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"On m'a dit de me taire": la Fédération française de football a couvert des scandales sexuels pendant 40 ans, dénonce une enquête

La Fédération française de football se retrouve au coeur d'un énorme scandale. Sur base de nombreux témoignages, il s'avère que des abus sexuels ont été cachés par la FFF depuis une quarantaine d'années.

Une dizaine de jours après les révélations du journal SoFoot concernant le harcèlement sexuel que Noël Le Graët, président de la Fédération Française de Foot (FFF), exerce sur certaines de ses employées, la FFF est visée par de nouvelles terribles révélations.

Sur le site josimarfootball.com, le journaliste Romain Molina dénonce "40 ans de silence" de la part de la FFF concernant des cas d’abus sexuels sur des enfants en son sein.

Sous couvert d’anonymat, un ancien membre du conseil d'administration de la FFF a accepté de parler à Josimar. "Quand quelque chose arrive, tu fermes ta gueule. C’est comme ça que ça marche. Sinon, je suis fini. Ils sont trop puissants. Dès que vous parlez de l'abus, vous êtes hors-jeu. Ce n'est pas seulement la FFF mais aussi la LFP (ligue de football professionnel), les clubs", dénonce la source.

"Je veux dire, avez-vous vu combien de cas auxquels nous avons été confrontés au cours des deux dernières années ? Qu'avons-nous fait pour protéger nos enfants ?", dénonce encore le témoin.

Josimar fait état de "plusieurs cas d'abus sexuels, de chantage et de harcèlement, également envers des joueurs mineurs (garçons et filles) impliquant des entraîneurs, des dépisteurs, des agents et des hauts fonctionnaires travaillant dans l'élite française."

Parmi ces cas, celui d’Angélique Roujas. Ancienne internationale française aux 51 sélections et entraîneure responsable de la section féminine du centre national de formation de Clairefontaine, elle a été limogée en 2013 après que la FFF eut appris qu'elle avait eu des relations sexuelles avec des joueuses mineures, rapporte Josimar dans son article

Un limogeage qui ne l’a pas empêchée de continuer à exercer ailleurs par la suite, comme au FC Metz ou club de Ligue 2 ESOF La Roche, où elle travaille toujours aujourd'hui.

Dans un document adressé au procureur de la République en date du 30 octobre 2013 et rédigé par Noël Le Graët, on peut y lire ceci : "Une pensionnaire a mentionné que Madame Angélique Roujas a profité de son état de faiblesse et de son lien hiérarchique pour obtenir de telles relations (intimes). Les faits remontent à 2004 et 2005, période pendant laquelle les pensionnaires concernés se trouvaient à Clairefontaine."

"Le 30 septembre 2013, lors de son entretien préliminaire, Madame Angélique Roujas nie les allégations, mais reconnaît néanmoins avoir reçu des pensionnaires dans sa chambre à l'internat. Volontairement, nous n'avons retenu aucune qualification pénale dans cette lettre de licenciement". La FFF avait licencié Angélique Roujas 5 jours plus tôt.

Cette lettre, Le Graët l’a écrite d’abord parce que la loi l’y oblige et ensuite parce qu’il "a subi des pressions pour le faire parce que les joueurs de l'équipe nationale menaçaient de faire grève". En effet, les joueuses de l’équipe de France de l’époque ont menacé de faire grève si Mme Roujas "était autorisée à faire partie du staff technique de l’équipe nationale".

Ils n'ont rien fait

Dans le cadre de l’enquête, une ancienne joueuse internationale a accepté de témoigner anonymement. Elle raconte avoir "été victime à Clairefontaine, je sais ce qui s'est passé et je sais à quel point ça a été dur de me reconstruire. Aujourd'hui encore, je n'ai pas envie d'en parler publiquement, car c'est douloureux et je ne suis pas sûre d'être soutenue."

"J'en ai parlé à des hauts responsables de la fédération, dont Brigitte Henriques, la vice-présidente de l'époque, mais que s'est-il passé ? Rien. Ils n'ont rien fait", se révolte-t-elle.

 Brigitte Henriques était alors vice-présidente de la FFF à l’époque. Celle qui est aujourd’hui la présidente du Comité olympique français a géré cette affaire de manière controversée. "Brigitte Henriques m'a en gros dit de me taire", confie un ancien cadre de la FFF à Josimar. "Elle a été très claire sur Angélique Roujas. Nous n'en avons pas parlé."

De nombreux autres cas sont relatés par Romain Molina dans son enquête. Il est à préciser que la FFF n’a pas souhaité répondre aux questions du journaliste pendant l’enquête et n’a pas réagi à la suite de la publication de cette dernière. 

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