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Entre rêves et sacrifices : immersion dans la vie de Kimberley Zimmermann, l’étoile montante du tennis belge

Kimberley Zimmermann a 23 ans. Joueuse de tennis depuis 17 ans, elle arpente actuellement le circuit ITF, qui rassemble les espoirs du tennis mondial, qui rêvent toutes de gloire dans les plus gros tournois de la planète, sur le fameux circuit de la WTA. A ces jeunes s’ajoutent les joueuses en manque de rythme ou de retour de blessure. Ce sont des professionnelles, des joueuses de haut niveau.

Son nom ne vous dit peut-être pas grand-chose, mais elle fait partie des futures sensations du tennis belge. Elle a d’ailleurs côtoyée l’actuelle référence noire-jaune-rouge, Elise Mertens, lors de son parcours chez les jeunes. "J’ai joué avec elle quand j’étais plus jeune en moins de 12 et 14 ans et même en moins de 18 ans. C’est motivant de se dire que je peux aussi peut-être y arriver, ça donne de la motivation", nous explique-t-elle avec le sourire, qu’elle gardera pendant toute l’interview.

Détendue, la tête sur les épaules, Kimberley Zimmermann fait le point sur sa progression avec un recul impressionnant. Pourtant, certaines de ses statistiques ont de quoi faire tourner la tête. A 23 ans, elle compte déjà 7 titres en double et 2 en simple sur le circuit professionnel. Elle n’a pas encore eu l’occasion de mettre les pieds sur le circuit WTA, le plus relevé de la planète, mais elle espère y parvenir.

Portrait d’une grande espoir du tennis belge, déjà présente aux qualifications de l’Open d’Australie, déjà membre de l’équipe de Fed Cup et prête à franchir un nouveau palier.


Première étape : percer en ITF


Kimberley Zimmermann est actuellement en lice sur les tournois ITF, qui rassemblent les joueuses qui se préparent à intégrer le plus haut niveau du tennis mondial. La Belge y évolue depuis quelques années déjà. Elle y découvre les exigences du plus haut niveau, loin des caméras et donc de la pression inhérente à ce métier.

Son début de saison est à l’image de la joueuse, encore irrégulière mais dotée d’un gros potentiel. Elle le reconnaît elle-même, tout n’a pas été parfait, mais les choses vont tout de même dans le bon sens. "La saison sur dur a été un peu compliqué, les tournois ont été assez relevés", nous explique-t-elle. "Mais j’ai quand même quelques résultats encourageants avec un quart de finale en 60.000 dollars (prize money, ndlr). Le début de la saison sur terre était assez compliqué, avec des conditions de jeu très difficiles pour nous, joueuses européennes, des conditions qu’on a pas trop l’habitude d’avoir. Mais je pense que c’était une bonne expérience, c’est comme ça que je vais m’en servir pour le futur".

Le rêve de Kimberley est évidemment de rejoindre le circuit WTA, le gratin du tennis mondial. Un circuit fermé, restreint aux joueuses confirmées. La Belge est actuellement classée à la 215ème place mondiale, le meilleur classement de sa jeune carrière. Insuffisant, cependant, pour s’inscrire à de tels tournois. "Il n’y a pas de conditions spécifiques, c’est simplement une question de classement. Je dois encore un peu monter au classement, environ à la 160-170ème place mondiale, pour avoir une chance de m’y inscrire".

Parce que oui, même dans le monde du tennis professionnel, il faut encore s’inscrire aux tournois. Les organisateurs, hormis ceux qui envoient des invitations à certains joueurs, ne choisissent pas ceux qui participent à leur événement. Mais le problème pour des joueuses comme Kimberley est le suivant : il est interdit de s’inscrire à la fois en WTA et en ITF, ce qui engendre une série de difficultés. "Pour le moment, je continue sur les ITF parce que c’est assez difficile à planifier. Si je veux jouer des WTA, je dois m’inscrire à la dernière minute, et ça me bloque une semaine, où je ne peux pas m’inscrire en ITF. Si je m’inscris dans les deux tableaux, j’ai une grosse amende, qui n’est pas facile à assumer pour moi. Ce n’est pas facile d’établir un programme dans ces conditions".

Un programme très chargé pour elle. Zimmermann dispute entre 30 et 35 tournois par an. Lorsqu’elle n’est pas en période de compétition, elle s’entraîne jusqu’à 6 heures par jour. Elle prévoit aussi une période par an dédiée à la préparation foncière, axée sur le physique, généralement programmée en début de saison. Lorsqu’elle est en tournoi, elle ne travaille « que » quatre heures pour éviter de monter sur le court avec de la fatigue. C’est le prix à payer pour être performant.

A côté de ses matchs en simple, Zimmermann continue à jouer dans les tableaux du double. Elle y compte déjà trois demi-finales cette saison. Une saison qui s’est ouverte sur ce qui était sans doute la meilleure expérience de sa carrière : une participation aux qualifications d’un grand-chelem, en l’occurrence l’Open d’Australie.


Un monde de différence


Débarquer à Melbourne était inespéré pour Zimmermann, qui figurait dans la liste des remplaçants. Une série de forfaits plus tard, la Belge était appelée d’urgence pour tenter sa chance aux qualifications. Elle y a découvert un tout autre monde. "Je n’avais jamais vécu ça, je n’avais même jamais joué un seul tournoi WTA, donc passer d’un petit ITF à un grand-chelem, c’était quelque chose d’incroyable", précise d’ailleurs la protégée de l'Adeps. "Tout est super bien organisé, avec beaucoup de facilités et des infrastructures sublimes par rapport à ce que je vois d’habitude. C’est ce qui m’a le plus impressionnée. Voir les grands joueurs se balader dans les couloirs, c’est aussi assez surprenant".

Une expérience qui la renforce dans son rêve de devenir une grande joueuse. "On se dit que ce serait bien si ça pouvait être comme ça toutes les semaines, mais la semaine d’après, tu te retrouves dans un tournoi à Singapour où il n’y a même pas de navette pour aller du club à l’hôtel. Après il faut savoir faire la part des choses et se dire que je ne suis pas encore à ce niveau-là et que ça se mérite d’accéder à ces infrastructures", précise la joueuse de 23 ans, la tête sur les épaules.

Battue au premier tour au terme d’un match où elle n’a pas pu cacher sa crispation, Zimmermann ne retient que du positif de cette expérience. Elle s’est prouvée, selon elle, qu’elle pouvait, par moment, avoir le niveau suffisant pour croire en une accession à la WTA, voire même aux grand-chelems.

"Le niveau, sur certains matchs, je peux l’avoir. Je me le suis déjà prouvé en battant des filles mieux classées que moi", nous explique-t-elle, avant de nuancer son propos. "Après, il faut réussir à atteindre ce niveau sur plus de matchs et c’est ce que je vais essayer de faire si j’ai l’occasion de jouer encore en qualifications en grand-chelem. Je vais aussi pouvoir me servir de mon expérience en Australie pour être un peu plus relâchée".

La Belge ne sera sans doute pas sélectionnée à Roland Garros, où le tableau des qualifications est encore très restreint. Elle n’y est d’ailleurs que… 25ème remplaçante. En revanche, elle pourrait être de la partie pour Wimbledon. "A Wimbledon, comme en Australie, il y a 128 places à prendre, donc j’espère que ça ira", nous explique-t-elle, sourire aux lèvres. C’est tout ce qu’on lui souhaite.


L'expérience australienne, un moment marquant pour Zimmermann.


Jouer sous la pression des parieurs


Revenons à nos moutons. Kimberley Zimmermann continuera à jouer en ITF cette saison. Un circuit sur lequel de nombreux problèmes liés aux parieurs ont déjà été signalés. De nombreuses personnes rôdent en effet à côté des terrains pour parier sur certains résultats. Ils espèrent maximiser leurs profits en s’attaquant à des joueuses sans défense, des proies faciles à insulter lorsque son pari s’avère perdant.

Une pression supplémentaire ? Pas pour notre compatriote, qui a, elle aussi, déjà subit les insultes de ce genre de personnage. "On reçoit des messages d’insulte, j’en ai encore reçu un assez marrant il n’y a pas longtemps. On en reçoit quasiment à chaque match perdu, même parfois quand on gagne", avoue-t-elle. "Parfois ils insultent même les deux joueuses… J’essaie de ne pas leur donner trop d’importance, ce sont des gens qui parient parce qu’ils n’ont rien d’autre à faire… Peut-être que ça les fait marrer d’insulter les gens, mais au final, ça vient de personnes que je ne connais pas du tout, donc ça ne me touche pas vraiment".

Ce n’est évidemment pas le cas de tout le monde. Pour expliquer ce phénomène, il faut préciser que l’ITF a récemment signé un contrat important avec une société spécialisée dans les paris sportifs. Pour autant, le circuit devrait rapidement être mieux encadré afin d’éviter que ces paris ne pourrissent le jeu des différents joueurs. 

A cette pression extérieure se rajoute celle des sacrifices qui accompagnent la vie d’une joueuse professionnelle. La vie privée passe au second plan, l’athlète devant se concentrer avant tout sur sa carrière. "La vie privée, ce n’est pas facile. Heureusement, mon copain est lui aussi dans le monde du tennis. Je pense que c’est important d’avoir une famille et des proches qui comprennent. Je suis vraiment super bien entourée, tout le monde m’aide et  essaie de m’encourager le mieux possible», explique Kimberley, qui essaie toujours de goupiller ses horaires.

"Quand je reviens en Belgique, j’essaie de combiner un peu les deux, avec ma famille et le tennis. Je prends quelques jours de repos, j’essaie de me ressourcer. Après, je dois m’entraîner parce que ça fait partie des exigences de ce métier. Il y a des sacrifices à faire, mais je l’ai décidé, donc je l’assume".

Justement, le métier de joueur ou joueuse de tennis n’est pas le plus rentable. Actuellement, Kimberley Zimmermann ne gagne pas d’argent, où alors très peu. Soutenue par l’Association Francophone de Tennis et l’ADEPS, elle parvient juste à couvrir les frais liés à sa carrière (entraîneur, déplacements, logements…). Il faut atteindre le plus haut niveau pour vivre du tennis. "Je ne gagne pas d’argent pour le moment, mais au moins mes frais sont pris en charge. Je peux me concentrer sur le tennis sans avoir d’autre boulot à côté", nous précise-t-elle.

Il lui faudra quelques prouesses, si possible médiatisées, pour taper dans l’œil des sponsors, source de revenus colossale pour les joueuses. Sportivement, il lui sera sans doute impossible de percevoir un vrai salaire avant d’avoir atteint le circuit WTA et d’y évoluer à un bon niveau. Le monde du tennis est très concurrentiel, les places sont chères. Il faut se battre pour en vivre…


Elise Mertens et la Fed Cup en guise de locomotives


La carrière de Kimberley Zimmermann ne devrait pas tarder à décoller, tant les qualités de la joueuse sont évidentes, notamment sa puissance physique. Mais pour progresser, il faut s’avoir s’inspirer des meilleures.

Pour cela, Zimmermann compte sur Elise Mertens. La numéro un belge est un exemple de persévérance qui tire le tennis belge vers le haut. "C’est une locomotive, ça crée une bonne dynamique », explique Zimmermann. "Elle est de la même année que moi. C’est motivant de se dire que je peux aussi peut-être y arriver, ça donne de la motivation".

Pour autant, Kimberley Zimmermann refuse d’entrer dans le jeu des comparaisons. Elle espère atteindre le niveau de Mertens, actuellement 20ème joueuse mondiale, mais elle refuse de se mettre la pression. "Arriver à ce niveau ? J’y crois, sinon il ne faut pas jouer au tennis", affirme la Belge. "Je ne me battrais pas comme je le fais si je n’avais pas un objectif, celui d’arriver dans le top 100 ou le top 50. Mais c’est sûr qu’il faut y aller pas à pas. J’essaie de me fixer des objectifs réalistes en fonction de ma progression. C’est comme ça que je pense y arriver", explique-t-elle.


Kimberley Zimmermann fait partie du groupe belge en Fed Cup.

Et Kimberley a le temps. Le circuit tennistique se caractérise par des apparitions de plus en plus tardives sur le circuit WTA. Les joueuses jouent de plus en plus longtemps. A 23 ans, Zimmermann est encore une jeune joueuse dans ce milieu. Il faut donc lui laisse le temps de progresser.

Et pour progresser, elle peut aussi compter sur la Fed Cup, que la Belgique dispute chaque année. Zimmermann fait partie du groupe élargi, composé de 8 joueuses, titulaires comprises. Elle y côtoie le gratin du tennis féminin national, participe aux entraînements et aux séances d’information. Elle ne dispute pas de matchs si aucune titulaire ne déclare forfait. "C’est motivant pour moi de pouvoir être prise dans le groupe large. Je serais honoré de pouvoir représenter mon pays, et je suis fière d’être déjà un peu inclue dans ce groupe-là", explique Zimmermann, émue au moment d’aborder ce sujet.

La carrière d’une joueuse peut être longue. Le tennis belge compte plusieurs espoirs, dont Kimberley Zimmermann. Sérieuse, travailleuse, prudente mais réaliste, elle semble avoir ce qu’il faut pour atteindre le haut niveau. Il faut juste lui laisse du temps. Avec l’espoir de pouvoir, dans quelques années, réécrire ce portrait en changeant la mention « espoir » qui accompagne le nom de Kimberley Zimmermann. 

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