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L'horizon judiciaire se noircit à nouveau pour Bernard Sainz, le "Docteur Mabuse" du cyclisme

Il dénonce un "piège" mais le "Docteur Mabuse" du cyclisme risque à nouveau le tribunal: le parquet de Paris a requis un procès contre Bernard Sainz, épinglé en 2016 par une caméra cachée en train de dispenser des conseils de dopage, ce qu'il réfute.

Si le juge d'instruction suit les réquisitions du parquet de Paris, datées du 6 septembre, le praticien de 76 ans, officiellement à la retraite, comparaîtrait pour aide ou incitation au dopage, "aide ou incitation de sportif à l'utilisation de substances ou méthodes interdites", "exercice illégal de la profession de médecin" et de "pharmacien", a appris vendredi l'AFP de sources concordantes.

De son côté, celui qui a toujours réfuté, malgré une récente condamnation, toute implication dans le dopage et se définit comme un spécialiste en homéopathie et médecines naturelles, a voulu contre-attaquer sur le plan judiciaire en déposant une plainte contre l'émission Cash Investigation, à l'origine de ses nouveaux ennuis, a précisé son avocat, Me Hector Bernardini.

En juin 2016, l'émission d'Elise Lucet, en collaboration avec Le Monde, révélait que loin d'être rangé des vélos, Sainz continuait à prodiguer ses conseils à ceux qui le sollicitaient. Ainsi, pouvait on voir l'ancien directeur sportif attablé dans une brasserie parisienne divulguer ses codes de prescription à un coureur, "vitamine D" pour le corticoïde "diprostène" (interdit en compétition), ou la plante thérapeutique "chelidonium" pour dire "clenbuterol", un puissant agent anabolisant. Dans un autre passage, il conseillait aussi des prises d'EPO, avant de fixer des tarifs, selon les gains remportés.

- Déjà condamné -

Un flagrant délit ? L'avocat du naturopathe assure qu'il s'agit plutôt d'un traquenard, orchestré selon lui par des journalistes et quelques revanchards du cyclisme. "On a travesti le sens de ses propos" à coups de provocations et en coupant au montage, assure son avocat. "C'est une machination", poursuit Me Bernardini, qui assure que les passages où le praticien recommande de ne plus se doper ou de diminuer les doses pour supporter un sevrage ont été supprimés.

La plainte de Bernard Sainz, enregistrée au parquet de Paris le 16 octobre, vise notamment des faits "d'escroquerie aggravée, association de malfaiteurs, atteinte à la vie privée et au droit à l'image" et "violation du secret des correspondances numériques". Elle est déposée contre Elise Lucet et l'équipe ayant réalisé le reportage, ainsi que Le Monde.

Ancien coureur amateur, présent dans le milieu du cyclisme depuis qu'il a intégré comme directeur sportif adjoint l'équipe Gan Mercier, où les vedettes s'appelaient Raymond Poulidor et Cyrille Guimard, Bernard Sainz entretient depuis longtemps la réputation d'un gourou -- d'où son surnom -- flirtant sans cesse avec les limites mais profitant de ses bonnes relations dans le peloton.

Sur son site, il met en avant les soins qu'il a prodigués à Poulidor, Guimard, ou encore Bernard Thévenet, double vainqueur du Tour de France (1975, 1977). Plus tard, il avait aussi côtoyé le Français Philippe Gaumont, convaincu de dopage et mort à 40 ans après un accident cardiaque, ou Frank Vandenbroucke, l'enfant terrible du cyclisme belge, décédé à 34 ans après une carrière marquée par les affaires de dopage et de drogue.

Présent aussi dans le monde hippique, Sainz n'en est pas à ses premiers ennuis judiciaires.

Après plusieurs procès, il avait été condamné en 2014 en appel à Paris à deux ans de prison dont vingt mois avec sursis, notamment pour incitation au dopage et exercice illégal de la médecine, dans une affaire qui avait éclaboussé le milieu cycliste dans les années 90.

Plus récemment, la cour d'appel de Caen lui a infligé 12 mois de prison avec sursis et 2.000 euros d'amende, le 27 février 2019, dans une autre affaire dans le milieu semi-pro et amateur. Des témoins directs et une série de témoins indirects, tous coureurs cyclistes, l'accusaient d'avoir dicté des protocoles de prise d'EPO, d'hormones de croissance et de testostérone, entre juillet 2008 et novembre 2010.

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