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"Toute ma vie est une surprise": la mezzo-soprano Marine Chagnon ne savait même pas que "chanteuse lyrique, c'était un métier". Mais le hasard a fait de son passe-temps une carrière, jusqu'à sa nomination comme révélation lyrique aux Victoires de la musique classique.
Enfant, elle dansait et chantait "tout le temps". Alors, "à 11-12 ans, ma mère a eu l'idée de me mettre à la chorale du conservatoire à Dijon", se rappelle-t-elle lors d’un entretien avec l’AFP. Mais c'est plus du Fugain que du classique qu'elle entonne. "Je ne connaissais rien à l'opéra".
Le destin a cependant voulu que sa chorale devienne le chœur des enfants de l'Opéra de Dijon. Vers 14 ans, l'ado chante dans Carmen, Tosca, La Bohème... "Je trouvais ça génial: ça alliait tout ce que j'aimais: la danse, le théâtre, le chant. Je suis devenue addict".
Mais il ne s'agissait encore que d'un loisir: son grand-père est certes chef d'orchestre symphonique à Paris, mais son influence est nettement moins grande que sa mère dijonnaise, éminente chercheuse en toxicologie alimentaire.
"J'étais sur une autoroute vers la médecine. Je ne savais même pas que chanteuse lyrique, c'était un métier", se souvient-elle.
Jusqu'au jour où, alors qu'elle avait 16 ans, une amie la supplie de participer avec elle au concours du conservatoire de Dijon, qu'elle emporte: "Une surprise, comme toute ma vie".
Quand elle décroche son bac S, elle se dit donc que, "peut-être", elle pourrait faire du chant un an à Paris. "Et si ça ne marche pas, je vais en médecine".
La provinciale "débarque" alors dans la capitale, brigue tous les concours des conservatoires d'arrondissement et les réussit tous. Elle se présente au Diplôme d'études musicales et le décroche à 20 ans, dont un an en Erasmus à la Musik Hochschule de Stuttgart.
- "Le syndrome de l'usurpateur" -
Mais son Graal, c'est le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris (CNSMD) où elle aimerait suivre les cours d'Élène Golgevit, chanteuse émérite et coach vocale. "Elle est dans le travail, j'aime ça. Je suis une bosseuse".
Elle aura besoin de toute sa combativité pour réussir le concours du Conservatoire et ce n'est qu'à la quatrième tentative qu'elle le décroche, à 24 ans. Après cinq ans à construire son "instrument", elle est prise à la prestigieuse Académie de l’Opéra de Paris - "encore une surprise".
"Ca m'a propulsée à un endroit que je ne soupçonnais pas du tout: un mois après mon arrivée, on me proposait de chanter dans Rigoletto à l’Opéra Bastille, puis le rôle-titre dans Popée pour 15 dates!", dit la jeune femme à l'épaisse chevelure rebelle.
"J'avais le syndrome de l'usurpateur. C'était un peu comme si j'avais fait une blague et que ça prenait. Mais je me suis rendu compte que seule moi n'y croyait pas".
La jeune artiste à l'allure frêle décide alors de combattre son manque de confiance avec "un coach mental et de l'hypnothérapie". "Ca m'a permis de calmer mon stress et de faire de mon mieux, simplement", se dit-elle aujourd'hui, à tout juste 30 ans. "Et on verra bien ce qui se passe".
Ainsi en est-il de son éventuel sacre aux Victoires de la musique classique, qui se tiendront mercredi à Dijon. "C'est encore une énorme surprise. Chez moi, à Dijon, et sur la scène où j'ai découvert l'opéra. Comment la gamine de 12 ans que j'étais aurait-elle pu imaginer ça?"