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Coupe de France: la Saint-Pierroise, au nom de l'Outre-mer

"Gout anou!" ("On vous a eus!"): c'est le mot d'ordre de la Saint-Pierroise, petite équipe réunionnaise qui a terrassé les professionnels de Niort en Coupe de France et rêve de devenir samedi contre Epinal (N2) le premier club d'Outre-mer à atteindre les huitièmes (13h00).

Après avoir éliminé les Chamois niortais en 32es de finale (2-1), les "Cigognes", surnom des joueurs du club de Régional 1 -équivalent de la sixième division- sont attendus dans les Vosges pour affronter le SAS Epinal, 6ème au classement de la Nationale 2, deux divisions au-dessus.

Premier club réunionnais à atteindre les 16es de finale de la Coupe de France, ils comptent bien devenir le premier club ultramarin à franchir ce stade de la compétition, après l'échec du Geldar de Kourou (Guyane) lors de la saison 1988-1989 contre Nantes.

A Saint-Pierre, commune du sud de l'île de la Réunion, l'équipe s'entraîne sur la pelouse du stade Michel-Volnay, détrempée par les pluies de l'été austral. C'est ici qu'en juin 2010 les Bleus avaient été battus 1 à 0 par la Chine en match de préparation du Mondial-2010.

Dix ans plus tard, la Jeunesse sportive de Saint-Pierre (JSSP), nom officiel du club, voit dans la Coupe de France l'opportunité de grandir au-delà du football réunionnais, qu'elle domine outrageusement.

Les Cigognes évoluent en Régionale 1 depuis la création du club en 1950 et n'ont jamais quitté cette division. "Nous sommes le seul club de La Réunion qui n'a jamais été relégué", explique à l'AFP Christian Dafreville, entraîneur de la JSSP depuis quatre ans.

Avec 21 titres de champion, 11 victoires en Coupe de La Réunion, 7 en coupe régionale de France et 3 triplés championnat et coupes, la formation survole le foot local. "On a tout gagné ici", précise Jean-Michel Fontaine, capitaine et attaquant des Cigognes.

- "S'ouvrir vers l'extérieur" -

"Pour que le football réunionnais, nous y compris, progresse, il faut absolument s'ouvrir vers l'extérieur, sur le plan national et surtout le plan africain", estime Christian Dafreville. "La Coupe d'Afrique (la Ligue des champions d'Afrique, NDLR), ça compte beaucoup. Malheureusement il faut beaucoup de moyens et nous ne les avons pas", déplore-t-il, allusion aux onéreux déplacements qu'implique cette compétition.

Car Saint-Pierre ne roule pas sur l'or. Outre le stade avec tous ses équipements, une salle de musculation, une salle de réception, un club house, mis à disposition des Cigognes, la municipalité de Saint-Pierre leur verse une subvention annuelle de 325.000 euros.

"Cela représente 70% de notre budget. Le reste vient des sponsors et dans une moindre mesure des 700 à 800 spectateurs qui viennent à chaque match", énumère Luçay Arayapin, le président de la Saint-Pierroise.

Sans compter les cotisations des "400 licenciés environ", précise Serge Ulentin, entraîneur des gardiens de buts. Le club accueille les enfants à partir de 8 ans.

La moitié de l'équipe première a été formée au club. Ryan Ponti, 21 ans, auteur du but victorieux contre Niort, en fait partie. L'autre moitié vient des autres clubs de l'île, de l'Hexagone ou de l'étranger.

- "Pas de stars" -

"Il n'y a pas de stars chez nous", assure Christian Dafreville, même si l'équipe compte dans ses rangs, Ibrahima Dabo, Mamy Gervais Randrianarisoa et Pascal Razakanantenaina, trois joueurs de l'équipe de Madagascar qui a atteint les quarts de finale de la Coupe d'Afrique des Nations en 2019.

"C'est peut-être parce que tout le monde est traité à égalité que nous arrivons à former des grands joueurs", avance Laurent Fontaine, fervent supporter des Cigognes.

Les Réunionnais Guillaume Hoarau, ancien attaquant du PSG et de l'équipe de France, Didier Agathe, ex-milieu de terrain du Celtic FC et Florent Sinama-Pongolle, ancien attaquant de Liverpool, ont ainsi débuté à la JSSP.

"Florent (Sinama-Pongolle, NDLR) a joué avec nous en début de saison, on s'envoie des textos, on se téléphone, il est venu nous voir jouer à Niort, c'est un super +dalon+" (ami en créole réunionnais), note Jean-Michel Fontaine.

Dimitri Payet, actuel capitaine de l'OM et ancien milieu de terrain des Bleus, a aussi évolué sous les couleurs des Cigognes. "Dimitri, c'est notre sang. On garde des contacts avec lui", ajoute le capitaine.

Dans l'île, où toute la population soutient les joueurs et s'enflamme sur les réseaux sociaux, un séga, musique traditionnelle, a été composé pour l'occasion. La chanson raconte l'épopée des Cigognes. Elle est beaucoup fredonnée, avec ce refrain: "Gout anou!"

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