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Rose oublie de renouveler sa carte de stationnement riverain à Uccle: "La scan car est passée tous les jours, je dois payer 175€ de redevances"

C’est un outil intraitable. Comme de nombreuses autres communes de la capitale, Uccle utilise depuis cet été un véhicule scanner pour contrôler le stationnement. Une riveraine déplore ce nouveau système digitalisé. Ayant oublié de renouveler sa carte de riverain, Rose découvre via un courrier qu’elle doit payer 175 euros pour plusieurs redevances. Peut-elle demander à la commune de les annuler ?

"Je trouve cela scandaleux. Au total, je dois m’acquitter de la somme de 175 euros uniquement pour un oubli d’une date dans mon agenda", déplore une habitante d’Uccle, en région bruxelloise. Son méfait ? Ne pas avoir reconduit à temps sa carte de riverain, lui permettant de stationner sa voiture dans un rayon géographique bien précis.

Cette riveraine de la commune depuis quatre ans nous a contacté via le bouton orange Alertez-nous pour témoigner de son expérience personnelle, et surtout mettre en cause le nouveau système de contrôle mis en place à Uccle. Afin de respecter sa demande d’anonymat, nous l’appellerons Rose.

Un système redoutable utilisé dans 10 communes bruxelloises

Depuis le début de l’été, cette commune du sud de la capitale utilise un véhicule scanner ou "scan car" pour contrôler les différentes zones de stationnement. Ce n’est pas une nouveauté à Bruxelles. Actuellement, 10 communes sur 19 utilisent ce système redoutable. Doté de huit caméras sur le toit, ces véhicules sillonnent les rues pour vérifier le stationnement. Il s’agit d’une technologie de pointe qui permet une géolocalisation très précise des véhicules. Le but est évidemment de repérer des incivilités ou des infractions au code de la route. Cet outil est donc beaucoup plus élaboré que l’ancien système avec des pièces ou une carte de paiement à insérer dans un horodateur et le contrôle par des agents.

La scan car peut notamment identifier les actions en cours à un horodateur et reconnaître les immatriculations bénéficiant d’une carte de dérogation grâce à une connexion simultanée. "Quand une personne introduit son numéro de plaque, cela est instantanément transmis au véhicule scanner. Il y a une transmission instantanée entre l’horodateur, le véhicule scanner et le smartphone si on utilise une application pour payer son stationnement", explique Pierre Vassart, porte-parole de parking.brussels, l’agence régionale bruxelloise du stationnement.

Fini les redevances glissées sous l’essuie-glace

La procédure de verbalisation est ainsi digitalisée. Fini les redevances en papier laissées sur le pare-brise du véhicule. Vous recevez un courrier à domicile avec le montant de l’amende à payer.

Cet outil n’est donc pas encore utilisé partout. Parking.brussels gère le stationnement de 10 communes de la capitale. Pour l’instant, des véhicules scanners sont utilisés dans 8 d’entre elles. "Pourquoi pas toutes ? Parce que le parc d’horodateurs doit être adapté puisque le numéro de plaque d’immatriculation doit être introduit. Et comme on reprend la gestion des communes quand le contrat qu’elles possèdent avec des gestionnaires privés arrive à échéance, il faut que les horodateurs soient amortis avant d’être remplacés. C’est le cas notamment à Forest", explique le porte-parole.

Deux autres communes, qui n’ont pas encore fait le choix de transférer cette compétence à parking.brussels, utilisent également les scan cars: Bruxelles-Ville et récemment Uccle. "Notre politique en matière de stationnement suit deux objectifs: garantir une rotation dans les quartiers commerçants pour assurer des places de parking et de protéger le stationnement des riverains en évitant les voitures ventouses, qui restent stationnées trop longtemps au même endroit. Et ce nouveau système permet un contrôle plus fin et plus efficace"souligne Thibaud Wyngaard, échevin de la mobilité et du parking à Uccle.

Un véhicule scanner contrôle en moyenne 1200 véhicules par heure, c’est spectaculaire

Ce système permet en tout cas d’augmenter le nombre de contrôles. Une hausse vertigineuse. "C’est spectaculaire. Un véhicule scanner contrôle en moyenne 1200 véhicules par heure. A titre de comparaison, un steward en contrôle 450 par jour. La différence est énorme", révèle Pierre Vassart.

En tant que riveraine, Rose est loin d’être ravie de l’utilisation de ce nouvel outil intraitable et des nouvelles procédures de verbalisation mises en place dans sa commune.

Depuis un certain temps, les cartes de dérogation, dont la carte de stationnement riverain, sont digitalisées. "La seule preuve en notre possession est la validation que nous recevons lors du paiement qui se présente sous forme de PDF et qui mentionne les dates de validité. La carte riverain est valable un an ou deux ans, selon le choix du riverain", explique Rose.

"J’ai oublié de mettre un rappel dans mon agenda"

L’été dernier, la jeune femme opte et paie 10 euros pour une durée d’un an. Depuis le 5 août, date d’expiration, elle est donc en défaut de carte. Mais Rose ne s’en rend pas compte. "J’ai oublié de mettre un rappel dans mon agenda. Je suis en tort sur ce point", admet-elle.

Le 20 août, la Bruxelloise reçoit un courrier lui notifiant deux contraventions. "On m’avertit alors que je ne suis plus en règle et que je dois payer pour deux dates, le 6 et le 8 août. Chaque contravention vaut 25 euros", indique Rose. "Il est inscrit que nous avons 10 jours pour contester. Or, la date d’impression des deux contraventions chez la commune est le 9 août. Nous sommes le 20 août lorsque je reçois les documents dans ma boite aux lettres, donc bien trop tard pour pouvoir contester", s’insurge la riveraine.

"La scan car est passée me verbaliser quasiment tous les jours"

Prenant conscience ce jour-là de sa situation, elle appelle la commune et découvre que 6 autres redevances sont sur le point d’arriver à son domicile. "La scan car est passée me verbaliser quasiment tous les jours entre le 6 août et le 17 août.  Et je suis informée que des deux premières le 20 août", déplore-t-elle.

Rose décide de payer les deux premières redevances, en reconnaissant son erreur. "Cela me semble juste. 50 euros pour une carte qui en vaut 10 euros. 50 euros pour un oubli causant un défaut de règle, ok. Je conteste par contre les 6 autres amendes à venir, en argumentant que je reconnais mon erreur, que je suis de bonne foi en réglant les deux premières, que je réagis dès que je suis informée. Mais qu'au vu de la situation, tout est digital, plus de ticket sur le pare-brise, période de vacances aussi qui retarde probablement la poste, etc., les dernières amendes sont extrêmes", estime la riveraine.

Selon elle, la commune refuse d’annuler les autres redevances, à l’exception de la dernière datant du 17 août. "Je trouve cela scandaleux. Au total, je dois payer 175 euros", s’énerve Rose.

Ce nouveau procédé communal ne semble bénéficier qu'à la caisse communale

La Bruxelloise estime que ce montant est disproportionné vis-à-vis du "danger" qu’elle représente avec son défaut de carte. "Je ne gêne personne. Et de toute façon, en ordre de carte riverain, ma voiture serait restée à sa place. Cela n'aurait rien changer pour l'objectif de rotation des véhicules. Ce nouveau procédé communal ne permet pas au citoyen de réagir rapidement. Au contraire, il ne semble bénéficier qu'à la caisse communale." La scan car serait-elle une sorte de voiture à cash ?

L’échevin de la mobilité et du parking le conteste fermement. "Notre vocation n’est pas de renflouer les caisses communales au gré des redevances infligées aux riverains et de les ennuyer", réagit Thibaud Wyngaard.

Tout d’abord, il relativise le délai de réaction de 10 jours. "Concernant le délai d’envoi des redevances, c’est en grande partie indépendant de notre volonté puisque cela dépend essentiellement du service de la poste. Et de toute façon ce délai de contestation est théorique. Dans la pratique, nous pouvons faire preuve de souplesse et un rappel est toujours envoyé. Après 10 jours, il n’y a donc pas un couperet qui tombe et un huissier qui est mandaté. Il n’y a pas de conséquences irréversibles", assure l’échevin.

Renouveler sa carte, une responsabilité du citoyen

Selon lui, Rose n’est pas la seule à oublier de renouveler sa carte de stationnement. La commune est confrontée de temps à temps à ce genre de problèmes. La règle est claire en la matière. "Quand un citoyen sollicite une carte de riverain valide pour un an ou deux ans, selon son choix, au terme de cette période, c’est au citoyen d’entreprendre les démarches pour la renouveler", rappelle Thibaud Wyngaard.

"Aucun règlement nous oblige à prévenir de la fin de la validité d’une carte de riverain. C’est la responsabilité de l’utilisateur de la renouveler à temps", confirme le porte-parole de parking.brussels. "Ceci dit, nous envoyons quand même un email automatique de courtoisie un mois avant la fin de la validité pour le rappeler", ajoute Pierre Vassart.

"L’email de rappel est arrivé dans mes spams"

L’échevin ucclois assure que la commune prévient aussi virtuellement les habitants: "Nous envoyons toujours un email de rappel aux citoyens un mois avant la date d’expiration". Thibaud Wyngaard admet toutefois être confronté à deux difficultés. "La première, c’est que le citoyen a changé son adresse email communiquée à nos services. Le mail a donc été envoyé, mais il n’a pas été reçu ni vu. L’autre problème est plus rare. Le rappel a bien été envoyé par email mais, pour une raison qui nous échappe, le message se retrouve dans les spams. Des personnes nous contactent alors pour nous dire qu’ils n’ont rien reçu et ils le pensent de bonne foi", explique l’échevin.

Visiblement, c’est le cas de Rose. D’après leur registre, la commune lui a envoyé un email de rappel le 7 juillet. "Mais celui-ci a visiblement directement atterri dans ma boite spam et je ne l’ai pas vu", regrette la Bruxelloise.

Dans ce cas, la commune d’Uccle "va annuler toutes les redevances"

D’après Thibaud Wyngaard, la commune fait toutefois preuve de compréhension si le citoyen réagit dans un laps de temps raisonnable pour régulariser sa situation. Il assure que toutes les redevances sont alors annulées. "Si un riverain de bonne foi se rend compte qu’il n’est pas en règle au moment où il reçoit une redevance, il peut contacter la commune pour contester les redevances infligées entre le moment de la fin de validité et le renouvellement qui se fait rapidement. Nous annulerons alors ces redevances, si la personne a réagi rapidement pour se remettre en ordre. Dans ce cas-ci, cette riveraine a contacté rapidement la commune et donc elle peut nous contacter pour qu’on annule toutes les redevances. Il n’y a pas de débat là-dessus", assure l’échevin.

Mais alors pourquoi seule une redevance a-t-elle été annulée lors de l’appel de Rose à la commune ? "Peut-être que la personne n’était pas au courant de l’ensemble du dossier", réagit l’élu qui précise que les contestations peuvent être envoyées par email au service compétent.

Attention, l’agence régionale parking.brussels ne semble pas aussi tolérante. "Si vous n’avez pas reçu ou pas vu notre email, dans ce cas, vous ne pourrez pas invoquer cette raison-là pour annuler une redevance", indique le porte-parole.

Les scan cars peuvent-elles se tromper ?  

Mais ce système est-il vraiment infaillible ? Les scan cars peuvent-elles se tromper ? Pierre Vassart se montre rassurant: "Un desk force reçoit les images envoyées par les véhicules scanners. Derrière l’écran, ces agents valident chaque image. Si par exemple quelqu’un est à l’arrêt dans son véhicule, il ne sera pas sanctionné. Si une carte PMR est visible derrière le pare-brise, la personne ne recevra pas de redevance".

Le porte-parole admet toutefois encore quelques "couacs" concernant les personnes à mobilité réduite. "Les cartes PMR ne sont pas liées à un véhicule, une immatriculation mais à une personne. C’était donc compliqué de contrôler. Mais on a trouvé une solution en accord avec les associations: on invite les personnes à donner leur immatriculation et, si elles utilisent la voiture de quelqu’un d’autre, elles doivent le signaler par email pour ne pas avoir de souci", explique le porte-parole. Et si un détenteur de ce genre de carte reçoit une amende, il suffit, selon lui, d’envoyer une petite contestation par email pour annuler la redevance.  

Attention aux zones bleues: "Beaucoup de gens ont été surpris"

En tout cas, vu qu’un véhicule scanner peut contrôler plusieurs fois par jour la même rue, soyez vigilants. Les amendes peuvent être salées.  

"Beaucoup de gens ont par exemple été surpris du code de la route dans les zones bleues. Vous avez le droit de garer votre voiture gratuitement pendant 2 heures avec un disque. Mais c’est bien 2 heures maximum. Ce n’est pas légal de revenir pour changer l’heure du disque et prolonger la durée de stationnement. Vous devez déplacer votre véhicule. Le véhicule scanner géolocalise tous les véhicules. Donc, si une voiture n’a pas bougé de place après 2 heures, le propriétaire va recevoir une redevance forfaitaire de 25 euros", prévient Pierre Vassart.

Forte hause du nombre de redevances

Le nombre de redevances a d’ailleurs explosé suite à l’utilisation massive des scan cars. "Il s’élève en 2020 à 1.186.464. Il s’agit d’une forte hausse alors que nous n’avons pas contrôlé pendant le premier confinement. Cette augmentation est due çà l’efficacité des contrôles par les véhicules scanners. Notre chiffre d’affaires a d’ailleurs grimpé de près de 50% entre 2019 et 2020", indique le porte-parole de l’agence régionale.

Une augmentation également constatée pour le moment à Uccle. A noter que ces recettes sont injectées dans le budget des communes, sans obligation de les utiliser pour la mobilité ou les transports.  

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