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Le radar, arme de déception massive en vue du Débarquement du 6 juin 1944

Déception, intoxication, les services secrets de Winston Churchill étaient passés maîtres dans l'art de tromper les nazis: la veille du Débarquement, un certain "Rupert" en mousse et des bandelettes en aluminium ont fait avaler des couleuvres aux militaires allemands.

Grâce aux opérations Taxable, Glimmer, Titanic ou encore Mandrel, le débarquement allié en Normandie est complètement passé sous les radars allemands du mur de l'Atlantique.

"Il y avait entre 300 et 400 radars allemands répartis dans 92 stations de Dunkerque à Brest" au début de l'année 1944, explique Philippe Renault, président de l'association des Amis du Musée Station Radar 44 de Douvres-la-Délivrande (Calvados).

La station de Douvres "abritait des radars Wassermann (distance de détection de 350 km), Freya (200 km) et Würzburg (60 à 80 km)", détaille Philippe Renault. "De nombreuses stations ont été attaquées les mois précédant Overlord, certaines ont été relativement épargnées comme Distelfink, pour mieux les intoxiquer le jour J".

Car en 1942, le Würzburg est "avec une précision de 200m à 60km de distance, le meilleur radar au monde, dix fois plus précis que le matériel des alliés", d'après le guide, mais ces derniers vont retourner la situation à leur avantage.

Créé en 1904 par un ingénieur allemand du nom de Christian Hülsmeyer, le radar émet une onde dans l'atmosphère qui, lorsqu'elle croise un objet métallique, est renvoyée en écho, mille fois moins puissante, à un récepteur.

Le principe du brouillage électromagnétique est alors toujours le même: émettre à destination du récepteur un signal plus fort que l'écho de l'objet que l'on veut cacher.

En l'occurrence, les planeurs et avions des forces aéroportées et la flotte d'invasion alliée au large du Calvados.

Point de départ au soir du 5 juin, la veille du D-Day, l'opération Mandrel: une flotte d'avions survole la Manche au sud de l'Angleterre et émet des ondes radio pour saturer l'espace.

Ces avions s'arrêtent opportunément d'émettre à l'approche du cap d'Antifer pour laisser passer l'écho radar d'un autre mensonge: Taxable.

- Semer le trouble -

Pour l'opération Taxable, une vingtaine d'avions Lancaster volent en direction du Havre et se relaient pour larguer chaque minute des bandelettes d'aluminium appelées "Windows".

D'une longueur de 25 cm à 34 mètres, ces bandelettes renvoient le même écho qu'un navire ou un avion.

Le but: "simuler une vitesse de sept noeuds sur les radars allemands, exactement celle d'une flotte d'invasion" se dirigeant 100km au nord du lieu réel du débarquement, resitue M. Renault devant des "Windows" exposées au musée Station Radar 44.

Les "Windows" sont également utilisées pour l'opération Glimmer, un larguage massif dans le détroit du Pas-de-Calais pour conforter l'idée bien ancrée parmi l'état-major allemand que le débarquement va s'y dérouler.

Mais l'opération la plus surprenante reste sans doute Titanic.

Plus de 500 mannequins en toile de jute de 50 centimètres de haut appelés "Rupert" sont parachutés derrière les lignes ennemies vers Lisieux, Yvetot, Caen ou le sud de la Manche.

En simulant des fusillades grâce à des explosifs automatiques, ils vont semer le trouble dans les défenses allemandes.

"Les alliés espéraient gagner deux semaines, or deux mois après le jour J, Hitler était encore persuadé que la Normandie était un leurre, il attendait le vrai débarquement dans le Pas-de-Calais", lance Mark Worthington, conservateur du mémorial Pegasus à Benouville, devant une réplique de Rupert.

Selon lui, "les blindés allemands bien supérieurs en technique et en nombre auraient changé la donne s'ils avaient été appelés en renforts".

Développé initialement comme une arme défensive, le radar aura finalement bien malgré lui permis la plus grande invasion amphibie de l'Histoire.

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