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Dans la famille des coronavirus, le SARS-CoV2, son dernier représentant, occupe les devants de la scène, à un point jamais atteint par ses prédécesseurs. Responsable de l'épidémie de Covid-19 et de son cortège de décès, ce virus pousse la communauté scientifique dans une course contre la montre pour développer un vaccin. Le grand public veut tout savoir de lui. Et pour mieux l'appréhender, il est sans doute nécessaire de se pencher sur les deux autres membres les plus agressifs de la famille, SARS-CoV1 et MERS-CoV, comme nous le suggère Vincent via le bouton orange Alertez-nous. Le SARS-CoV2 pourrait-il suivre la même évolution que les deux autres ? Ou pourrait-il revenir chaque année de manière saisonnière ?
Des coronavirus sans grand danger jusqu'au début des années 2000
Les Coronavirus (CoV) forment une immense famille de virus qui se distinguent par la longueur exceptionnelle de leurs génomes (ensemble des gènes). Ils sont enveloppés dans une capsule de protéines en forme de couronne, qui leur vaut leur nom ("corona" signifie couronne en latin).
Le premier des coronavirus à avoir infecté un être humain (HCoV) été découvert en 1965 par des chercheurs britanniques. Puis d'autres types de coronavirus ont été identifiés, tous responsables, chez l'homme, de rhume plus ou moins carabiné, voire d'infections respiratoires peu sévères. Jusqu'au début des années 2000, les coronavirus n'ont pas été jugés assez dangereux pour justifier l'intérêt particulier des scientifiques.
Le SARS-CoV1, une épidémie qui n'aura pas duré une année
Les choses ont changé en 2002-2003 avec l'apparition du SARS-CoV1 : SARS en anglais pour "Severe Acute Respiratory Syndrome", ou SRAS en français pour "Syndrome Respiratoire Aigu Sévère". Ce virus est parti fin 2002 de la province du Guangdong, au sud-est de la Chine, suite à la consommation de viande de civette (petit mammifère carnivore) infectée. Il a par la suite été montré que la chauve-souris représentait sans doute le réservoir naturel de ce virus, relate LeMonde.fr.
En six mois, ce virus s'est répandu dans une trentaine de pays sur les continents d'Asie, d'Europe et d'Amérique. 8098 personnes ont été contaminées, 774 en sont mortes, selon le bilan de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Cette dernière a tiré la sonnette d'alarme au mois de mars 2003. En juillet de la même année, l'épidémie a presque disparu grâce à "des mesures d’isolement et de quarantaine", raconte l'Institut Pasteur.
Le MERS-CoV, un virus agressif mais une épidémie limitée
En septembre 2012, soit dix ans plus tard, le MERS-CoV (de l'anglais "Middle East respiratory syndrome coronavirus", syndrome respiratoire du Moyen-Orient) a émergé en Arabie-Saoudite. 2519 cas ont été détectés, dont 866 décès, principalement dans la péninsule arabique, rapporte l'OMS. Des études ont montré que l’être humain contracte cette infection par contact direct ou indirect avec des dromadaires infectés. Si le dromadaire a été identifié comme vecteur du virus, son origine viendrait une fois de plus de la chauve-souris. La transmission interhumaine reste limitée. Le MERS-CoV n'a pas disparu, continuant de se transmettre à faible ampleur.
Le Covid-19 reviendra-t-il par cycles saisonniers ?
Les autres coronavirus, ceux qui ne provoquent que de simple rhumes, ont un cycle qui montre des pics de contamination en hiver, explique Yves Van Laethem, spécialiste des maladies infectieuses, porte-parole inter-fédéral du centre de crise du coronavirus. "On pourrait fantasmer sur le fait qu'en été, le Covid-19 nous foute un peu la paix, puis qu'il revienne vers octobre, novembre, décembre. Tout en espérant qu'à ce moment-là, nous ayons un vaccin", juge le virologue. Mais il ne faut pas compter sur de tels pronostics, ajoute-t-il. "On espère le voir vous sauver, mais on n'a pas de preuve pour dire qu'il viendra". Les coronavirus les plus agressifs, comme le SARS-CoV2 ou le MERS-CoV, n'ont pas eu de persistance avec cyclicité, souligne-t-il.
Le Covid-19, avec un taux de mortalité moindre, fait plus de dégâts que ses prédécesseurs
"Le Covid-19 est-il vraiment plus agressif que le SARS-CoV1 ou le MERS-CoV ?", s'enquiert encore Vincent via notre bouton orange. "Il est moins agressif quant à la mortalité", répond Yves Van Laethem. La mortalité du SARS-CoV1 était d'environ 10%, celle du MERS-CoV est de 35%. Concernant le Covid-19, la plupart des études montrent 1,5% de mortalité en tenant compte des patients asymptomatiques, indique le virologue. Si l'on tient seulement compte des cas détectés de Covid-19, le taux s'élève à 7 ou 8%. "Mais ce n'est pas une bonne manière de le faire, parce que les cas dépistés, ça ne veut rien dire par rapport au nombre total de cas sous-jacents", précise-t-il.
Cependant, pour l’épidémiologiste de l’université de Rennes Pascal Crépey, le taux de mortalité n'est pas vraiment une bonne indication sur la dangerosité d'un virus : "Avec une progression plus souterraine et plus silencieuse que le Sras (le SARS-CoV1, Ndlr), le Covid-19 a fini par toucher beaucoup plus de monde et provoquer beaucoup plus de victimes (plus de 350.000 morts jusqu'à présent, Ndlr)", explique-t-il dans Libération. Et ce pour une raison essentielle : à la différence du SARS-CoV1, le SARS-CoV2 (responsable du Covid-19) se transmet avant l’apparition des symptômes chez les malades. Avant d'être repérés, ceux-ci ont donc le temps d'en contaminer d'autres.
Pour développer un vaccin contre le SARS-CoV2, les chercheurs s'appuient sur leurs études concernant le SARS-CoV1 et le MERS-CoV
"On parle de vaccin pour le Covid-19, mais existe-t-il un vaccin efficace contre le SARS-CoV1 et le MERS-CoV ?", interroge Vincent. "Il y a eu un vaccin pour le SARS-CoV1 qui n'a jamais été commercialisé puisque la maladie a disparu", répond Yves Van Laethem. L'Institut Pasteur a mis au point un candidat-vaccin qui n'a finalement pas été expérimenté chez l’homme : "Quand il était prêt, l’épidémie était heureusement terminée, et il n’y avait plus de patients sur lesquels proposer de le tester", explique l'Institut.
Quant au vaccin contre le MERS-CoV, les recherches sont en cours pour l'animal, raconte Yves Van Laethem. D'une part pour guérir les dromadaires, afin qu'ils ne transmettent plus la maladie à l'homme, d'autre part pour guérir des singes. Ces vaccins qui se sont avérés protecteurs chez le singe pourraient servir à développer un vaccin pour l'homme.
Les recherches effectuées pour mettre au point un vaccin contre le SARS-CoV1 et le MERS-CoV s'avèrent utiles aujourd'hui dans le cadre du Covid-19. "Le savoir-faire développé en 2003 contre SARS-CoV-1, et le candidat-vaccin breveté en 2004, sont actuellement appliqués par les scientifiques concernés pour un projet en cours de vaccin potentiel contre SARS-CoV-2", indique l'Institut Pasteur. Grâce à son étude sur le singe concernant le MERS-CoV, l'université d'Oxford est actuellement "en pointe", indique Yves Van Laethem, sur le développement d'un vaccin contre le SARS-CoV-2.