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Homophobie dans le foot: Le Graët persiste, Maracineanu réplique

Une-deux tendu entre Noël Le Graët et Roxana Maracineanu: la ministre des sports a dénoncé la position "erronée" du patron du foot français, qui a différencié mardi lutte contre racisme et homophobie et demandé aux arbitres de ne plus arrêter les matches en cas de manifestations homophobes dans les stades.

A quelques heures du match de qualifications à l'Euro-2020 France-Andorre, où les deux personnalités doivent se retrouver en tribune officielle au Stade de France, l'avant-match s'était animé en coulisse.

Avec d'un côté Noël Le Graët, grand patron du foot français, qui ne digère pas que son sport soit pointé du doigt dans son ensemble en raison du comportement de certains supporters. Et de l'autre, Roxana Maracineanu, ministre des Sports, qui veut jouer pleinement son rôle de "pouvoir public", en incitant les acteurs du dossier à se réunir pour éradiquer ces comportements qui relèvent du délit.

Au centre: le football français, qui a vu depuis le début de la saison, plusieurs rencontres être brièvement interrompues en L1 et L2 pour faire cesser des chants homophobes lancés des tribunes ou le déploiement de banderoles injurieuses. Une fermeté réclamée et vivement saluée par Roxana Maracineanu, sa collègue chargée de la lutte contre les discriminations, Marlène Schiappa, et par les associations de lutte contre l'homophobie.

Au milieu de cette controverse, Emmanuel Macron a pour sa part appelé mardi à la fois à la "clarté" et au "discernement", souhaitant que "tout le monde travaille ensemble", sans "fausses polémiques".

La semaine passée, M. Le Graët avait déjà détonné en estimant dans Ouest-France "qu'on arrêtait trop de matches" pour des manifestations homophobes.

Mardi matin, le président de la "3F", 77 ans, a enfoncé le clou sur France info: "L'arrêt des matches ne m'intéresse pas. C'est une erreur. J'arrêterais un match pour des cris racistes, j'arrêterais un match pour une bagarre, des incidents s'il y a un danger dans les tribunes", a poursuivi M. Le Graët, assurant que le racisme dans les stades et l'homophobie en tribunes, "ce n'est pas la même chose" et appelant les clubs à "agir" via leurs services de sécurité.

Reprise de volée rapide de Roxana Maracineanu, à la sortie des questions aux gouvernements, à l'Assemblée: "La position qu'a prise Noël Le Graët en faisant une différenciation entre homophobie et racisme est erronée", a-t-elle estimé.

"Cette actualité dénote du manque de préparation sur ce sujet", a estimé la ministre des Sports, visée par plusieurs piques du président de la 3F ces derniers mois.

"Pour être claire, il m'a fait un procès en légitimité dès que j'ai parlé sur ce sujet, que ce soit une femme qui parle de football, une nageuse qui parle de football, mais oui, mon rôle de pouvoir public, mon rôle de ministre, c'est de veiller à la protection de tous nos citoyens", a indiqué l'ancienne championne du monde de natation, qui cite également le règlement de la Fifa sur ce thème, une procédure en trois étapes pouvant aboutir à un match perdu par l'équipe dont les supporteurs sont fautifs.

"L'homophobie, c'est le football qui l'a inventée?", avait déclaré M. Le Graët à Ouest-France vendredi. "Ca fait bien d'aller raconter sa science quand on n'a pas grand-chose à dire. Il y a pourtant des enjeux politiques plus importants". Début avril, l'ancien président de Guingamp avait même lâché: "Elle (Maracineanu, ndlr) n'a pas l'habitude de venir au stade, c'est vrai que dans les piscines on n'entend pas ce qu'il se dit".

La ministre des sports n'a pas été la seule à réagir aux nouveaux propos de Noël Le Graët.

Du côté du corps arbitral, "le message (du président Le Graët) a été entendu", a indiqué à l'AFP une source proche des arbitres, se disant "dans l'attente d'une consigne qui sera certainement transmise" en vue du prochain week-end de championnat et confirmant que "les consignes données aux arbitres relèvent de la FFF"

Les associations qui luttent contre l'homophobie ont, elles, vivement réagi.

- "Appel à la démission" -

Le collectif Rouge Direct lance ainsi sur Twitter un "APPEL À LA DÉMISSION DU PRÉSIDENT DE LA @FFF Noël le Graët".

M. Le Graët, dont le mandat s'achève en 2020, après les Jeux olympiques de Tokyo, n'a pas encore faire savoir s'il souhaitait se représenter ou non.

Dominique Sopo, président de l'association SOS Racisme, l'invite lui "à prendre sa retraite".

"Arrêter un match pour des cris racistes, oui! Pour des chants homophobes, non! Quand le président de la FFF fait un tri immonde entre discriminés. Propos totalement scandaleux. Quelle honte!", déplore également sur Twitter l'association des PanamBoyz & Girlz United, qui dénonce l'homophobie dans le football et travaille sur le sujet avec la Ligue de football professionnel (LFP).

Ces échanges interviennent en plein séminaire de la LFP, qui devait se conclure mercredi par une réunion, placée sous l'égide de la Ligue, entre l'Association nationale des supporteurs (ANS) et les associations de lutte contre l'homophobie (SOS Homophobie, Foot ensemble, Licra, Panam'Boyz). Mais l'ANS, a conditionné sa participation à un ensemble de conditions qui rendent sa présence fortement improbable.

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