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Coronavirus en Belgique: Marc, 20 ans, ambulancier bénévole veut montrer la réalité du Covid aux jeunes

A travers son expérience d'ambulancier bénévole, un étudiant en médecine témoigne de la gravité de la crise sanitaire. Il adresse une lettre à l'intention des jeunes.

Marc (prénom d'emprunt car il souhaite garder l'anonymat), étudiant en première année de médecine, travaille bénévolement en tant que secouriste ambulancier au 112. Un pied dans la vie active, un autre à l'université, il souhaite sensibiliser à la gravité de la crise sanitaire. Son message s'adresse plus particulièrement aux jeunes étudiants. Ceux qui font "la fête dans leur kot, se sentant invincibles et se justifiant par ‘il ne peut rien nous arriver’. Ce sont les mêmes jeunes qu’on voit rentrer chez eux le vendredi soir pour y passer le week-end malheureusement… Je ne cherche pas les blâmer, n'ayant que 20 ans et étant aussi encore aux études, je fais partie de ces jeunes, il y a encore quelques semaines je faisais moi-même la fête dans ces kot, avec la même pensée", écrit-il via le bouton orange Alertez-nous.

"Ce n’est pas avec les critiques classiques que l’on pouvait lire un peu partout que j’ai changé mon fusil d’épaule. Non. Ce n’est qu’une fois confronté à la réalité du terrain que j’ai compris, que j’ai pris conscience", précise-t-il.

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Un jeune passionné et impatient de se confronter à la réalité du terrain

Marc a toujours voulu faire des études de médecine, tout comme son frère. "Une vocation qu'on a reçue d'on ne sait pas trop où", dit-il, leurs parents n'étant pas dans la profession. Un épisode marquant de son adolescence l'a poussé à mettre le pied à l'étrier : "En sortant de l'école, il y avait une dame qui s'était pris un coup, qui faisait un malaise à l'arrêt de tram et personne ne réagissait. A part la sœur d'un copain qui venait de suivre une formation à la Croix Rouge", raconte-t-il.

Suite à cela, Marc a fait ses premiers pas dans le secourisme à l'âge de 15 ans en suivant une formation aux premiers secours. Dès ses 18 ans, il a commencé une activité d'ambulancier dans le transport non urgent. "Je n'attendais que ça", confie-t-il. Puis il a suivi une formation de secouriste ambulancier au 112, et débuté cette activité bénévole en janvier 2020. "C'était dans une optique de monter les échelons et d'avoir des choses plus intéressantes à voir médicalement", raconte-t-il.

Aujourd'hui, cette activité de secouriste ambulancier représente pour Marc entre 12 et 16 heures de travail par semaine. En parallèle, le jeune homme poursuit des études de médecine à l'UCLouvain.

Ce n’est qu’une fois confronté à la réalité du terrain que j’ai pris conscience

Après des missions chargées en émotion, le comportement insouciant de ses camarades l'a interpellé

Marc reconnait avoir participé, encore récemment, à des fêtes d'étudiants. Il connait bien la légèreté avec laquelle on peut appréhender la crise du coronavirus à cet âge. "Ce n’est pas avec les critiques classiques que l’on pouvait lire un peu partout que j’ai changé mon fusil d’épaule. Ce n’est qu’une fois confronté à la réalité du terrain que j’ai compris, que j’ai pris conscience", confie-t-il.

Lorsqu'il rentre "épuisé, mentalement et physiquement" de son travail bénévole d'ambulancier, Marc constate sur les réseaux sociaux, via les publications de ses amis, que ces derniers ne se privent pas de réunions, de fêtes. Des comportements qu'il comprend, mais déplore. Il veut donc faire profiter ses camarades de son expérience dans l'espoir de, peut-être, leur ouvrir les yeux.

"Une scène surréaliste, digne d’un film de science-fiction"

En tant qu'ambulancier, Marc est amené à secourir des patients touchés par le Covid-19 dans des états graves, "avec des grandes difficultés respiratoires, une saturation en oxygène qui est très basse", explique-t-il. Des interventions parfois poignantes et éreintantes, que Marc nous a décrites dans un texte, une lettre à l'intention des jeunes : 

"On arrive chez les gens, dans leur intimité, habillé comme des astronautes : une combinaison intégrale, un masque et une visière qui prennent tout notre visage. Ils voient à peine nos yeux et on leur arrache un père, une mère qu’ils ne reverront probablement plus car les accompagnants en ambulance et les visites aux urgences sont très limitées.

On assiste à des adieux de 30 secondes, avec des bisous timides parce qu’après tout la maladie est là. Les larmes ne sont pas timides elles, à part les nôtres, cachées derrière notre costume. C’est la buée sur les visières qui nous trahit parfois mais on doit garder la face, on ne peut pas craquer devant une famille déjà à bout, même si nous le sommes aussi.

Quand le patient est sorti de chez lui, c’est dans la rue que les gens assistent à une scène surréaliste, digne d’un film de science-fiction : 2 hommes, tout de blanc vêtus, avec des visières et des masques, en train d’emmener un patient critique, souvent relié à l’oxygène, parfois même intubé, à l’arrière de leur camionnette. Des gens fuient, pleurent avec nous ou nous applaudissent…

Quand c’est fini : patient déposé, ambulance et ambulanciers décontaminés, pas le temps de s’en remettre (...) C’est un cycle sans fin, qu’on continue machinalement pendant tout le shift."

+40% d'interventions pendant cette période de crise sanitaire

À Bruxelles, les appels au 112 sont pris en charge pour la grande majorité par le SIAMU (Service d'incendie et d'aide médicale urgente de la Région de Bruxelles-Capitale), puis par la Croix-Rouge et les pompiers. 

Actuellement, environ 300 missions sont effectuées à Bruxelles quotidiennement par les ambulanciers, dont 80 pour des patients atteints par le Covid-19, indique Jean-François Calloud, chef des services secours et ambulances de la Croix-Rouge de Bruxelles. En temps normal, de 200 à 250 missions sont effectuées par jour, précise-t-il. 33 ambulances opèrent dans la capitale. "On vient d'en rajouter 3", dit Jean-François Calloud, qui se veut rassurant sur la charge de travail actuel des ambulanciers.

Des interventions plus longues pour les patients Covid-19

Jean-François Calloud admet quelques récents moments de tension, lorsqu'il ne restait plus qu'une ou deux ambulances disponibles. Car les patients touchés par le Covid posent un problème de délais, explique-t-il, puisqu'il s'agit d'interventions qui durent plus longtemps : "Le temps de s'habiller avec l'équipement de protection, le temps une fois qu'on a déposé le patient à l'hôpital d'aller à la désinfection. Et le temps de la désinfection en elle-même".

Après le transport des patients à l'hôpital, la désinfection des véhicules a lieu à la caserne centrale de l'Héliport, ce qui implique parfois des trajets de 30 minutes pour les ambulances. "On ne peut pas rouler en urgence à partir du moment où vous n'avez pas de patient dans l'ambulance qui nécessite une urgence", explique Jean-François Calloud. Une deuxième ligne de désinfection est opérationnelle à la caserne d'Anderlecht depuis ce mardi.

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