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10e journée électrique de manifestations contre la réforme des retraites en France: tensions et heurts en fin de cortège à Paris

Quelque 740.000 manifestants ont défilé ce mardi en France, dont 93.000 à Paris, pour la 10e journée de mobilisation contre la réforme des retraites, marquée par une baisse de la participation.

Des dégradations et heurts avec les forces de l'ordre ont émaillé mardi à Paris la tête du cortège contre la réforme des retraites, même si le défilé a été plus calme que lors de la précédente manifestation. Les incidents ont notamment eu lieu boulevard Voltaire, peu avant l'arrivée du cortège intersyndical place de la Nation, terme de son parcours dans la capitale.

Des personnes, pour certaines vêtues de noir et visages masqués, ont pillé un commerce, allumé des feux de poubelles, dégradé du mobilier urbain et jeté des projectiles en direction des forces de l'ordre. Ils étaient plusieurs centaines.

Les forces de l'ordre ont chargé et tiré des grenades de gaz lacrymogène pour "disloquer" "le bloc", permettre "l'intervention des pompiers" et "faciliter la progression du cortège", a indiqué la préfecture de police de Paris (PP).

Selon un dernier bilan communiqué par la préfecture, 55 personnes ont été interpellées et 10.000 contrôles ont eu lieu autour de la manifestation.

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D'autres incidents se sont produits place de la Nation lors de la dispersion de la manifestation vers 19h00 avec des jets de pavés et bouteilles sur les forces de l'ordre qui ont tiré de nombreuses grenades lacrymogène en retour.

A 20h30, le calme était revenu sur la place, où il ne restait plus que quelques dizaines de manifestants.

Plusieurs blessés 

Une femme blessée a été prise en charge par les secours. Et au moins quatre autres personnes ont été prises en charge par des "street medics" (secouristes volontaires). Plusieurs pour des blessures à la tête et un, qui portait un brassard presse, pour une blessure superficielle à la jambe.

Selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, 13.000 policiers et gendarmes - dont 5.500 à Paris - ont été mobilisés pour la 10e journée de protestation contre la réforme des retraites, un dispositif qu'il a qualifié d'"inédit".

 

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A Nantes, une agence bancaire a également été incendiée et le tribunal administratif visé, tandis qu'à Rennes ont eu lieu de nombreuses dégradations. Des tensions ont aussi été recensées à Dijon ou à Toulouse où les forces de l'ordre ont fait usage d’un canon à eau. Strasbourg, Besançon et Nancy ont aussi connu des échauffourées. 

Moins nombreux dans la rue 

Globalement, les opposants à la réforme des retraites étaient moins nombreux dans la rue ce mardi pour cette dixième journée d'action à l'appel des syndicats qui ont réclamé une "médiation", rejetée par le gouvernement 

Cinq jours après un sursaut terni par de nombreux débordements, les premiers chiffres des autorités comme des syndicats attestaient d'une participation en repli, comme à Bayonne (6.500 à 13.000), Montpellier (10.000 à 20.000) ou Clermont-Ferrand (11.000 à 40.000). Le reflux, manifeste, a été confirmé par le numéro un de la CFDT, Laurent Berger, qui depuis la tête de cortège parisien a fait état d'une baisse de l'ordre de 20%.

Présent dans le cortège parisien - fort de 450.000 manifestants, selon la CGT, soit près de deux fois moins que le 23 mars (800.000 de même source)- , l'insoumis Jean-Luc Mélenchon a appelé au "sang froid", affirmant que la France "ne se mène pas à coup de trique".

"Fin de non-recevoir"

Pour sortir de l'impasse, le numéro un de la CFDT Laurent Berger a proposé mardi "une voie de sortie" par le biais d'une "médiation" pour trouver "un compromis social". Solution aussitôt écartée par le gouvernement: "On n'a pas forcément besoin de médiation pour se parler", a déclaré son porte-parole Olivier Véran, alors que la veille Emmanuel Macron avait dit vouloir "continuer à tendre la main aux forces syndicales" mais sur d'autres sujets que les retraites.

"Ca va commencer à suffire, les fins de non recevoir", a réagi M. Berger depuis la tête du cortège parisien, pointant une réponse "insupportable".

Le dirigeant du premier syndicat de France a toutefois reçu l'appui inattendu des députés MoDem, membres de la majorité présidentielle. "C'est bien d'avoir une ou deux personnes pour essayer de retrouver le dialogue et avoir un certain recul", a déclaré leur président Jean-Paul Mattei.

"Sortir par le haut" 

La situation reste pour l'heure bloquée, en attendant la décision du Conseil constitutionnel qui doit se prononcer sur le projet de loi d'ici à trois semaines."Si le gouvernement veut sortir par le haut, il faut qu'il suspende la réforme. Plus il attend, plus ça va être compliqué", a estimé le secrétaire général de FO Frédéric Souillot, promettant, à l'unisson des autres responsables syndicaux, la poursuite des grèves et des mobilisations.

Sur le terrain, l'opposition à la réforme reste vive. Dans le cortège toulousain, Paul Castagné, 26 ans, doctorant en écologie dénonce "une réforme injuste menée avec beaucoup trop d'autorité". "J'ai l'impression que ce que cherche le gouvernement c'est laisser pourrir la situation, et jouer sur la lassitude des gens", dit-il.

La circulation des trains était perturbée, avec trois TGV sur cinq et un TER sur deux en moyenne selon la SNCF. A Paris, Lorient et Marseille, des manifestants ont envahi les voies ferrées.

La Tour Eiffel était aussi fermée, comme l'Arc de Triomphe ou le château de Versailles.

En revanche, du côté des déchets qui se sont amoncelés à Paris (encore 7.000 tonnes mardi), la CGT a annoncé la suspension de la grève des éboueurs et du blocage des incinérateurs à partir de mercredi mais "afin de repartir plus fort" ensuite.

Si les enseignants étaient moins mobilisés (8% de grévistes selon le ministère), des dizaines de blocages d'universités, de lycées et même de collèges ont été recensés, d'Avignon au Havre, de Lille à Bordeaux.

"Je suis encore très jeune mais la réaction du gouvernement, le 49.3, le fait de voir que le peuple n'est pas écouté, c'est ça qui m'a donné envie de me battre", a expliqué Siméon Ronzier, 20 ans, dans le cortège lillois.

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