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Après 29 éditions entre l'Europe et l'Afrique et 11 en Amérique latine, le rallye Dakar, le plus célèbre des rallyes-raid, fait de nouveaux ses valises pour prendre un nouveau départ controversé à partir de 2020 en Arabie Saoudite.
"Après trente années à sillonner et découvrir l'Afrique et dix ans à s'émerveiller des paysages sud-américains, le plus grand rallye du monde va écrire un nouveau chapitre au sein des déserts mystérieux et profonds du Moyen-Orient, en Arabie Saoudite", annonce l'organisateur ASO dans un communiqué lundi.
L'accord court sur cinq ans et doit donner un nouvel élan à une épreuve en perte de vitesse auprès des concurrents et du public, en dépit des manquements du pays en matière de droits de l'Homme ou encore de son implication dans la guerre au Yémen.
Créée en 1978, la course, alors appelée Paris-Dakar, était disputée entre l'Europe et l'Afrique jusqu'en 2007, avant de déménager en Amérique du Sud pour se prémunir de la menace terroriste.
Entre 2009 et 2018, elle a fait étape en Argentine, au Chili, au Pérou, en Bolivie et brièvement au Paraguay. L'organiser dans cette région devenait toutefois de plus en plus compliqué du fait des politiques d'austérité et des contraintes météorologiques.
L'édition 2019 a ainsi été la première à n'avoir lieu que dans un seul pays, le Pérou, après les retraits de la Bolivie et du Chili.
- "Aborder les sujets qui fâchent" -
D'un point de vue sportif, ses quelque 2 millions de km² font de l'Arabie Saoudite un excellent terrain de jeu. C'est aussi un point d'entrée pour négocier avec les pays voisins.
En Amérique latine, "on connaissait le terrain par coeur", explique à l'AFP le motard français Xavier de Soultrait. "Certains jours, on ne regardait même pas le +road book+", le carnet de route distribué aux équipages. Dans un pays neuf, "on retrouve l'essence du rallye-raid".
"C'est bien aussi pour l'équité du sport", poursuit-il. "En Amérique du Sud, les gens passaient facilement les frontières pour faire des reconnaissances, ce qui est interdit. Ce ne sera pas possible en Arabie Saoudite."
A l'instar des autres pilotes professionnels, le 7e du classement moto en 2019 ne manquera pas l'événement, sauf raison sportive. Il ne compte pas pour autant se taire sur la question des droits de l'Homme. "Y aller et aborder les sujets qui fâchent, peut-être que ça peut aider", espère-t-il. "Pour moi, c'est même un devoir d'essayer d'avoir un petit mot."
De Soultrait estime par contre que des amateurs et leurs sponsors pourraient "boycotter" cette destination controversée.
Le contingent de pilotes sud-américains débarqués au Dakar ces dernières années devrait également se réduire. Reste à voir s'il pourra être compensé.
Enfin, le décalage horaire très faible avec l'Europe est un argument auprès des médias, principalement des télévisions.
- Diplomatie du sport -
"Je suis déjà inspiré et heureux de devoir tracer un parcours dans une géographie aussi monumentale et propice aux itinéraires les plus audacieux", assure le nouveau directeur de l'épreuve, le Français David Castera.
"Sport, navigation, dépassement de soi, seront à l'évidence magnifiés dans ces territoires faits pour le rallye-raid", promet celui qui a participé à l'épreuve en moto puis comme copilote en auto et en a été le directeur sportif entre 2006 et 2015.
"Notre pays est passionné par le sport et notre objectif stratégique est de nourrir cet appétit à mesure que nous progressons vers la réalisation de notre Vision 2030 dont le sport est un des piliers", commente le président de l'Autorité générale des sports en Arabie Saoudite, le Prince Abdulaziz bin Turki AlFaisal Al Saud.
Hôte de la Supercoupe d'Italie de football, d'une course de Formule Electrique et désormais du Dakar, le royaume s'appuie depuis quelques années sur le sport pour améliorer son image et préparer l'après-pétrole, à l'instar du Qatar et des Émirats arabes unis.
Une conférence de presse donnera plus de détails sur l'événement jeudi 25 avril à Al Qiqqiya, près de la capitale saoudienne Ryad.