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De Trump à Biden, opposition de styles dans la prestigieuse East Room

Donald Trump, cravate rouge, combatif, provocateur, parfois insultant.

Joe Biden, cravate bleu marine à rayures, calme, conciliant, parfois hésitant.

Du 16 février 2017 au 25 mars 2021, deux conférences de presse de début de mandat à la Maison Blanche, deux présidents de la même génération, deux styles radicalement différents.

Après quatre semaines au pouvoir, Donald Trump, novice en politique, avait laissé éclater sa frustration après des débuts chaotiques: la justice, les médias, personne n'avait été épargné par son torrent de mots.

Après neuf semaines à la présidence, Joe Biden, vieux routier de la politique, a récité sa partition sans surprises ni annonces fracassantes, dans le registre qu'il affectionne, à la fois familier et cherchant une forme de complicité avec ses interlocuteurs.

Le décor est le même: la prestigieuse "East Room", avec son imposant portrait de George Washington et ses rideaux dorés.

Les drapeaux américains sont bien sûr toujours là derrière le pupitre présidentiel, mais dès le départ, l'atmosphère est toute autre, Covid-19 oblige.

La distanciation sociale est de mise. Seule une trentaine de journalistes a eu droit à un siège. Quatre ans plus tôt, la pièce était pleine à craquer et il fallait se montrer habile pour taper sur son clavier posé sur ses genoux sans bousculer son voisin.

Donald Trump était à la fois le personnage central et le metteur en scène de ses conférences de presse. Il en fixait les règles, le ton, le tempo.

Il occupait tout l'espace, gesticulant, bougeant sans cesse ses mains devant lui, une habitude qui donna lieu à de nombreuses vidéos parodiques le montrant par exemple en train d'ouvrir et fermer un accordéon. Il multipliait les mimiques: surpris, déçu, amusé, moqueur. C'est lui qui choisissait les journalistes auxquels il donnait la parole. Et qui distribuait compliments et insultes.

- "Si Dieu le veut" -

Joe Biden offre un spectacle beaucoup plus "présidentiel", un terme que son prédécesseur moquait volontiers.

Comme Barack Obama le faisait avant lui, il appelle les journalistes en lisant la liste préparée par son équipe de communication.

Il reste calme derrière son pupitre. Et ne s'emporte qu'une seule fois en évoquant les restrictions entravant le droit de vote des minorités: "Les électeurs républicains que je connais trouvent cela ignoble!".

Face à une journaliste qui montre des signes d'impatience, il s'arrête. "Est-ce que ma réponse est trop longue? Je vais peut-être m'arrêter ici..".

A un autre qui l'interroge sur la Chine, il répond: "Vos enfants et petits-enfants feront leur thèse sur autocratie et démocratie".

Parfois, il perd le fil de son raisonnement et passe à autre chose.

Ses expressions favorites reviennent en boucle: "God willing" (Si Dieu le veut), "Here is the deal" (Voilà comment les choses se présentent).

Son humour peut être répétitif (comme celui de la plupart de ses prédécesseurs). "Quand je suis arrivé au Sénat il y a 120 ans...". Le bon mot visait à prendre le contre-pied des inquiétudes sur son âge, 78 ans. Mais il a, sans surprise, été retourné par certains opposants républicains qui moquent son manque d'énergie, en écho au surnom "Sleepy Joe" (Joe l'Endormi) dont Donald Trump l'avait affublé.

Il y a quatre ans, ce dernier avait, dans un registre très différent, d'entrée choisi sa cible: les journalistes.

Evoquant "un niveau de malhonnêteté hors de contrôle", il avait stigmatisé les élites des côtes Est et Ouest qui vivent selon lui dans une bulle et ne comprennent rien à la vraie Amérique.

"La plupart des médias, à Washington D.C. mais aussi à New York et Los Angeles, ne parlent pas pour le peuple mais pour des intérêts particuliers et pour les profiteurs d'un système qui est cassé", avait-il lancé, index dressé.

"Je vous dis simplement que vous êtes des gens malhonnêtes. Le public ne vous croit plus!". "Asseyez-vous!", avait-il lancé à l'attention d'un journaliste qui tentait une relance après sa question. "Taisez-vous!", avait-il lâché à un autre.

"Je suis ici pour faire passer mon message directement au peuple (...) car nombre de journalistes de notre pays ne vous diront pas la vérité".

"Mon Dieu! Mon prédécesseur me manque...", a ironisé jeudi le 46e président de l'histoire, interrogé sur les déclarations du 45e.

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