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Le gouvernement décide de maintenir le nucléaire en Belgique

Le Comité ministériel restreint du gouvernement fédéral s'est mis d'accord vendredi soir sur la prolongation de deux réacteurs nucléaires au-delà de 2025. Un plan pour assurer une plus forte indépendante énergétique, intégrant les énergies renouvelables, a été annoncé.

Un conseil des ministres restreint a eu lieu ce vendredi. Le Premier Ministre et ses Vice-Premiers ministres ont décidé de l’avenir du mix énergétique en Belgique. Autrement dit: voir comment faire évoluer les différentes sources d’énergie qui nous permettront de produire suffisamment d’électricité pour les besoins de la population et des entreprises dans notre pays.

Parmi les sujets sensibles: la prolongation ou non de la durée de vie de certaines centrales nucléaires, au-delà de la date de sortie prévue de 2025. Le gouvernement fédéral a finalement pris la décision de maintenir le nucléaire. Deux réacteurs nucléaires seront prolongés dès 2025 pour une période de dix ans. Il s'agit de ceux de Doel 4 et de Tihange 3.

1,08 milliard d'euros sera utilisé pour mener des audits énergétiques, l'isolation des abris d'urgence et réduire la TVA à 6% sur la démolition/construction de bâtiments. Enfin, le plan n'est pas totalement financé par l'Etat et prévoit une mobilisation de l'épargne des citoyens via des "green bonds" (obligations vertes) et des partenariats privés.

"Nous avons pu prolonger les deux centrales. Donc le plan B est activé. Nous avons pu surtout permettre à la Belgique d'avoir suffisamment d'électricité jusqu'en 2035. Le pragmatisme est de mise. On a pu trouver une solution qui permet de sortir de cette impasse", a déclaré David Clarinval (MR), ministre des PME et des Indépendants, à la sortie de la réunion.

Ce que nous faisons, c'est sécuriser le présent et investir dans le futur

"Trop longtemps, notre pays a manqué cette vision sur l'énergie", a déclaré le Premier ministre Alexander De Croo durant la conférence de presse qui a suivi la réunion. "Le plan qu'on a sur la table aujourd'hui remédie à ce manque de vision. C'est une vision claire qui explique pour notre pays comment on veut s'organiser entre maintenant et 2050. Il fera de notre pays un moteur dans la transition énergétique".

Même si l'attention se concentrait surtout sur la prolongation ou non du nucléaire, Alexander De Croo a rappelé que la discussion sur l'énergie est plus large. "La décision qu'on prend ici va beaucoup plus loin et détaille comment on assure une autonomie énergétique. Comment on assure un plan d'énergie et un plan économique qui va derrière", a-t-il affirmé. "Ce que nous faisons, c'est sécuriser le présent et investir dans le futur. On ne part pas de zéro. Ce que nous décisions aujourd'hui par rapport au virage vers le renouvelable, c'est qu'on accélère".

On ne signera pas à tout prix avec Engie

"Il fallait trouver une réponse par rapport aux enjeux énergétiques de la Belgique. Nous accélérons la transition, la voie vers l'indépendance énergétique avec un tas de décisions règlementaires et budgétaires qui nous permettront de développer l'éolien, le photovoltaïque et de mieux isoler les maisons. Et puis nous prenons une décision nécessaire sur le mix énergétique, vu la guerre en Ukraine, vu la volonté d'accélérer l'électrification, et vu la situation en France qui ne peut pas nous fournir autant d'énergie électrique dans les années futures qu'on s'y attendait", a pour sa part déclaré Georges Gilkinet (Ecolo), vice-Premier ministre fédéral et ministre de la Mobilité.

Ces décisions doivent encore être confirmées par un accord avec Engie. "On va commencer à négocier avec Engie. Il y a eu des discussions avec la ministre de l'Energie et le Premier ministre. Engie attend un signal pour commencer des négociations. On l'a dit, on ne signera pas à tout prix avec Engie. J'espère qu'on pourra trouver un accord correct", a indiqué Georges Gilkinet. Quant à savoir si Engie était prêt à prolonger les centrales, le ministre a répondu qu'il fallait poser cette question à l'entreprise.

Van der Straeten négociera avec Engie la prolongation de deux réacteurs pour dix ans

Le gouvernement a donné vendredi mandat à la ministre de l'Énergie, Tinne Van der Straeten, de négocier avec le groupe Engie la prolongation de deux réacteurs nucléaires pour une durée de dix ans. Cette prolongation n'offrant pas de solution pour l'hiver 2025, le Mécanisme de Rémunération de Capacité (CRM) sera mis en œuvre comme prévu.

L'arrêt définitif était presque acquis avant la guerre en Ukraine

Rappelons qu'en décembre, le gouvernement avait presque tranché en faveur de l’arrêt définitif des centrales, se donnant juste une clause de rendez-vous pour régler une histoire de permis de construction d’une centrale à gaz. 

Depuis lors, la Vivaldi a peu à peu renversé la vapeur. D’abord trois des quatre partis flamands, émus par les tensions montantes entre Russie et Ukraine, les Russes étant un grand fournisseur de gaz en Europe. Puis les écologistes et le PS résignés, après le début de la guerre en Ukraine.

Aujourd’hui, il y avait donc peu de suspense sur le plan politique, sur la volonté de prolonger des réacteurs, tout juste y avait-il débat sur le nombre (2 comme le voulaient les écologistes et comme le mentionnait l’accord de gouvernement, ou davantage comme le prônait le MR, ce que le Premier Ministre n’excluait pas).

La prolongation de deux réacteurs (Tihange 3 et Doel 4) jusqu’en 2035 doit permettre la production annuelle de 2GigaWatt. Mais elle implique la construction de deux centrales à gaz (turbine vapeur), pour assurer une production suffisante d’électricité.

Des questions

Pourtant, même si la question semble tranchée sur le plan de la volonté politique, cette prolongation pose une série de questions techniques, difficile à résoudre: notre pays a-t-il encore matériellement le temps, d’organiser toutes les consultations publiques nécessaires, études d’incidences, changement de loi, garanties de sécurité, négociation avec la commission européenne, négociation financière avec Engie, d’ici 2025, date prévue de l’arrêt des centrales ?

La réaction d’Engie reste d’ailleurs une inconnue majeure dans ce dossier. L’énergéticien avait en effet demandé une réponse définitive sur l’avenir du nucléaire, estimant que ce genre de décision réclame 5 ans de mise en place.

Les éoliennes en mer, sur terre, le solaire… représentent par ailleurs actuellement un cinquième de l’électricité produite en Belgique. Le gouvernement va examiner la possibilité d’augmenter cette part et accélérer la transition énergétique.

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