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"Je demande à tout le monde, à la population d'oser faire ce que je fais. Tenir tête aux autorités, aux villes et aux communes et de ne pas payer." Christophe en a gros sur le coeur. Cet habitant de la province du Hainaut nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour évoquer une situation qu'il juge illégale: les horodateurs qui n'offrent pas la possibilité de paiement en cash.
Il raconte un épisode survenu il y a quelques mois: "Je me suis stationné à Mons. En voulant payer mon emplacement de parking, je me suis dirigé à l'horodateur avec mon porte-monnaie. Arrivé sur place, je ne pouvais pas payer avec de la monnaie. L'horodateur ne permettait pas de payer avec de l'argent, mais uniquement par carte bancaire, via une application ou encore SMS", explique-t-il.
Pour lui, il s'agit ni plus ni moins d'une forme de discrimination. Christophe dit se réfugier derrière des textes de lois. Il ajoute: "La Ville a l'obligation de traiter de la même manière tous les usagers de la route. En imposant le paiement par carte, la ville crée une discrimination au sein de la population. Tout le monde n'a pas accès à une carte bancaire." Depuis, Christophe refuse depuis de payer le moindre stationnement lorsque les horodateurs ne proposent pas une fente pour les pièces. Il fallait s'y attendre, les amendes s'accumulent. Là aussi, pas question de payer. "J'ai reçu des amendes que je n'ai pas payées. Je conteste la modalité du modèle d'horodateur. J'estime que ces horodateurs sont illégaux", rappelle-t-il.
Christophe met en avant un autre aspect contraignant du paiement par carte. Selon lui, s'il avait un compte commun avec sa femme, le relevé bancaire indique l'heure et l'endroit du paiement. Sa femme pourrait s'interroger sur ses déplacements, et imaginons, nous dit Christophe, qu'il était en train de lui préparer une surprise ou lui acheter un cadeau. "A l'heure où on parle du RGPD (Règlement général sur la protection des données), pour moi c'est une atteinte à la vie privée. Je n'ai pas à devoir me justifier de mes déplacements parce que l'horodateur ne me permet pas de payer par pièce. Si maintenant, j'allais voir ma maîtresse, ce serait pareil", ironise-t-il.
Le prix des smartphones discriminant?
Enfin, dernier élément pointé du doigt, les paiements par smartphone ou SMS sont d'autant plus discriminant pour lui qu'ils nécessitent un coût : "Où est-il écrit dans les textes de lois que tous les citoyens doivent disposer d'un smartphone ? " Le Hennuyer met avant le prix des smartphones qui excluent une partie de la population. Christophe montre son GSM qui "marche encore très bien mais qui ne permet pas de télécharger des applications."
En Belgique, le stationnement sur voirie est une compétence communale. En se garant, l'utilisateur paie tout simplement la privatisation du domaine public communal. Chaque commune ou ville dessine les modalités de paiement liées au stationnement. À Mons, par exemple, ville où Christophe s'est garé et conteste ses redevances, le règlement communal est clair: en 2015, le Collège communal a décidé la mise en œuvre du paiement généralisé des horodateurs uniquement par voie électronique et par SMS.
Pas question de cash. Pourtant, Christophe dit "dispose d'un dossier d'avocat dans lequel figure aussi des textes de loi de la cour européenne de justice qui me donne aussi raison." Tom de Schutter est directeur de département à l'Union des villes et communes de Wallonie (UCVW). Pour lui, Christophe se "trompe vraisemblablement". Il développe : "Ce n'est pas une activité concurrentielle et donc le droit économique ne s'applique pas au sens strict. C'est un exercice de la commune, l'occupation du domaine public. Ce n'est pas soumis à concurrence et donc il n'y a pas d'obligation d'offrir telle ou telle modalité de paiement."
Dans certaines villes, le cash tombe à presque pas grand-chose
À l'échelle européenne seule une recommandation (En savoir plus...) invite le paiement en espèces. Aucune obligation pour les communes. De manière générale, à l'UCVW, on constate que la tendance est plutôt à l'abandon du cash dans nos cités. Les communes se disent que ça évite "le vandalisme mais aussi le coût de la collecte, entre autres." Pablo Rauwers est le directeur de l'entreprise "Rauwers contrôle". Sa société est en charge de la gestion du stationnement de nombreuses communes. "La plupart des horodateurs sont demandés exclusivement avec paiement par carte de crédit et banque contact. Il y a encore certaines communes qui offrent le paiement par cash, mais la tendance est à la diminution."
Une diminution qui s'explique par la multiplication des modes de paiements : "Il y a une baisse du paiement à l'horodateur. Dans certaines villes, le cash tombe à presque pas grand-chose." Pour les communes, l'entretien de ses machines qui proposent du cash est également contraignant. "Il faut collecter ce cash. Ce sont des services qui coûtent assez cher et comme il y a de moins en moins de cash dans les horodateurs, finalement, proportionnellement à ce qu'on récolte, le coût devient plus élevé."