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En Libye, oublier les angoisses le temps d'un match du Mondial

Sous un soleil d'automne, des centaines de personnes se retrouvent autour d'un écran géant dressé dans un parc de la capitale libyenne, l'occasion de chasser, le temps d'un match du Mondial, leurs angoisses dans un pays miné par le conflit.

A l'occasion de la Coupe du monde 2022, la Compagnie étatique des Travaux publics, qui gère les espaces publics et entreprend de grands chantiers en ce moment à Tripoli et sa banlieue, a installé des écrans dans différents quartiers de la ville.

Le plus imposant est celui du parc près de la corniche sur la mer, à quelques mètres de la Place des Martyrs, où la plupart des férus de football se rassemblent pour regarder les matchs, gratuitement.

Une "initiative positive", se félicite auprès de l'AFP Walid al-Amari, qui n'a manqué aucun rendez-vous depuis le début de la compétition, le 20 novembre.

Dans un pays où les distractions et les loisirs se font rares, le sport, en particulier le football, attire les jeunes et les moins jeunes qui le pratiquent assidument.

"Les Libyens sont passionnés de sport", affirme le trentenaire, ancien candidat aux élections parlementaires qui souhaite voir émerger "une jeunesse lucide" et consciente que "la politique ne mène qu'à la division et au chaos".

- Pendant 90 minutes -

Assis sur des rangées de chaises blanches en plastique ou sur l'herbe, tous ont les yeux rivés sur l'écran. Certains dans leur propre bulle, d'autres discutent pendant que des enfants profitent de la sortie pour se faire offrir des barbes à papa et courir dans tous les sens.

Tout oublier pendant 90 minutes...le temps d'un match.

Les organisateurs ont "vu juste", estime M. Amari pour qui l'impact positif de cette initiative offre, ne serait-ce que temporairement, une échappatoire à "une situation politique qui a fatigué les Libyens".

"S'il y a du bonheur, c'est dans le foot", alors que côté politique, "on a fermé la porte à tout jamais", renchérit Mohamad Trabelsi, un retraité de 68 ans.

Ce dernier se félicite d'"un geste formidable" dans un contexte économique difficile: "il y a tellement de familles et de jeunes qui n'ont pas les moyens de regarder la Coupe du monde sur les chaînes payantes".

- Des étrangers aussi -

Ici au moins, "c'est gratuit!", se réjouit M. Trabelsi, heureux de voir des centaines de jeunes "réunis dans une atmosphère amicale". Même s'il regrette que son pays, pourtant riche en pétrole, soit incapable d'accueillir un événement sportif de telle ampleur, à l'instar du Qatar, le pays hôte du Mondial, qui regorge de gaz.

"Nos frères et voisins nous ont devancés", dit-il, avec une pointe d'amertume en jetant un oeil sur l'écran qui diffusait justement un match entre le Qatar et le Sénégal.

Depuis la chute en 2011 du régime de l'ex-dictateur Mouammar Kadhafi, les Libyens n'ont pas connu de répit.

La Libye a sombré dans le chaos et la violence, avec des pouvoirs rivaux basés dans l'Est et l'Ouest, une myriade de milices armées et des mercenaires étrangers disséminés dans le pays, sur fond d'ingérences étrangères.

Langage universel, même en Libye, le foot réunit au-delà des nationalités, des générations ou des professions.

Ghanéens, Camerounais, Ivoiriens, Algériens, Tunisiens, Egyptiens... ils sont eux aussi au rendez-vous, venus entre amis ou en famille.

A la tombée de la nuit, le parc est bondé.

Khaled, un Egyptien, qui travaille en Libye dans le bâtiment, est ravi de regarder les matchs "en plein air et près de la mer" plutôt que d'être "enfermé dans des cafés exigus et bruyants".

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