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Policière, Maud Coutereels doit prendre congé pour jouer chez les Red Flames (vidéo)

Maud Coutereels, 34 ans, compte 90 sélections avec les Red Flames. L'arrière gauche de notre sélection vit une vie rythmée et animée, symbole de ce à quoi ressemble vraiment le quotidien d'une joueuse de football en Belgique.

Maud Coutereels a de l'expérience. Joueuse professionnelle depuis 2003, elle a connu la progression et l'évolution des Red Flames et du football féminin. Internationale depuis 16 ans, elle l'a vécu de l'intérieur. Bien placée pour en parler, elle revient pour nous sur son parcours et sur les mentalités qui entourent ce sport.

Le football, Maud Coutereels l'a aimé dès son plus jeune âge. "Moi j'ai commencé le football avec mon frère, qui ne voulait pas aller jouer tout seul", nous raconte-t-elle. "J'avais 5 ans et lui 6. Comme il ne voulait pas faire de sport tout seul, mes parents m'ont demandé de le suivre. J'ai commencé avec les garçons dans un petit village de la région de Namur. J'ai joué avec les garçons pendant 10 ans et lui a arrêté parce qu'il était un peu gêné de voir que sa soeur était plus forte que lui. J'ai du faire un choix entre l'équitation et le football, je lui ai laissé l'équitation et j'ai continué le football", plaisante-t-elle.

Elle a ensuite évolué dans de grands clubs, en Belgique, mais aussi à l'étranger. Elle a connu deux clubs: le Standard et Lille, où elle évolue encore aujourd'hui. Sa vie, elle l'assume, elle la défend. Mais elle demande aussi qu'on la respecte.

"Une vie à 100 à l'heure"

Il faut dire que, comme de nombreuses joueuses des Red Flames, Maud Coutereels ne peut pas se contenter du football. En effet, le budget alloué au football féminin reste minime par rapport à ce que l'on peut voir chez les hommes. 

Il a donc fallu trouver des solutions et des pistes d'avenir loin des terrains de football. "C'est le milieu du football féminin actuellement, on ne peut pas en vivre partout", confirme notre compatriote. "Je pourrais le faire, parce que j'ai un contrat pro à Lille, mais je ne me contente pas de ça parce que je sais que le football n'est pas éternel. Après notre carrière, il va falloir travailler. J'ai fait un régendat en éducation physique, j'y ai travaillé pendant une dizaine d'années puis je me suis dirigé vers la police parce que c'est quelque chose que je voulais faire depuis longtemps. J'ai décidé de combiner les deux parce que je sais que je suis plus proche de la fin que du début de ma carrière. Mon avenir, je devais le préparer", dévoile-t-elle ensuite.

Mais sa situation est très particulière. En effet, Maud Coutereels vit en Belgique et travaille dans la police belge. Elle s'entraîne en revanche à Lille, où elle joue aussi le weekend, bien que le covid ne la prive de matchs actuellement, suspension de la compétition oblige. Il a donc fallu goupiller. 

"Si je fais un 6-14 traditionnel, je me lève à 4 heures, je commence à 6h et je termine à 14h si tout va bien. Je me change au boulot, je pars à 14h30 et j'ai entraînement à 16h. De 16h à 18h30, j'ai entraînement à Lille. J'ai 1h30 de route, donc le temps de revenir, je me pose légèrement et le lendemain, ça dépend de mon horaire. Si j'ai un 14h-22h ou un 22h-6h, je fais un peu de sport", raconte Maud Coutereels. 

Pour cela, il faut aussi compter sur le bon vouloir de son employeur, qui doit comprendre la situation. Parce que les femmes, par exemple, n'ont que rarement accès à la fonction de "joueur pro", qui leur permet d'obtenir des aménagements d'horaire. "J'essaye d'arranger mes horaires en fonction du football. Dans ma zone ils sont coopérants, ils essayent de ne pas me mettre trop de 14-22h. Le peu de temps qu'on a, on essaye de faire ses courses, de ranger la maison, on a une vie sur le côté, on ne doit pas l'oublier. On a décidé de vivre à 100 à l'heure, mais je préfère ça. Quand je n'ai rien à faire ou pas de foot, je m'ennuie maintenant", rigole la Red Flames.

Mais encore une fois, certaines particularités sautent aux yeux. Par exemple, pour rejoindre l'équipe nationale, Maud Coutereels doit prendre des jours de congé. Ce que ne connaîtront jamais les joueurs professionnels masculins. 

"Ne pas se poser trop de questions"

Pour autant, Maud Coutereels refuse de se plaindre. Pour elle, il faut parfois relativiser. "Il ne faut pas se poser trop de questions, nous on a décidé de faire comme cela, de vivre notre passion à fond et tant pis si l'on doit travailler sur le côté", tempère en effet la joueuse de Lille. "Nous n'avons pas les réponses, mais si on ne veut pas avoir de regrets, on fait les deux et on organise nos journées en fonction de ça. Parfois on a des journées de fous, mais on se dit qu'on a fait les choses à fond donc on n'aura pas de regrets à la fin".

Selon elle, il y a d'ailleurs trop de comparaisons avec le football masculin. Ce qui n'a pas d'intérêt. "Il faut regarder les Flames d'un autre oeil, ne pas les comparer aux garçons. Il faut regarder une fois un match et se faire un avis. Nous les filles, on sait aussi jouer au football, on a aussi une tactique et une technique au-dessus de ce que peuvent penser les gens. Le foot féminin a un bel avenir et de la qualité", martèle Maud Coutereels.

Elle revient, enfin, sur certains propos qu'elle n'apprécie pas. D'abord sur le manque de technique supposé dans le football féminin. "C'est facile de dire ça de l'extérieur, mais venez faire un 1 contre 1 et on verra qui n'a pas de technique", rétorque immédiatement la Red Flames. 

Mais c'est surtout sur la question salariale que sa réponse est intéressante. "Pourquoi on ne mériterait pas de gagner autant que les hommes ? On fait le même sport, ce sont les mêmes règles du jeu. En plus, on fait autant voire plus de sacrifices que les joueurs pros, puisque l'on doit combiner sur le côté pour pouvoir en vivre. Je ne vois vraiment pas pourquoi on ne mériterait pas plus, je ne demande même pas autant. Mais on mérite un salaire adéquat à ce qu'on fait sur le côté", répond-elle à ce sujet.

Comme quoi, parfois, un même sport peut présenter des facettes bien différentes... 

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