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Censée rassembler la gauche, la primaire populaire se fissure

La primaire populaire, une initiative citoyenne qui était censée permettre l'union à gauche et renforcer la démocratie, n'en finit pas de se fracturer après la décision samedi de son conseil d'administration de soutenir Jean-Luc Mélenchon.

Initié depuis près d'un an, le processus inédit de consultation citoyenne avait suscité l'intérêt de plus de 392.000 électeurs de gauche fin janvier pour désigner le candidat le plus à même de faire l'union.

Mais leur choix de soutenir Christiane Taubira, arrivée largement en tête de la consultation, n'a pas empêché cette dernière de jeter l'éponge mercredi dernier, créditée de seulement 2% dans les sondages et faute de parrainages d'élus suffisants pour valider sa candidature.

Constatant "l'échec", le conseil d'administration de la primaire populaire a finalement annoncé samedi "soutenir et faire campagne" pour "l'Union populaire" de Jean-Luc Mélenchon qui avait pourtant violemment rejeté cette initiative citoyenne.

Une décision qui a suscité l'incompréhension d'une partie des votants à la primaire qui, sur les réseaux sociaux, ont crié à la trahison, s'étonnant que le choix ne se soit pas reporté sur l'écologiste Yannick Jadot, arrivé en seconde place de la consultation de janvier devant Jean-Luc Mélenchon mais derrière lui dans les sondages.

"La primaire populaire est devenue un gag", a ironisé Yannick Jadot samedi.

Jean-Luc Mélenchon avait assuré auparavant qu'il ne voulait "rien avoir à faire avec ces gens-là" et qu'il n'intègrerait pas leurs dépenses dans ses frais de campagne.

L'une des fondatrices et porte-parole, Mathilde Imer, a quitté le mouvement dans la foulée, expliquant que la décision du conseil d'administration ne lui semblait "pas en cohérence avec ce que nous avons construit ces derniers mois et encore moins incarner une manière différente de faire de la politique".

- "Flouées" -

Mardi, dans une tribune publiée dans le JDD.fr, 29 soutiens de ce mouvement, dont la sociologue Dominique Meda et le réalisateur et militant Cyril Dion, ont indiqué eux aussi se désolidariser.

"Ce qui a suscité notre enthousiasme et notre adhésion n'était pas que la promesse utilitaire d'un outil de conquête du pouvoir plus efficace, disruptif, c'était aussi l'engagement de promouvoir une autre manière de faire de la politique", écrivent-ils.

"Mais force est de constater que les évolutions récentes de la Primaire populaire l'ont éloignée fortement des buts originels de cette belle initiative", regrettent-ils.

Le conseil d'administration de la Primaire populaire, rassemblant "des bénévoles, groupes locaux, membres de l’équipe permanente et du bureau" explique avoir choisi de soutenir l'Union populaire "dans une logique de vote utile".

Ils ont tenté lundi soir d'expliquer leur choix, au cours d'une vision conférence.

"On est allé trop vite en communication, sans expliquer tous les tenants et les aboutissants", a admis la responsable de la communication.

Dans les échanges, les critiques étaient nombreuses: "Vous avez trompé les 400.000 votants", "une belle initiative tristement sabordée. Je suis consterné, sans violence mais avec tristesse". "Allez-vous rembourser les dons pour les personnes qui s'estiment flouées?"

"Mélenchon n’a pas accepté de participer à la Primaire Pop: comment pensez-vous passer le +mur du son+ avec un candidat qui ne reconnaît pas votre légitimité?", ont demandé d'autres électeurs.

La Primaire populaire n'était qu'une "étape" d'un processus plus large dont "l'objectif n'était pas le rassemblement, mais bien la victoire de la gauche et de l'écologie", a argumenté Victor Grezes, directeur du pôle politique.

Il a évoqué "trois options": "Soit on constate l'échec du rassemblement et c'est tout", "soit on prend le 2e choix du vote à la primaire populaire, c'est-à-dire Jadot, mais c'était un vote pour rassembler et le contexte n'est plus le même, ce n'est plus la même séquence".

Pour lui, "l'idéal aurait été de refaire un vote, mais on n'avait ni le temps, ni les moyens", a-t-il reconnu.

"La 3e option était de prendre ses responsabilités. On appelle à faire un vote utile, car c'est ça le but, faire gagner la gauche", a-t-il insisté.

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