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Le coronavirus va-t-il tuer le judo? "L'avenir va être difficile pour tous les clubs, il faudra se soutenir les uns les autres"

Privés de tatamis depuis la mi-mars, les judokas semblent être les derniers auxquels on pense lorsqu'on évoque le retour de la pratique du sport en Belgique. Le judo, et les sports de combat en général, restent en effet interdits jusqu'au 1er juillet. Et la compétition ne devrait pas reprendre avant fin août voire septembre. L'incertitude qui règne autour de cette discipline fait craindre le pire pour tous les clubs francophones.

Vous le savez, le gouvernement fédéral a autorisé la pratique générale du sport à partir de ce lundi 8 juin. Celle-ci se fait sans distinction entre amateurs ou professionnels, entre entraînements et compétitions en salle ou en plein air, à condition que les protocoles de sécurité soient respectés.

Mais, malgré le déconfinement progressif et l'entrée en vigueur de la phase 3, les sports de contacts comme le judo, la boxe, le basket et le volley n'ont pas pu reprendre. Seuls des entraînements sans contact sont autorisés dans ces sports qui devront à tout le moins attendre le 1er juillet prochain où "tout sera permis" au niveau du sport, y compris les compétitions avec la présence du public "assis", à condition de suivre une série de protocoles de sécurité pour éviter la contamination du coronavirus toujours présent.

Avec l'arrêt présumé des compétitions jusqu'à fin août, c'est une sorte de double peine pour le judo belge francophone. "Notre club le vit plutôt mal dans le sens où on reçoit beaucoup de questions de la part des affiliés concernant la reprise. Questions auxquelles nous sommes dans l'incapacité de répondre. Le comité du club se sent assez démuni et presque naufragé au milieu de l'océan des mesures prises", nous confie à ce propos Jérémie qui nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour nous "exposer la situation de nos clubs de judo durant cette période tellement difficile de confinement".

Une perte de membres ?

Pourtant, les clubs et fédérations ont tout tenté pour pouvoir reprendre la pratique de leur sport préféré. Un plan de déconfinement a notamment été réalisé en collaboration avec la ministre des Sports en Fédération Wallonie-Bruxelles Valérie Glatigny. Pour rien, serait-on tenté de dire. Un plan qui a aussi fait des dégâts puisqu'il a provoqué début mai la démission du directeur technique de la Fédération Francophone Belge de Judo (FFBJ) Bernard Tambour, en désaccord avec les différentes actions mises en place dans cette série d'idées.

Tout cela semble bien trop haut pour Jérémie. Car son "angoisse" est avant tout basée sur les affiliés de son club d'Ottignies Louvain-la-Neuve. "En effet, il a fallu se débrouiller durant deux mois pour garder le contact avec nos affiliés les plus assidus. Nous avons un petit noyau d'une dizaine de judokas qui vivent assez mal l'éloignement et qui aimeraient vraiment retrouver ces moments où nous pouvons pratiquer ensemble notre discipline. En dehors de ce groupe, nous avons perdu le contact de beaucoup d'autres judokas. Deux enfants ont vraiment très mal vécu l'arrêt brutal des entraînements, notamment. Leurs parents nous ont d'ailleurs confié que nous retrouver via l'application Zoom leur à fait beaucoup de bien".

"Difficile de pratiquer des exercices via un écran..."

Pour essayer de "garder le contact", ils ont chaque jour proposé des défis sportifs à leurs membres. Mais les difficultés sont vite apparues. "Nous nous sommes vite rendu compte que ça n'allait pas suffire et, entre responsables du club, nous nous sommes renseignés sur les possibilités de pratiquer des exercices variés seul chez soi. Nous avons, comme beaucoup d'autres clubs, démarré des entraînements deux fois par semaine sur Zoom. L'ennui est que pour suivre ce type d'entraînement, il faut avoir déjà pratiqué le judo afin de bien se rendre compte des exercices demandés. Il est également difficile de bien corriger les erreurs via un écran...".

Si du positif en est tout de même sorti ("Nous avons retrouvé une énergie de groupe qui nous a permis de patienter. Pour garder un côté fun, nous avons également réalisé des petites vidéos de type TikTok entre nous sur le thème du judo"), l'avenir s'annonce sombre, d'après Jérémie: "Des clubs craignent que la crise sanitaire ne pousse certains de leurs membres à aller voir ailleurs. C'est une angoisse que nous vivons dans notre club, car, en tant que responsables, nous travaillons constamment à créer une cohésion de groupe que la crise sanitaire explose complètement. Ici, les angoisses des adhérents et, pour les plus jeunes, leurs parents, risquent de les détourner du judo de par son côté tactile. C'est un sport de contact et c'est le point le plus décrié par les médias et les spécialistes. Même si nous redémarrons avec des mesures sanitaires plus strictes (masque, gel hydroalcoolique), les gens plus craintifs préféreront des sports permettant une certaine distanciation sociale".

Une autre menace plane

Jérémie pense qu'une autre menace plane au-dessus de la reprise du judo, 13e sport seulement en nombre d'affiliés (environ 12.000) en Wallonie et à Bruxelles. "Je crains une incapacité de reprendre nos entraînements dans notre plage horaire habituelle car les salles seront sans doute louées à des disciplines différentes. Cette difficulté, si nous la rencontrons, nous obligera à peut-être trouver des salles à un prix plus élevé. Cela, combiné à une perte de membres, entraînera des dépenses plus grandes et donc des difficultés financières...".

Jérémie craint enfin une potentielle deuxième vague de contaminations au coronavirus suite à la reprise du judo. "Cette crise n'engendre que du négatif. L'avenir va être difficile pour tous les clubs et il faudra absolument se soutenir les uns, les autres". Pour une reprise "plus ou moins" normale au mois de septembre.

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