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La corrida en France, une tradition de près de 170 ans qui résiste

Tradition venue d'Espagne, la première corrida (ou "course de taureaux") en France eut lieu en août 1853 à Bayonne, en l'honneur d'Eugénie de Montijo, l'épouse d'origine andalouse de Napoléon III, qui y passait ses vacances.

Selon l'historien Bartolomé Bennassar, auteur d'une "Histoire de la tauromachie" qui fait référence, si la corrida s'est pérennisée dans le sud de la France, c'est qu'elle se basait sur des "traditions locales" plus anciennes incluant des jeux taurins.

"D'une part, la tradition landaise, qui s'étendait jusqu'au Gers et au Pays basque, et d'autre part la tradition camarguaise, existante dans toute la zone du delta du Rhône", avait expliqué il y a quelques années à l'AFP ce grand spécialiste d'histoire et de culture espagnole.

Les courses landaises et camarguaises sont des jeux taurins populaires qui ne prévoient pas la mise à mort de l'animal, contrairement à la corrida où le taureau meurt s'il perd le combat face à l'homme, sauf à être gracié pour sa vaillance.

Au cours de la IIIe République, des corridas sont organisées dans ces régions, contre parfois l'avis des autorités. Ainsi, à Nîmes en 1894, bien qu'interdite, une corrida est donnée avec le soutien du poète Frédéric Mistral, prix Nobel de littérature, "au nom des libertés méridionales", raconte M. Bennassar.

Puis une sorte de "modus vivendi" se met en place, les tribunaux se prononçant généralement en faveur des organisateurs, dès lors qu'étaient respectées les zones dites "de tradition taurine".

- Du "pays d'Arles au "pays basque" -

La corrida est légalement autorisée depuis 1951 dans une dizaines de départements du Sud de la France où elle représente une "tradition locale ininterrompue".

A ce titre, elle bénéficie d'un régime dérogatoire (article 521-1) alors que le code pénal punit de trois ans d'emprisonnement et de 45.000 euros d'amende les "sévices graves" et "actes de cruauté" infligés aux animaux, des peines portées à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende en cas de mort de l'animal.

Dans un arrêt d'avril 2020, la cour d'appel de Toulouse a considéré qu'il "ne saurait être contesté que dans le Midi de la France entre le pays d'Arles et le pays basque, entre garrigue et Méditerranée, entre Pyrénées et Garonne, en Provence, Languedoc, Catalogne, Gascogne, Landes et Pays Basque existe une forte tradition taurine".

Inscrite en 2011 à l'inventaire du patrimoine culturel immatériel de la France, ce qui avait poussé plusieurs organisations anticorrida à former des recours juridiques, la corrida avait finalement été retirée de la liste publiée en ligne.

La corrida est régulièrement visée par des projets de loi qui cherchent à l'interdire mais aucune initiative n'a obtenu de majorité.

Le Conseil constitutionnel, plus haute juridiction française, l'a jugée "conforme" à la Constitution, rejetant en septembre 2012 le recours d'associations de défense des animaux militant contre la tauromachie.

La France est l'un des huit pays du monde où des corridas sont encore organisées avec l'Espagne, le Portugal, la Colombie, le Mexique, l'Equateur, le Pérou et le Venezuela, parfois avec des restrictions.

Une centaine de corridas sont organisées chaque année, "ce qui représente moins de 1.000 toros" tués par an, a indiqué à l'AFP André Viard, président de l'Observatoire national des cultures taurines (ONCT).

"Ce nombre est constant depuis plus de quinze ans, après une baisse de 10% au moment de la crise financière de 2007/2008", a-t-il ajouté, précisant qu'en 2022, "environ 435.000 entrées" avaient été enregistrées, soit "une augmentation par rapport à 2019, bien que certaines grandes arènes aient dû respecter des jauges".

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