Accueil Actu

Les hooligans russes sous haute surveillance avant la Coupe du monde 2018: "Rien ne pourra arriver"

Lorsque le tirage au sort a placé la Russie dans le même groupe que l'Angleterre pour l'Euro-2016, Vladimir a compris que c'était une opportunité rare d'en découdre avec les supporters et hooligans anglais. Mais ce ne sera pas la même chose au Mondial-2018 en Russie.

Ce trentenaire moscovite avait pourtant pris ces dernières années ses distances avec le milieu des "hools" russes mais la possibilité d'infliger une cuisante humiliation aux supporters des "Trois Lions" était trop tentante.

"Il y a tout un mythe autour des hooligans anglais. On avait tous compris que le temps était venu de se montrer au grand jour", explique-t-il à l'AFP.

L'éruption de violence le 11 juin à Marseille a fait la Une des journaux et des télévisions du monde entier: des centaines de hooligans russes dévalent les rues du centre-ville de la cité phocéenne, passant à tabac les supporters anglais qu'ils croisent. Les forces de l'ordre, dépassées, parleront d'"actes hyper-violents et hyper-rapides".

Dans les semaines qui ont suivi, les images de supporters anglais K.O et le visage en sang ont soulevé des interrogations sur la capacité de la Russie à organiser un Mondial-2018 totalement sûr pour les amateurs de football.

Dans un premier temps, la diplomatie russe avait critiqué les arrestations "inadmissibles" de hooligans russes, certains députés allant même jusqu'à les encourager à se battre. Puis le gouvernement a rejoint les critiques émises en Europe. Et dans la foulée, les hooligans russes qui pensaient avoir agi en quasi-héros ont compris qu'ils étaient désormais devenus des cibles.

Division E

Menés par la division "E" du ministère de l'Intérieur, qui s'occupe d'habitude des extrémistes et des opposants politiques, les arrestations et inculpations de hooligans se sont multipliées. Et des incidents mineurs lors de matches de championnat ont provoqué une répression des plus féroces, des accusations contestables ont été portées devant la justice qui, à son tour, a fait pleuvoir les assignations à résidence, dénonce Vladimir.

Pour les supporters, le message était clair: ne pensez pas pouvoir répéter lors du Mondial-2018 ce qu'il s'est passé à Marseille. "La police est tellement active que rien ne pourra arriver en Russie. J'en suis sûr à 100%", prédit le jeune homme.

Le mouvement hooligan russe s'est développé dans les années 1990 après la chute de l'Union soviétique, prenant pour modèle la culture de violence des matchs de football en Grande-Bretagne.

Tout a commencé avec des rixes alcoolisées entre "firmes" - le nom désignant un groupe de hooligans - avant de se transformer progressivement en un phénomène plus sérieux qui a vu les hooligans abandonner la boisson pour les salles de sport et les rings de boxe.

Le hooliganisme s'est organisé, tout comme la réponse des autorités: les bagarres planifiées à l'avance ont dû quitter les villes pour les forêts, à l'abri des regards.

La police garde le secret sur la stratégie qu'elle entend utiliser pour maîtriser la violence des hooligans lors de la Coupe du monde en 2018, mais ne cache pas surveiller ce mouvement de près. Les autorités ont ainsi établi une liste noire de hooligans interdits de stade, qui compte désormais 191 noms, et misent sur la carte d'identité du supporter comme mesure de sécurité.

"Je vais le dire sans ambages: les citoyens qui ont violé la loi lors d'événements sportifs, qui ont fait preuve de racisme, allumé des fumigènes, cassé des sièges, tenté de commencer des bagarres, sont sous notre surveillance rapprochée et constante", avertit le commandant Anton Goussev, Monsieur sport au ministère de l'Intérieur.

Le cas Chpryguine

Alexandre Chpryguine est pour sa part formel: les violences de Marseille ne lui ont amené que des ennuis.

Cet ancien hooligan, qui présidait l'association des supporters russes pendant l'Euro-2016, est vite devenu le visage médiatique des affrontements de l'Euro-2016, expulsé à deux reprises de France après avoir ridiculisé les autorités locales.

Mais après ce quart d'heure de gloire, le retour de bâton a été violent. En septembre, les autorités sportives de son pays ont décidé de suspendre officiellement leur coopération avec son organisation. Au même moment, la police l'interpellait devant les caméras de télévision.

"Ce jour d'été ensoleillé à Marseille fait déjà partie de l'histoire, mais pour moi il a chamboulé ma vie", explique-t-il à l'AFP dans un pub de Moscou. Les supporters russes ont "démontré qu'ils étaient désormais les numéro un en Europe", estime-t-il.

Mais il y a peu de chances que leurs exploits puissent être répétés à domicile, lors de la Coupe des Confédérations et lors du Mondial l'année prochaine.

"On pouvait faire tout ce qu'on voulait à Marseille. Il n'y avait pas de police, ils ne réagissaient à rien", affirme le supporter. "Mais en Russie, pas une mouche ne sera en mesure de passer entre les mailles du filet. Il sera impossible de sortir du rang".

À la une

Sélectionné pour vous