentin peut même participer au camp scout - tout se précipite. Alors qu'il doit partir en vacances avec son papa, il a de nouvelles crises de douleurs abdominales et vomit du sang. Les parents de Valentin, divorcés mais unis face à l'état de santé inquiétant de leur enfant, décident d'un commun accord de retourner à l'hôpital le plus proche : Notre-Dame de Charleroi. C'est là qu'une tumeur de 12 centimètres est découverte.

"C'est un cancer foudroyant, nous explique la maman, et la tumeur a grossi en très peu de temps. Mais on ne pouvait pas soigner Valentin à Charleroi alors on nous a aiguillés vers l'hôpital Saint-Luc à Bruxelles, et le professeur Brichard, spécialisé dans les lymphomes".


"Personne n'est préparé"

Pour les parents de Valentin, l'annonce de la maladie est un choc énorme. "Personne n’est préparé à vivre une situation comme celle-ci. On vous explique la maladie, le protocole, les traitements, les effets secondaires… mais les seuls mots qui restent gravés dans la mémoire c’est tumeur, cancer, et chimiothérapie", raconte Mélanie.

Un lymphome est un cancer qui touche les ganglions lymphatiques. Ceux-ci sont répartis dans tout l’organisme ou au niveau du tissu lymphoïde, présent dans de nombreux organes. Ils peuvent donc survenir à plusieurs endroits de l’organisme. "Deux grands types de lymphomes sont distingués chez l’enfant : les lymphomes malins non-Hodgkiniens et le lymphome de Hodgkin. Les lymphomes non-hodgkiniens représentent 10% des cancers de l’enfant. On en distingue 4 types principaux dont le lymphome de Burkitt qui est le plus fréquent des 4", note le professeur Bénédicte Brichard, spécialiste des cancers de l'enfant. 


"Prendre la tumeur très rapidement en charge"

Si le lymphome de Burkitt peut être très agressif au diagnostic et évoluer rapidement, il possède également un très bon pronostic avec plus 90% de survie grâce à un traitement de chimiothérapie associée à une immunothérapie."Il faut prendre la tumeur très rapidement en charge mais elle est très sensible à la chimiothérapie avec un pourcentage de guérison excellent", ajoute la spécialiste.

C'est ce qui se produit pour Valentin : arrivé un jeudi à l'hôpital Saint-Luc avec sa tumeur de 12 centimètres de diamètre, sa chimiothérapie est lancée dès le vendredi soir, soit très peu de temps après le diagnostic.

"Les lymphomes de Burkitt sont abdominaux dans 40% des cas. Les signes évocateurs seront alors des douleurs abdominales intenses, une occlusion intestinale, ou un ventre chirurgical. Il faut agir vite. Et seule une polychimiothérapie associée à une immunothérapie va faire disparaître la maladie. Les lymphomes de Burkitt ne nécessitent pas de traitement complémentaire sous forme de radiothérapie ou de chirurgie", explique le professeur Brichard.

Dans le cas de Valentin, il y avait effectivement urgence à commencer le traitement car la tumeur comprimait les uretères (conduits situés entre les reins et la vessie), ce qui augmentait le risque d'obstruction rénale.

Si la prise en charge est rapide, le diagnostic peut parfois prendre davantage de temps. "C'est la problématique d'une tumeur abdominale, confirme Bénédicte Brichard. On ne pense pas en premier lieu à un cancer ou un lymphome. Donc, il y a parfois des errements avant de mettre le doigt sur la maladie."


Un cancer rare

En Belgique, à peu près 400 cas de cancers chez l'enfant sont diagnostiqués chaque année (environ 1% des cancers touchent les enfants dans notre pays). Sur ces 400 cas, 10% sont des lymphomes non-Hodgkiniens et 60% sont des lymphomes de Burkitt. Ce qui en fait un type de cancer assez rare. Chez l'enfant, la pathologie maligne la plus répandue est la leucémie, viennent ensuite le cancer du système nerveux central, puis le lymphome.

Dès le mois d'août, la chimiothérapie et l'immunothérapie commencent pour Valentin, qui ne quitte pas l'hôpital pendant son traitement. Commencent alors plusieurs semaines de lutte contre la maladie.

"Valentin avait des chimios par injection pendant une semaine, puis cela s'arrêtait avec isolement en chambre stérile, puis ça reprenait", se souvient sa maman.


Les effets secondaires de la chimiothérapie

Mélanie est aux côtés de son fils pour le soutenir et le réconforter durant cette période particulièrement difficile où les effets secondaires sont nombreux. "Il n'avait plus de défenses immunitaires, il vomissait beaucoup et il était très fatigué, raconte-t-elle. Il avait également des douleurs diverses et mucites (aphtes liés à la chimiothérapie, NDLR) dans la gorge, donc ne savait plus parler ni manger".

D'août à octobre, Valentin ne quitte pas l'hôpital et se bat contre son cancer. Malgré l'éloignement de la maison et les effets secondaires, Valentin se montre très courageux. "Il a géré ça comme un chef, comme un guerrier, il a toujours gardé le sourire et est resté positif", raconte sa maman.

Si la maladie est terriblement éprouvante pour l'enfant qui la combat, les proches sont également en souffrance, avec de nombreuses craintes et interrogations. "La peur de savoir si le traitement sera efficace ou non, la peur de perdre son enfant, la peur de la durée du traitement et de ses effets, la peur du regard des gens, mais aussi la peur de ne pas savoir soulager son enfant lors des moments difficiles", décrit la maman de Valentin.

La réponse négative de la mutuelle, ça m'a mise à terre

La maman solo forcée de s'arrêter de travailler

Au-delà de la maladie et de l'impact émotionnel généré par le cancer de son enfant, Mélanie doit, dès le mois d'août, s'organiser pour être auprès de son fils et continuer à s'occuper de ses deux autres enfants. Elle peut compter sur son ex-mari et sa famille mais impossible pour elle de continuer à travailler durant l'hospitalisation et les séances de chimiothérapie de Valentin.

"Je suis aide-médicale en contrat à durée déterminée depuis novembre 2017. En août, lorsque j'apprends le cancer de Valentin, je m'arrête de travailler car il fallait rester avec lui", explique la maman.

Son employeur se montre très compréhensif, nous dit-elle. Et dans un premier temps, elle se tourne vers sa mutuelle pour obtenir des indemnités. Elle reçoit d'abord un courrier lui disant que son incapacité de travail est reconnue. Puis début octobre, elle reçoit une lettre disant qu'elle n'aurait finalement pas droit à ces indemnités car elle travaille depuis moins d'un an. "La réponse négative de la mutuelle, ça m'a mise à terre", explique-t-elle.


La "peur de ne pas savoir assumer les factures"

C'est alors vers le CPAS que Mélanie va se tourner pour faire face à cette situation délicate : sans revenus et avec 3 enfants à la maison, impossible de faire face aux dépenses.

"Il y a les frais de déplacement de Charleroi à Saint-Luc, les frais pour boire et manger lors des 4 mois d’hospitalisation, les médicaments car certains ne sont pas remboursés, les achats spéciaux pour Valentin, etc. J'avais très peur de ne pas savoir assumer le loyer, les factures etc. Le stress était vraiment intense", raconte la maman.

Dans une situation similaire à celle de Mélanie, tout citoyen a la possibilité de s'adresser au CPAS (centre public d'action sociale) de sa commune lors de permanences durant lesquelles un assistant social commence par écouter ce qui mène la personne à effectuer cette démarche.

"Il faut que la personne nous prouve qu'elle ne sait pas avoir de revenus de la part de quelqu'un d'autre, nous explique Sandrine Leblanc, assistance sociale au CPAS d'Aiseau Presles. Ensuite, on fait passer la demande au conseil de l'action sociale, composé sur président de CPAS et des conseillers. Ils se réunissent les 15 jours et discutent des différents cas".

Chaque "histoire" est présentée au conseil et si la personne rassemble les 6 conditions pour accéder au revenu d'intégration (loi de 2002 concernant le droit à l'intégration sociale), elle aura droit à cette allocation. Elle peut être versée très rapidement si nécessaire.

Parmi ces conditions, on retrouve l'obligation d'être majeur, de vivre sur le territoire belge, etc. Mais bien sûr, les récits de vie de chacun entrent en ligne de compte. "On a une formation sociale donc c'est indéniable que l'humain est pris en compte", note Sandrine Leblanc.

Le revenu d'intégration s'élève à 910 euros pour une personne isolée, 1254 euros pour une personne qui a des enfants et 607 euros pour un cohabitant.


Le congé pour assistance médicale

Dans le cas de Mélanie, une autre option que le CPAS aurait pu être envisagée : le congé pour assistance médicale. "Il existe dans le cas d'un membre de sa famille qui a une maladie grave. Pas besoin d'ancienneté ni de CDI au sein de l'entreprise pour en bénéficier", nous explique Daniel Bouleau, porte-parole de l'ONEM pour les interruptions de carrière.

Ce congé est octroyé pour une durée minimum d'un mois et de maximum 3 mois "pour autant que le médecin atteste que l'état de santé de l'enfant nécessite la présence d'un parent à ses côtés. C'est le médecin traitant qui apprécie si la présence est nécessaire aux côtés de la personne", ajoute Daniel Bouleau.

Une allocation est alors versée comme revenu de remplacement. Le forfait mensuel est de 750,33 euros, majoré à 1035 euros pour une personne seule avec enfant(s) à charge.

Dans le cas de Mélanie, elle aurait pu bénéficier de ce congé, mais comme ses enfants sont à la charge de son ex-mari, elle n'aurait touché que 750 euros. "Mais dans ce cas, on aurait pu intervenir et payer la différence", note Sandrine Leblanc, du CPAS d'Aiseau Presles.


Le crédit-temps avec motif

L'ONEM propose aux travailleurs du secteur privé une autre possibilité pour être présent auprès d'un enfant malade durant une plus longue période : le crédit-temps avec motif. Mélanie ne rentrait pas dans les conditions pour cette option mais il est utile de savoir que le congé pour assistance médicale et le crédit-temps avec motif sont deux systèmes d'interruption de carrière qui permettent à l'employé de suspendre ses prestations (ou de les réduire) pour rester auprès d'un proche malade.

Dans le cas du crédit-temps avec motif, "il nécessite d'être sous contrat de travail depuis au moins 2 ans : les conditions d'accès sont plus strictes", note Daniel Bouleau. Mélanie était sous contrat chez son employeur depuis novembre 2017 et ne rentrait donc pas dans les conditions de base pour l'octroi du crédit-temps, aussi appelé "pause-carrière".


"Il a vaincu son cancer"

Mais la situation de Mélanie s'arrange. Grâce à l'aide du CPAS et de ses proches, elle a pu garder la tête hors de l'eau du mois d'août jusqu'à aujourd'hui. Elle reprendra le travail en janvier, au moment où son fils retournera à l'école.

Depuis que Valentin a terminé sa chimiothérapie, il se repose à la maison mais suit les cours à distance grâce à l'asbl Take Off qui s'est occupée d'installer des webcams à la maison et dans sa classe.

Sa maman est très fière du caractère de battant de son fils face à ce qu'il a vécu ces derniers mois. "Il est en rémission, il a vaincu son cancer à une vitesse extraordinaire. Il a géré ça comme un chef, comme un guerrier, il a toujours gardé le sourire et est resté positif", se réjouit-elle.

La maman solo a également pu bénéficier d'un grand soutien auprès de l'équipe médicale de l'hôpital. "L’équipe de St Luc est vraiment au top, aussi bien le personnel soignant, médecins, que la psychologue qui a été très présente et réconfortante pour moi", souligne enfin Mélanie.  

Aujourd'hui en meilleure forme, Valentin caresse un doux rêve : celui d'un voyage au Japon. 

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