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JO: des chercheurs d'Oxford dénoncent une inflation incontrôlée des budgets

Si "plus vite, plus haut, plus fort" est la devise des Jeux olympiques, elle semble s'appliquer aussi à l'inflation des budgets de cet évènement planétaire, souligne une étude de chercheurs d'Oxford qui appellent à des réformes drastiques pour préserver les JO.

Dans leur étude, publiée dans une revue universitaire mardi, les chercheurs dévoilent que, pour tous les JO depuis 1960, les dépenses ont été presque triplées par rapport au budget initial, avec un dépassement de 172% en moyenne, en données réelles (hors inflation).

Une tendance alarmante et qui pourrait menacer l'existence même des Jeux, avertissent-ils, car chaque nouvel organisateur tend à vouloir dépasser le précédent.

Les Jeux Olympiques d'été les plus coûteux de l'Histoire restent pour le moment ceux de Londres en 2012, avec 15 milliards de dollars (12,6 mds EUR), et pour ceux d'hiver, la palme revient aux Russes de Sotchi en 2014 avec 21,9 mds USD (18,4 mds EUR).

Les Jeux de Tokyo 2020, repoussés en 2021 à cause de la pandémie de Covid-19 n'échapperont pas à cette règle.

Le dernier budget en date, à 12,6 mds USD (10,6 mds EUR), ne prenant pas encore entièrement en compte les coûts du report qui vont de la réservation à nouveau des infrastructures et des transports aux dépenses liées au personnel pléthorique du comité d'organisation qu'il a fallu employer un an de plus.

Les auteurs du rapport pensent qu'ils pourraient devenir les JO les plus chers de l'histoire.

Les aléas potentiels sont tellement nombreux et imprévisibles que les conséquences financières pour les villes organisatrices n'ont aucune limite théorique, assurent les auteurs de l'étude, comparant ce risque aux situations de catastrophes naturelles, type tremblements de terre, tsunamis, pandémies, ou aux conflits armés.

Pour l'auteur principal de l'étude, Bent Flyvbjerg, professeur de gestion des évènements majeurs à la Saïd Business School d'Oxford, tout part du CIO et de ses relations avec les organisateurs.

- "Approche viciée -

"Tout ce qui intéresse le CIO, ce sont les recettes", a-t-il expliqué à l'AFP. "Et on a donc ce système d'incitation totalement paradoxal où le CIO fixe les normes que doivent respecter les JO alors que ce n'est pas lui qui paye les factures".

Les maigres efforts du CIO jusqu'ici pour aider financièrement les villes hôtes n'ont eu que peu d'effet et des changement plus radicaux s'imposent.

"On a vu des villes dire +on a changé d'avis+, ce qui est extrêmement gênant pour le CIO. Rome l'a fait, Boston, Hambourg...", a énuméré le chercheur.

"C'est ça qui va pousser le CIO à s'occuper vraiment de ce problème et à le regarder en face. Il a le dos au mur", veut croire Flyvbjerg, qui estime que sans réaction, il existe "un vrai risque que les Jeux ne se tiennent plus".

Le CIO a vivement contesté les conclusions de l'étude pour laquelle il n'a pas été sollicité et accusant les auteurs d'avoir choisi une approche "profondément viciée" en mélangeant le budget des Jeux en lui-même et le budget des infrastructures développées par les villes, les régions ou les pays.

"Cela donne l'impression totalement erronée que le budget de ces infrastructures doit être amorti pendant les quatre semaines des JO", a souligné un porte-parole de l'organisation.

"Ce n'est tout simplement pas vrai. Il semble que l'héritage que laisse les JO soit aussi totalement écarté du tableau".

- "Evénement boursouflé" -

Flyvbjerg n'en démord pourtant pas: une réforme profonde est nécessaire.

L'une des pistes pour réduire les coûts serait de choisir des villes bénéficiant déjà de la majeure partie des infrastructures nécessaires.

Paris en 2024 et Los Angeles en 2028 ont bénéficié de cela.

Mais une approche encore plus efficace serait de sédentariser les Jeux dans une même ville, à l'image d'Athènes dans l'Antiquité, une idée peu susceptible d'enthousiasmer le CIO.

Une idée moins radicale serait d'attribuer l'organisation de deux ou trois éditions des Jeux à chaque ville.

"En choisissant les bonnes villes, on peut diviser les coûts par deux", a-t-il assuré.

"Si vous faisiez ça, les villes se diraient que si elles peuvent le faire pour 5 ou 6 mds USD (4 à 5 mds EUR), ce serait un prix juste pour la plus grande fête au monde".

"J’espère que Tokyo sera le dernier de ces évènements boursouflés où les coûts explosent de toute part et où il n'y a aucun contrôle digne de ce nom sur la façon dont des milliards et des milliards de dollars d'impôts payés par les contribuables sont dépensés", a-t-il conclu.

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