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Le spécialiste de l'ameublement Conforama, déjà en difficulté avant la crise du coronavirus, a vu sa situation s'aggraver pendant le confinement au point que sa survie est désormais menacée selon les syndicats, tandis que son concurrent But nourrit des "projets d'alliance" avec lui.
Haro sur BNP Paribas: les syndicats de Conforama ont accusé la banque ce week-end de faire risquer la faillite à l'enseigne, qui compte plusieurs milliers de salariés en France et dont dépendent environ 20.000 emplois chez fournisseurs et fabricants.
Pourquoi? "Confo" a récemment sollicité un prêt garanti par l'Etat (PGE), dispositif mis en place pour soutenir les entreprises touchées par la crise sanitaire, auprès du Comité Interministériel de Restructuration Industrielle (CIRI). Mais BNP se montre réticente à prêter à l'enseigne, Force ouvrière dénonçant un "désengagement qui ne veut pas dire son nom".
- "jours de survie" -
La BNP a répondu le même jour à l'AFP n'être "pas la banque de Conforama France", et assuré que "si un nouveau projet industriel et commercial, de long terme et mobilisant les actionnaires actuels ou de nouveaux actionnaires, devait se dessiner, (elle) l'examinerait".
"La BNP est l'une des principales banques de Conforama", confie pourtant une source proche du dossier à l'AFP. Or, le distributeur aurait bien besoin de cet argent liquide, selon les représentants du personnel. Sans intervention de l'Etat, "il n'est question que de jours de survie...", estime CFE-CGC.
Or l'entreprise avait déjà annoncé en juillet la fermeture de 42 magasins (enseignes Conforama et Maison Dépôt), ainsi que 1.900 suppressions de postes sur 9.000.
Contrôlée depuis 2011 par un actionnaire sud-africain, Steinhoff, elle a mis en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) homologué le 27 février mais qui "ne pourra être financé si le prêt n'est pas accordé", s'inquiète la fédération CGT du commerce et des services.
A l'heure actuelle, les problèmes de trésorerie perturbent la réouverture des magasins post-confinement: seule une vingtaine sur les quelque 160 encore en activité accueillent le public depuis lundi "afin de tenir le plus longtemps financièrement", selon la même source proche du dossier.
En outre, Conforama, ayant "une politique d'achat favorisant l'assortiment en provenance de l'industrie française, est un client important pour ses fournisseurs français", pointe auprès de l'AFP l'Ameublement français, l'organisation professionnelle des acteurs de la fabrication d'ameublement.
Ces industriels seraient par conséquent "fragilisés par la disparition de cet acteur, ou par une concentration de la distribution qui ne serait pas assortie de garanties sérieuses pour les fabricants français", ajoute-t-il.
- "alliance" -
Car les malheurs de Conforama donnent des envies d'union au concurrent But, qui revendique la deuxième place sur le marché, derrière le géant suédois Ikea. Son PDG Alexandre Falck a évoqué auprès de l'AFP un "projet d'alliance de deux marques qui vivraient et seraient en saine concurrence sur le marché, pour qu'elles puissent continuer à se développer toutes les deux".
Ce projet se ferait "sous conditions", détaille-t-il. "OK pour reprendre les magasins, le personnel et les outils logistiques, OK pour payer les fournisseurs car ce sont les mêmes que les nôtres et on a besoin qu'ils survivent". En revanche, But "ne mettra pas un sou pour assurer les retours sur investissements exorbitants qui avaient été prévus par les créanciers".
But "cherche à profiter de la situation de blocage", rétorque la même source proche du dossier. "Ce qui les intéresse, ce n'est que certains actifs et non l'ensemble de l'activité et des salariés".
Une chose est sûre, le secteur commence à donner de sérieux signes de faiblesse: au mois de mars, l'activité de la distribution d'ameublement domestique a ainsi chuté de 51,6% selon l'Institut de prospective et d'études de l'ameublement. Et en avril, le repli est estimé à 80%.
Avec une première victime: l'enseigne Alinéa, qui emploie près de 2.000 salariés, a été placée le 13 mai en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Marseille.
mpf-lrb-ls-cda/tq/eb