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Une ONG de défense des droits de l'homme au Nicaragua a accusé vendredi le président Daniel Ortega et son épouse, la vice-présidente Rosario Murillo, d'avoir "encouragé" la répression contre les étudiants à l'origine de la vague de manifestations qui a secoué le pays en avril et fait 45 morts.
Pendant les manifestations, le Centre nicaraguayen des droits de l'homme (Cenidh) avait informé le public de l'évolution du bilan des victimes, en l'absence de chiffres officiels après celui, initial, de 10 morts.
Vendredi, il a publié son rapport sur ces événements, accusant le gouvernement d'abus "gravissimes" contre les manifestants et appelant à former une commission d'enquête internationale sur les décès survenus au cours des manifestations.
Le chef de l'Etat et sa femme sont notamment accusés d'avoir "encouragé et orienté" la répression.
Le président Ortega, un ex-guérillero de 72 ans, a appelé à un dialogue national pour surmonter cette crise, déclenchée le 18 avril par un projet de réforme des retraites, mais vite devenue un mouvement général d'exaspération contre l'absence de libertés dans le pays.
"Nous sommes dans une situation bien délicate, ce n'est pas que nous ne voulons pas le dialogue", mais "on ne peut promouvoir un changement sur des cadavres", a déclaré la présidente du Cenidh, Vilma Nuñez, lors d'une conférence de presse.
Le Cenidh réclame la création d'une commission d'enquête avec la participation de l'ONU et de la Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH).
La Conférence épiscopale avait déjà demandé jeudi que toute la lumière soit faite sur les décès survenus lors des manifestations, tandis que l'Union européenne, les Etats-Unis et le Vatican ont critiqué la force excessive utilisée par la police.
Les étudiants ont quant à eux donné au gouvernement jusqu'au 8 mai pour constituer une commission indépendante pour enquêter sur les 45 morts recensés. Ils ont également appelé à une manifestation nationale le 9 mai.
Pour le Cenidh, au début de cette vague de protestation le gouvernement a mis de l'huile sur le feu avec des actions "précipitées et provocatrices" en tentant de contrôler les réseaux sociaux, en accusant les manifestants d'être des criminels et en censurant les médias qui donnaient des informations sur ces rassemblements.
"Devant cette réalité, le Cenidh considère que l'élargissement des demandes et la généralisation des manifestations sont légitimées par un rejet social de la façon autoritaire de gouverner du président Ortega et de son épouse, Rosario Murillo", assure l'organisme.
Le rapport du Cenidh cite des chiffres de la Croix-Rouge, qui dit avoir soigné pendant les cinq premiers jours de manifestations environ 400 blessés, dont 235 dans un état grave nécessitant une hospitalisation. Mais beaucoup d'entre eux ne sont pas allés dans les centres de santé publics par crainte des représailles.
Quelque 350 personnes ont été arrêtées et près de 60 restent portées disparues, mais "il n'est pas possible d'avoir un chiffre exact en raison du manque d'information de la part des autorités", précise l'ONG.
Daniel Ortega est président du Nicaragua depuis 11 ans, après avoir déjà été à la tête du pays de 1979 à 1990.