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Chambre du conseil pour le procès des attentats de Bruxelles: quel est le rôle des juges et du procureur fédéral?

Les audiences d'une Chambre du conseil ne sont pas accessibles au public. Pour comprendre cette étape de la procédure à huis clos et le rôle de chacun, RTL INFO pousse pour vous les portes de la salle d’audience.

Une seule personne, un juge unique, préside la Chambre du conseil pour les attentats de Bruxelles. Elle devra décider s’il existe des charges suffisantes, c’est-à-dire des indices assez graves, pour que les inculpés dans le dossier des attentats de Bruxelles soient jugés. Ce juge ne décidera pas s’ils sont coupables ou innocents. La question de la culpabilité, ce sera pour plus tard, pour le procès.

Une audience préparée

Pour prendre sa décision, la Présidente de cette Chambre du conseil, une juge du tribunal de Première instance francophone de Bruxelles, a fait convoquer différentes personnes pour une audience de plusieurs jours à huis clos. Dans la salle, ne pourront entrer que les parties civiles (les victimes et leurs proches), les inculpés, les juges d’instruction en charge de l’enquête et le Procureur fédéral. 

En vue de cette audience, la Présidente a déjà pris connaissance du volumineux dossier même si elle en connaissait déjà une partie. En effet, durant l’enquête, elle a été chargée à plusieurs reprises de contrôler le bon déroulement de l’instruction.

Cependant, elle ne se basera pas uniquement sur le dossier papier pour prendre sa décision : plusieurs personnes prendront la parole lors de l’audience.

Juges d’instruction : le résumé d’une enquête complexe

Les juges d’instruction commenceront par faire un résumé de leur travail. Si trois juges d’instructions étaient chargés de mener l’enquête, ils ne seront que deux à la Chambre du conseil. Ils feront un rapport exclusivement oral et ne déposeront aucune note.

Dans la plupart des dossiers, à ce stade de la procédure, le rapport du juge d’instruction est assez succinct. Il s’agit plus d’une formalité et de la dernière étape de leur travail.

Cependant, dans le cadre des attentats de Bruxelles, après 1.192 jours d’enquête, dans un dossier d’une telle ampleur et d’une telle complexité, ils expliqueront sans doute un peu plus précisément la manière dont l’enquête a été menée. Quoiqu’il en soit, ce rapport des juges d’instruction sera totalement neutre : à aucun moment, ils ne se prononceront sur les charges éventuelles. Ce n’est pas leur rôle.

Les premiers qui auront une lecture partiale du dossier, ce seront les avocats des parties civile. Ils prendront la parole après les juges d’instruction. Dans leur plaidoirie, ils tenteront de démontrer qu’il existe des charges suffisantes pour que certains inculpés soient renvoyés devant un tribunal ou devant une cour d’assises. Dans leur démarche, ils seront soutenus par le Procureur fédéral. Car, si les parties civiles interviennent en leur nom, le Procureur, lui, intervient au nom de la société.

Procureur : l’intérêt de la société

Le Procureur fédéral, Frédéric Van Leeuw, ne sera pas présent en personne. Il a délégué sa mission à un membre de son équipe du Parquet fédéral : une magistrate chevronnée spécialisée en matière de terrorisme. Avec deux autres magistrats, elle a suivi le dossier depuis le début. Elle en connait les moindres détails. Par ailleurs, durant plus de six mois, ensemble ils ont relu et décortiqué ce dossier afin de rédiger leur réquisitoire. Il s’agit d’un document de 57 pages dans lequel ils détaillent la suite qui, selon eux, doit être réservée à chacun des inculpés. En se basant sur le dossier d’instruction qui leur a été transmis, ils ont rassemblé tous les éléments, toutes les charges qui imposent, selon eux, que certains inculpés soient jugés.

Dans le huis clos de la Chambre du conseil, la magistrate fédérale exposera oralement ses requêtes. Selon le réquisitoire écrit et versé au dossier, elle demandera que huit hommes soient renvoyés devant une Cour d’assises, deux devant un Tribunal correctionnel, que trois ne soient pas poursuivis, et que, contre les kamikazes morts, l’action publique soit éteinte.

Ces différences de traitement s’expliquent par les préventions que le Parquet fédéral a décidé de retenir contre chacun des inculpés. Ces préventions dépendent de la gravité des charges exposées : les plus graves conduiront les inculpés en Cour d’assises ; pour ceux chez qui le Parquet fédéral trouve des circonstances atténuantes, le Tribunal correctionnel sera demandé ; enfin pour ceux contre qui les charges manquent, le parquet demandera un non-lieu. Mais ces réquisitions écrites et orales ne sont que des demandes.

Un juge souverain

Lors de cette Chambre du conseil, le Parquet fédéral ne fera que proposer. Il conseillera et tentera de convaincre la Présidente. Et ce n’est pas parce que l’on demande quelque chose qu’on l’obtient forcément.

En effet, la Présidente de la Chambre du conseil prendra seule sa décision, en âme et conscience, sur base du dossier, inculpé par inculpé, après avoir également entendu les plaidoiries des avocats de ces inculpés.

La Présidente pourra suivre les demandes du parquet, mais pourra aussi requalifier les préventions, les aggraver ou les alléger.

Les décisions seront rendues dans une ordonnance motivée dont la date sera annoncée en fin d’audience.

Généralement, le doute profite à l’accusé. Mais à ce stade de la procédure, c’est tout me contraire : un doute suffit pour que les inculpés soient renvoyés devant un Tribunal correctionnel ou une Cour d’assises.

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