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Washington veut dénoncer le statut de pays en développement de membres de l'OMC

Donald Trump a laissé 90 jours à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour régler le problème de pays membres qui, selon les Etats-Unis, usurpent leur statut de pays en développement pour en tirer un avantage économique, à commencer par la Chine.

Si les réformes exigées par le locataire de la Maison Blanche ne sont pas mises en oeuvre dans les délais, le Représentant américain au commerce (USTR) aura autorité pour "ne plus traiter les pays en voie de développement tel que défini par l'OMC", dès lors qu'il jugera qu'un pays "profite indûment des avantages conférés par ce statut", souligne le texte du memorandum signé vendredi par le président.

"L'OMC est CASSÉ quand les pays les plus RICHES affirment être des pays en voie de développement pour échapper aux règles de l'OMC et bénéficier d'un traitement de faveur. PLUS maintenant!!!", a tweeté le président dans la foulée de la publication du memorandum.

"Pendant trop longtemps, des pays riches ont abusé de l'OMC (...) par le biais d'un traitement spécial et différencié", a commenté l'USTR Robert Lighthizer dans un communiqué. "Cette injustice désavantage les Américains qui respectent les règles, sape les négociations à l'OMC et crée des conditions de jeu inégales", a-t-il ajouté.

L'USTR devra toutefois consulter d'autres agences fédérales --conseillers économiques et de la sécurité de la Maison Blanche-- avant de passer à l'acte. Robert Lighthizer devra informer le président sur les progrès ou non en matière de réforme 60 jours après la publication du document.

- Haro sur la Chine -

L'administration Trump reproche de longue date à l'OMC, et à certains de ses membres, d'abuser de ce statut de pays en développement, qui permet entre autres de retarder l'application de certains accords ou de protéger certains secteurs sans s'exposer à l'ire des membres de l'organisation.

Le memorandum cite sept pays parmi les dix plus riches en terme de PIB par habitant (Singapour, Koweït, Emirats, Qatar, Hong Kong, Brunei, Macao) mais aussi des membres du G20, le groupe des pays les plus industrialisés (Corée du Sud, Mexique et Turquie). Tous bénéficient de protections conférées par ce statut d'exception.

Mais c'est surtout la Chine qui est visée. D'ailleurs, le memorandum lui accorde une place de choix.

C'est un angle d'attaque de plus contre Pékin avec qui M. Trump est en guerre commerciale depuis plus d'un an.

"Les Etats-Unis n'ont jamais accepté la revendication de la Chine du statut de pays en développement, et quasiment tous les indicateurs économiques vont à l'encontre de cette idée", affirme le document.

Ce nouvel assaut --pour l'heure encore virtuel-- risque de rendre plus difficile la reprise des négociations commerciales entre les deux pays la semaine prochaine à Shanghaï.

La réunion des principaux négociateurs commerciaux de Washington et Pékin mardi et mercredi sera la première depuis que les discussions entre les deux pays ont été arrêtées par M. Trump début mai. Le président avait alors estimé que les Chinois revenaient sur la partie déjà négociée d'un accord devant remédier aux griefs de Washington.

Cet arrêt brutal des discussions, qui allaient bon train et semblaient proches d'une conclusion, avait été accompagné d'une hausse des tarifs douaniers sur des produits importés de Chine.

Le sommet fin juin entre Donald Trump et son homologue Xi Jinping en marge du G20 d'Osaka avait poussé le premier à décréter une trêve et à reprendre langue.

Les deux premières puissances économiques mondiales ont mis en place des droits de douane punitifs croisés touchant plus de 360 milliards de dollars d'échanges commerciaux annuels, qui se traduisent par un impact négatif sur l'activité des deux côtés du Pacifique.

- Cherche réforme désespérément -

Le statut de pays en développement de l'OMC n'est qu'une toute petite partie de ce que l'administration Trump reproche à l'Organisation, qui a selon elle "un besoin urgent de réformes, sans lesquelles (elle) sera incapable de répondre aux besoins des travailleurs et des entreprises mais aussi aux défis posés par une économie mondiale moderne".

Le récent G7 à Chantilly en France s'est inquiété de la situation.

"L'Organisation se trouve dans une crise profonde. Nous devons le reconnaître", avait ainsi estimé la commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström.

"Si l'ORD (l'organe de règlement des différends) est bloqué, ce qui aura probablement lieu en décembre, du moins temporairement, nous n'aurons plus de surveillance" des accords commerciaux, s'était-elle alarmée, en référence au refus des Etats-Unis d'approuver la nomination de nouveaux juges à l'ORD.

L'ORD, souvent surnommé la Cour suprême du commerce mondial, pourrait se retrouver paralysé le 11 décembre prochain: en raison des départs prévus, l'organe d'appel n'aura plus suffisamment de juges pour fonctionner si le blocage américain est maintenu.

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