Partager:
Charlotte Bonnet et Jordan Pothain nageront le 200 m à Tokyo: la première, malheureuse au cours de la première phase de qualification olympique, a vaincu le stress et le deuxième renaît in extremis aux Championnats de France de natation, jeudi à Chartres.
Les longues embrassades partagées avec ses coéquipières et son compagnon, le nageur suisse Jérémy Desplanches, ne mentent pas. "C'est un énorme soulagement (...) tellement j'avais d'appréhension et de pression par rapport à cette qualification olympique", souffle la Niçoise de 26 ans, victorieuse du 200 m en 1 min 56 sec 67 pour 1 min 57 sec 28 fixées par l'encadrement bleu.
C'est que tout au long de la première fenêtre de sélection olympique ouverte de décembre à mars derniers, au cours de laquelle un chrono équivalent à une finale de niveau mondial (1:56.63 sur 200 m) ouvrait au plus tôt les portes de Tokyo, Bonnet avait échoué de peu, à trois reprises. D'abord pour deux centièmes à Saint-Raphaël en décembre (1:56.65), puis pour 33 à Nice début février (1:56.96), et enfin pour quatorze à Marseille fin mars (1:56.77).
Puis elle avait connu une désillusion de plus aux Championnats d'Europe mi-mai à Budapest: venue avec l'ambition assumée de conserver l'or européen conquis en 2018 sur la distance, elle s'était finalement classée quatrième (1:56.55).
- "Tellement de stress" -
"C'est difficile à encaisser, avouait-elle alors. Mentalement, c'est dur de ne pas être récompensée de tout ce que j'investis depuis des années dans l'entraînement."
"Clairement, avec toutes les occasions que j'ai eues, la déception de ne pas monter sur le podium (à Budapest), repartir à chaque fois au boulot, la tête dans le guidon, à un moment ça coince", reconnaît-elle jeudi soir.
De son 200 m chartrain, "j'avais l'impression de jouer une finale dans un grand championnat tellement j'avais de stress", raconte-t-elle.
"Il y avait tellement d'enjeu que je n'ai pas pu mettre en place tout ce qu'on a travaillé comme je voulais, je ne fais pas une super course et je m'arrache à la fin pour faire ce p... de chrono, poursuit-elle. J'ai dû perdre plusieurs kilos de boulet que je traînais…".
"Je fais 1 min 56 sec, il y a des centaines de filles qui l'ont fait cette année, ça reste un temps loin des meilleures, loin de mes attentes, mais je vais m'en contenter aujourd'hui. Je me dis que je suis qualifiée pour mes troisièmes Jeux et tout le monde ne peut pas dire ça", retient Bonnet.
Pothain, lui, revient d'encore plus loin. Finaliste olympique sur 400 m en 2016, mais en sérieuse difficulté depuis, et pas qualifié pour les Mondiaux-2017 ni 2019, le Grenoblois de 27 ans a retrouvé sa forme et ses sensations juste à temps.
- "Tellement dingue" -
Vainqueur du 200 m en 1 min 46 sec 93, pour 1 min 47 sec 02 demandées, il s'est offert la première place qualificative, devant Jonathan Atsu (1:46.97), qui a obtenu le deuxième sésame en jeu.
Pothain n'avait plus nagé aussi vite un 200 m individuel depuis les précédentes sélections olympiques en mars 2016 (1:46.81). Mais il avait donné un indice de son renouveau au départ du 4x200 m mi-mai à Budapest en lançant le relais français en 1 min 46 sec 91.
"Je l'ai fait, c'est dingue ! Je savoure d'autant plus après tout ce qu'il s'est passé depuis Rio. C'est une belle récompense", sourit-il la voix tremblante d'émotion.
Et dire qu'il plafonnait encore en 1 min 51 sec 02 fin mars à Marseille, où on l'avait vu tête basse et comme désemparé en tribunes.
"Pendant toutes ces années, je n'ai pas lâché, je me suis battu. J'ai douté vraiment fort à certains moments, plusieurs fois j'ai pensé à arrêter parce que j'allais droit dans le mur et que je ne trouvais pas de solutions. Finalement à force d'abnégation, ça paie", retrace le Grenoblois, qui a rejoint Fabrice Pellerin à Nice au cours de l'olympiade.
"C'est un sentiment assez particulier parce que ça a été vraiment horrible, et là, c'est tellement dingue que ça effacerait limite tout ce qui s'est passé", résume Pothain.
A mi-compétition, douze nageurs français ont empoché un billet en individuel pour Tokyo.