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Salah Abdeslam est au cœur du procès des attentats de Bruxelles qui a commencé depuis quelques semaines. Depuis son arrestation en 2015, le Bruxellois fait énormément parler de lui. Le dernier survivant du commando des attentats de Paris utilise tout ce qu'il peut pour déstabiliser le procès dans lequel il est engagé.
"Il est clair qu’un procès d’assises, c’est un jeu de pouvoir entre les différents acteurs de ce procès", décortique Michaël Dantinne, professeur à l'Université de Liège au département de Criminologie, Droit et Science politique. "Lorsqu’on est accusé, on part dans une position d’infériorité. Il a compris qu’il lui restait une parcelle de pouvoir pour peser sur les débats et la manière dont ils se déroulent. On l’a vu pendant le procès de Paris et on le voit ici, cette dynamique de pouvoir a commencé avant même le début du procès avec l’histoire du box des accusés et elle continue avec les conditions de transfert depuis la prison vers le palais de justice. Salah Abdeslam, comme d’autres, joue sur cette carte pour peser sur les choses. On voit qu’avec une toute petite position de pouvoir, on arrive à infléchir jusqu’à l’ordre chronologique du déroulement des débats."
Abdeslam est-il intelligent ?
Ses avocats ont parlé de l’intelligence d’un cendrier vide, en évoquant leur client. Un argument que le professeur réfute. "Je ne le perçois absolument pas comme ça. Je pense que c’est même quelqu’un d’intelligent. Il a bien cerné les logiques de pouvoir inhérents à un procès d’assises. C’est quelqu’un qui est très soucieux de son image. Quand on relit le rapport d’expertise psychiatrique qui a été dressé pour le procès de Paris, on le voit. C’est quelqu’un qui peut refuser de parler parce qu’il n’est pas en accord avec le portrait médiatique qui est fait de lui. Il maîtrise relativement bien les codes et d’assez stratège donc je pense que c’est quelqu’un d’intelligent."
Le procès des attentats de Bruxelles est "assez dramatiquement parti". "Avec des jeux de pouvoir qui ont commencé très tôt, avec la politique de la chaise vide. Je ne vois pas d’issue à cela", regrette l'expert.
"Je pense que chacun des protagonistes, quel que soit son rôle, doit faire son autocritique parce qu’il y a une décence qui est due à la mémoire des victimes et à celle de ceux qui sont encore survivantes qui n’est pas rencontrée par un début de procès qui fait vraiment désordre", conclut Michaël Dantinne.