Accueil Actu Vos témoignages

Yves, diabétique, dénonce la rupture de stock de son médicament: "Des médecins le prescrivent à des gens qui veulent perdre du poids sans effort"

Après l'utilisation des capteurs de glycémie par des personnes non diabétiques, le médicament appelé Ozempic voit sa fonction première détournée. Prescrit pour des personnes en surpoids, le médicament se trouve désormais en rupture de stock. "Ça me met en colère", s'agaçe Yves, diabétique.

"Je suis diabétique de type 2. Mon médecin m’a prescrit un médicament, l'Ozempic, à m’injecter une fois par semaine. Depuis deux mois, il n’y a plus moyen de se procurer ce médicament", dénonce Yves via le bouton orange Alertez-nous. Le Bruxellois assure avoir visité 14 pharmacies de la capitale et à chaque fois, la même rengaine : "On me dit toujours qu'il n'y en a plus en stock". C'est finalement dans une officine à Wavre qu'Yves parvient, enfin, à se procurer une boîte d'Ozempic. 

Comment expliquer une telle rupture de stock ? Selon le Bruxellois, l'explication est claire. "Des médecins prescrivent ça à des jeunes gens qui veulent perdre du poids sans trop d'efforts. Je veux dénoncer cette pratique qui empêche les vrais diabétiques de se soigner", accuse-t-il. 

Ça me met en colère !

Le médicament Ozempic est indiqué chez les adultes pour le traitement du diabète de type 2 insuffisamment contrôlé. Il doit être injecté par voie sous-cutanée dans l’abdomen, la cuisse ou le haut du bras. "Ça me permet de réguler mon taux de sang. Je ne risque pas de problème supplémentaire", confie Yves.

Seulement, depuis quelque temps, l'Ozempic est également prescrit pour des personnes en surpoids. Car ce médicament a la particularité d'agir sur la satiété. Pour Yves, une telle utilisation n'est pas justifiée. "Les gens qui se le font prescrire pour maigrir n'ont pas de problème de taux de sucre. C'est juste pour perdre du poids. Ça me met en colère ! Je n'en trouve plus dans les pharmacies pour un problème réel", accuse Yves. 

Une rupture du stock depuis quelques mois 

En Belgique, on constate effectivement une rupture de stock de l'Ozempic depuis quelques mois. "C'est prescrit par les médecins pour les personnes diabétiques comme traitement de fond. Mais c'est également prescrit aux personnes qui veulent maigrir. C'est un peu une hype (une mode ndlr)", nous éclaire Koen Straetmans, président de l'Association Pharmaceutique Belge (APB). Il est en effet apparu que le médicament est devenu populaire comme aide à l'amincissement et est souvent prescrit hors indication à cette fin. 

Sur les réseaux sociaux, de nombreuses vidéos montrent l'utilisation de l'Ozempic par des personnes en surpoids. Ces dernières partagent leur expérience et montrent la perte de poids qu'elles ont réussi à obtenir. 

Aujourd'hui, la demande est donc plus importante que l'offre. Les lignes de production de l'Ozempic ont été initialement dimensionnées pour traiter les personnes diabétiques. Face à ce constat, l'agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) recommande désormais aux médecins et pharmaciens de réserver le médicament Ozempic en priorité aux personnes souffrant de diabète. "On a demandé que les médecins et pharmaciens préconisent l'Ozempic d'abord aux patients diabétiques", explique le président de l'APB. 

Des patients habitués doivent parfois interrompre leur traitement.

Dans les circonstances actuelles, l'utilisation hors indication d'Ozempic doit donc rester limité selon l'agence fédérale. Ce principe vaut assurément pour son utilisation pour traiter le surpoids chez les personnes dont l'indice de masse corporelle (IMC) est inférieur à 30kg/m² ou inférieur à 27kg/m² avec au moins une comorbidité liée au poids. L'AFMPS est en contact avec l'agence européenne des médicaments (EMA). 

Le problème de disponibilité de l'Ozempic dépasse les frontières de la Belgique. Laurent Crenier, diabétologue et président de l'association de diabète, constate, lui aussi ces soucis d'approvisionnement. "Des patients qui étaient habitués à le trouver en pharmacie sans problème doivent parfois interrompre leur traitement. On est parfois obligé de leur prescrire des traitements alternatifs, mais ce n'est pas une solution viable. Car les autres traitements que l'on prescrit pour le remplacer arrivent aussi en rupture de stocks. Donc il faut vraiment que cette situation se résolve le plus rapidement possible", indique-t-il. 

Faut-il prioriser les patients ?

Selon lui, il serait difficile de prioriser les patients en fonction de leur pathologie. "On peut le faire en urgence, mais on ne peut pas le faire sur le long terme. À partir du moment où un patient a montré des effets bénéfiques sur la santé, je ne vois pas pour quelles raisons on pourrait les empêcher de le prendre", estime Laurent Crenier. Pour le diabétologue, la solution la plus indiquée serait de retarder la prescription de l'Ozempic à des nouveaux patients "en leur expliquant que c'est peut-être une attente de quelques semaines et quelques mois". 

On est en train d'essayer de combler la demande.

La firme est en train d’augmenter sa production. "On est en train d'essayer de combler la demande. On reçoit encore de l'Ozempic au compte-gouttes. On espère que début 2023, la plupart des problèmes soient réglés", précise Koen Straetmans, président de l'Association Pharmaceutique Belge (APB). Actuellement, 282 médicaments sont actuellement déclarés indisponibles en Belgique. 

Une personne diabétique sur 20 en Belgique

Bien qu'il n'y ait pas dans notre pays de registre ou décompte exact des personnes souffrant du diabète, on estime entre 500 000 et 600 000 le nombre de personnes diabétiques en Belgique, soit 1 personne sur 20. Le diabète de type 2, le plus fréquent, touche neuf diabétiques sur dix et 30 % d'entre eux ignorent qu'ils ont développé la maladie. Le diabète de type 2 n'est pourtant pas une fatalité : avoir une alimentation saine, pratiquer une activité physique régulière, garder un poids stable et normal et éviter la consommation de tabac sont autant de moyens de prévenir ou de retarder l'apparition de la maladie.

Il y a quelques mois, un autre dispositif médical réservé aux personnes diabétiques était détourné. Sur les réseaux sociaux, on voyait naître une nouvelle tendance : des influenceurs utilisant des capteurs de glycémie comme des gadgets minceur. 

À la une

Sélectionné pour vous