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"Il n'y aura pas de round d'observation", souligne le patron du Tour de France, Christian Prudhomme, dans un entretien à l'AFP avant le départ samedi à Bilbao et une première étape inhabituellement difficile dans la "ferveur formidable" du Pays basque.
QUESTION: Qu'attendez-vous du départ du Pays basque?
REPONSE: "On aura tout ce qui fait le Tour de France: un terrain sportif extraordinaire pour les champions. La beauté du décor. Les références à la géographie, l'histoire et la culture puisqu'on passera notamment deux fois à Guernica. Et l'enthousiasme du public. Je me souviens des marées oranges d'Euskaltel-Euskadi dans les cols des Pyrénées. Ils nous attendent! La ferveur va être formidable. Et cette ferveur est aussi clairement indispensable, un an après le départ du Danemark qui a marqué les esprits."
Q: Ces succès populaires sont une manière de répondre aux critiques sur les départs récurrents du Tour de l'étranger?
R: "Ces départ de l'étranger, je les revendique. Mais à la condition qu'il y ait sur le parcours Saint-Léonard-de-Noblat, Châtillon-sur-Chalaronne, Poligny ou Moirans-en-Montagne, c'est-à-dire des petites bourgades. Pour moi, c'est ça le Tour de France, des très grandes villes françaises et étrangères, des villes moyennes et des villages. C'est ce que je dis à chaque fois aux élus des collectivités étrangères qui nous accueillent: vous devez montrer plus, vous devez prouver au public français pourquoi on a eu raison de partir de l'étranger."
Q: Pourquoi est-ce si important?
R: "Parce que le Tour de France permet à des gens de relever la tête. Je ne vais pas dire qu'il va changer leur vie. Mais quand les gens remarquent qu'on fait encore attention à eux, quand ils entendent le nom de leur village à la radio, c'est quelque chose qui leur rend de la fierté. Et c'est très important la fierté pour la cohésion d'un pays."
Q: Pourquoi un début aussi difficile?
R: "Parce qu'on veut avoir les favoris du Tour épaule contre épaule dès le premier week-end. Là on est sûr de les avoir. Les pentes de Vivero, de Pike, du Jaizkibel vont permettre aux meilleurs puncheurs du style Van der Poel mais aussi Pogacar et Vingegaard de se mesurer d'entrée. Il n'y aura pas de round d'observation. On a énormément travaillé ces dernières années sur les parcours, notamment de la première semaine. Mais ça dépend aussi énormément des champions. Et on a la chance d'avoir une génération exceptionnelle."
Q: Beaucoup résument le Tour 2023 à un duel entre Vingegaard et Pogacar. Vous aussi?
R: "En tout cas, c'est le match retour. Et peut-être la revanche. Ce qui est sûr c'est que ça émoustille. En tennis, les Federer-Nadal, les Nadal-Djokovic, c'est quelque chose qui attire, qui fait aimer. Un duel, il n'y a rien de plus beau. C'est Anquetil-Poulidor. C'est Hinault-Lemond."
Q: Thibaut Pinot et Julian Alaphilippe, les deux chouchous du public français, sont au départ. L'organisateur est content?
R: "C'est une évidence. On oublie les palmarès parfois. Mais on n'oublie pas les émotions. Julian et Thibaut sont des coureurs qui transmettent des émotions. Julian est un personnage clé du Tour de France. Et ce n'était pas possible que Thibaut ne fasse pas le Tour pour sa dernière année. On s'échange parfois quelques messages. Je ne doutais pas de sa volonté d'être au départ."
Q: Ca fait 38 ans que Bernard Hinault a signé la dernière victoire française. L'attente commence à être longue pour vous aussi?
R: "Pour la victoire finale, ça me semble un petit peu juste cette année encore. Mais qui sait si dans les trois ans on ne va pas trouver le Antoine Dupont du vélo? Du XV de France, on disait qu'il allait falloir des décennies pour qu'il revienne au niveau. Et c'est allé beaucoup plus vite. Pour cette année, je ne souhaite qu'une chose: que les espoirs de Top 10, de Top 5, de podium se concrétisent. Et qu'on ait des chevauchées à s'en dresser les poils sur les bras."
Propos recueillis par Jacques KLOPP