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Descente de Kitzbühel: show et stress sur la Streif

Show must go on: c'est la devise non écrite de la descente messieurs de Kitzbühel, la plus courue de la Coupe du monde de ski alpin sur l'invisible fil entre spectacle et danger dans la pente de la mythique Streif.

Si les autres pistes du circuit redoutent l'accident qu'on ne saurait voir, le risque est partie intégrante du spectacle sur la Streif avec ses corps désarticulés et les ballets des hélicoptères médicalisés.

"Les organisateurs se sont offusqués des critiques de Beat Feuz (champion du monde en titre de descente et récent vainqueur à Wengen) après l'entraînement de mardi, mais ça fait parler encore et toujours de Kitzbühel", remarque un observateur.

Le Suisse Daniel Albrecht et l'Autrichien Hans Grugger avaient mis fin prématurément à leur carrière à la suite de crashes à Kitzbühel, respectivement en 2009 et en 2011.

Même si le risque zéro n'existe pas dans la plus périlleuse des disciplines olympiques, le sujet a été ravivé par les décès à l'entraînement du Français David Poisson, médaillé de bronze aux Mondiaux 2013, et du jeune Allemand Max Burkhart, entre novembre et décembre 2017 au Canada.

"Le parcours est immuable, et la Streif sera toujours la Streif. Mais nous pouvons apporter des nouveautés pour améliorer la sécurité et des points techniques", note le chef de piste, Herbert Hauser.

- A la merci de -

Avec pour seule protection une combinaison, un casque et une dorsale, le skieur est à la merci sur la Streif d'une rampe vertigineuse dès le départ, propulsé vers le saut de la Mausefalle (la souricière), ballotté à l'entrée du chemin. Et ce n'est pas fini: avec des sauts, un dévers, une traverse souvent bosselée et une plongée à 140 km/h dans le schuss qui ouvre sur une aire d'arrivée noire de dizaines de milliers de spectateurs.

"Il n'y a rien de plus grand que Kitzbühel", estime l'Américain Daron Rahlves, un poids léger vainqueur en 2003.

"C'est la seule piste arrosée du début à la fin, souvent de la glace de haut en bas", rappelle le vétéran français Johan Clarey, troisième en 2017.

Kitzbühel est considérée comme le challenge ultime, une 9+B de la descente en se référant aux cotations de l'escalade.

Pour le Suisse Bernhard Russi, champion olympique de descente en 1972 à Sapporo (Japon), et encore en argent quatre ans plus tard à Innsbruck, la descente est le banc d'essai de la "gestion du risque".

"Le coureur doit comprendre ce qu'il ose faire et ce qu'il n'ose pas faire. La gestion est la même que pour un pilote de Formule 1. S'il va à fond dans un chicane et qu'il sort, il ne peut pas se plaindre, c'est sa faute. Si un skieur n'ouvre pas son corps avant un saut, ce n'est la faute du saut, mais sa faute", explique à l'AFP Russi, architecte des pistes olympiques depuis 1980.

"Kitzbühel, c'est le Monaco du ski", remarque le Norvégien Aksel Lund Svindal, le meilleur descendeur des dernières années, qui s'était blessé à un genou en 2016.

Et le quintuple champion du monde d'ajouter: "Là-bas, les pilotes se prennent le mur à la plus petite inadvertance, il n'y a pas de marge d'erreur. C'est pareil pour nous à +Kitz+: zéro droit à l'erreur".

- Respect et transgression -

"La Streif, il faut la respecter", note l'Italien Dominik Paris, double vainqueur (2013/2017). "Quand tu as compris cette piste, alors il faut savoir les limites à ne pas franchir. Et, pour cela, on doit déjà bien se connaître soi-même", précise Paris, rejoignant à travers les génération l'avis de Russi.

Le respect n'exclut pas la transgression. Kristian Ghedina, vainqueur de la descente phare en 1998, en donna la preuve sur la Streif le 24 janvier 2004. Le casse-cou de Cortina d'Ampezzo, dont la mère, monitrice, était décédée en 1985 dans un accident de ski, termina à la 6e place.

Surtout +Ghedo+ fit le grand écart lors du saut du schuss final, là où ont chuté depuis lourdement nombre de concurrents, dont Albrecht et Grugger.

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