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Michèle Martin dévoile tout: "Dutroux est devenu mon Dieu comme mon père l'avait été"

Nous avons souvent entendu parler de Michèle Martin. Mais qui d’autre mieux qu’elle pour nous expliquer son histoire, qu’elle qualifie de descente aux enfers? Quoi de mieux que sa déposition, publiée jeudi dans Paris Match et faite dans le cadre de l’enquête de moralité réalisée avant le procès d’Arlon en 2004?

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Fortement orientée sur sa souffrance personnelle, cette démonstration mathématique de son rôle de victime et non de bourreau est un éclairage, à prendre avec des pincettes, sur un engrenage dont les mécanismes restent encore aujourd’hui très flous. Enfance et première blessure La déposition commence simplement: l’accusée décline son identité et entame son récit par le décès de son père, en 1966, dans un accident de voiture où elle-même sera blessée. "Encore maintenant, je souffre de céphalées sans savoir si leur origine est cet accident". Dès le premier paragraphe, le ton est donné: Michèle Martin souffre. Dans leur villa de Waterloo, Michèle devient le bouc émissaire de sa mère. "Ma mère m’a tenue responsable de la mort de mon papa que j’avais mis en retard ce matin-là (…). Je me suis dès lors sentie responsable de ce qui arrivait, la mort de mon père et l’état de santé de ma mère (…). J’ai ainsi ressenti un profond sentiment de culpabilité qui a influencé mon vécu: coupable d’avoir tué mon père", s’accuse-t-elle dans sa déposition. "Je souffrais" Face à cette accumulation de malheurs, l’enfant Michèle explique avoir été une bonne élève. "Il n’en a pas été de même au sujet du climat familial (…). Je suis la gardienne du chagrin de ma mère. Ma mère et moi vivons en couple." À tel point que les deux femmes ne reçoivent jamais personne à la maison, la mère préférant se consacrer à son défunt mari. "Elle vouait à mon père un culte, continuant à lui parler, à l’invoquer (…), m’invitant à faire de même". Suicidaire et droguée aux médicaments, la mère devient maladivement protectrice. "Elle me veut pour elle", écrit Michèle Martin, "je souffrais de solitude, d’isolement (…), je ne pouvais pas faire de sport (…), me promener (…). Elle se fâchait même quand je lisais, (…) elle fouillait mon cartable (…). J’ai partagé le lit de ma mère jusqu’à l’âge de 18 ans. Par la suite, j’ai repris ma chambre (…). Elle entrait à l’improviste, me découvrait, se mettait à me faire des reproches (…) en frappant même". Des faits qui l’auraient poussée à fuguer à maintes reprises. "C’était beaucoup de douleur pour toutes les deux", nuance-t-elle. Premier amour Arrivent ensuite les premières histoires d’amour de Michèle Martin, jeune femme de 20 ans. Le premier, déjà un Marc, subira les foudres de la mère Martin. "Marc (…) était venu me chercher un soir pour aller au cinéma (…). Au retour de la séance, ma mère (…) s’en était pris à mon copain dans sa voiture sans que je sache ce qu’elle pouvait lui reprocher". Pourtant, ajoute-t-elle "c’était ma mère. Bien que j’étais parfois mal, je l’aimais." Une situation paradoxale qui se reproduira avec un homme qu’elle rencontrera à cette époque, en septembre 81: Marc Dutroux. Dutroux: "Avec lui, je me sentais vivre" Diplôme d’institutrice en main mais se sentant incapable d’enseigner, Michèle Martin se détend à la patinoire de Forest et y rencontre Dutroux. "Il m’aidait à patiner et je l’ai revu toutes les semaines au même endroit jusqu’à ce que nous décidions de vivre ensemble." Elle décrit alors un homme sûr de lui et intelligent, "avec lui, je me sentais vivre (…) je me sentais libre (…). Dutroux est devenu mon dieu comme mon père l’avait été." S’en suit la découverte en 83 de la femme cachée de Dutroux, Françoise, ainsi que sa liaison avec Monique, 14 ans (NDLR: lui en avait 27). Pourtant, Michèle Martin s’accroche, persuadée de sa relation privilégiée avec celui dont le "désir était de les garder toutes les trois". "Il aurait voulu que je perde mon garçon" Dans cette passion, Michèle Martin tombe enceinte. "Il aurait voulu que je perde mon garçon car il préférait avoir une fille. Sur le parking, il m’a fait courir en me disant qu’ainsi, je perdrais le fœtus et nous pourrions recommencer." Frédéric nait, tandis que Dutroux continue à "fréquenter les patinoires (…). Il me disait que je ne devais pas perdre mes bonnes habitudes, entendez par là le laisser faire ce qu’il avait envie". Dans ce contexte se profilent les premiers faits d’enlèvement, en 85. "Il m’a expliqué que s’il agissait ainsi, c’était bien à cause de moi". Draguer les filles lui prenait du temps, les avoir de force à la maison lui permettait de s’occuper mieux de Michèle Martin. Puisque c’était pour elle, il fallait bien que Martin l’aide, même de force, jusqu’à la "trainer littéralement hors de la maison pour lui servir de chauffeur". Dutroux: "Seul capable de réfléchir pour tous" Les amants se font une première fois arrêter en 86, Martin est libérée après 3 mois de préventive. Dutroux sort à son tour, endurci, "il me traite d’endormie, de mollusque, d’incapable  (…). Il était violent, voire hystérique (…). Il m’arrivait même de le défendre aux yeux d’autrui car je me rappelais toujours des récits à propos de sa jeunesse douloureuse", écrit-t-elle, "sentant le piège se refermer". Elle raconte ensuite la manipulation de Dutroux pendant le procès: lettres de menaces envoyées à Martin, les cris au scandale, les manipulations de témoins, la création de nouveaux coupables, les instructions aux avocats de Martin pour la gestion de sa défense, s’estimant "le seul capable de réfléchir pour tous". Sous ses ordres, elle s’occupe des "affaires" de Dutroux, en prison à cause des aveux de sa compagne. "C’était de ma faute s’il était en prison". "Il se prend pour Dieu, il l’affirme lui-même" En 88, elle est condamnée à 3 ans de prison à Charleroi. Elle retourne chez sa mère à la sortie, mais Dutroux exige qu’elle retourne à Marcinelle. En 92, Dutroux sort, encore plus aigri. "Il a brûlé mes bibles (…). En 1993, il inscrit mon fils Frédéric dans une institution catholique pour le dégouter à jamais de calotins". A la même époque, "il va réussir à passer sur la mutuelle en jouant la comédie devant trois médecins experts de l’INAMI. Il m’a dit qu’il avait réussi à pleurer devant eux".   Cette année est celle de la rencontre entre Dutroux et Weinstein. "Dutroux m’a un jour répété les difficultés sexuelles de Weinstein à aborder les filles". En parallèle, "la violence de Marc Dutroux s’est encore accrue, il se prend pour Dieu, il l’affirme lui-même". Un dieu qui la frappe, la mord, la pince, lui enfonce des fourchettes dans la main. "Sa violence se transforme en cruauté. Il m’humilie, m’insulte devant des étrangers, me traite de ‘cerveau de merde’ (…). La peur guide mes comportements (…). Dutroux me reproche mon laxisme, me traite de conasse devant mes enfants". Il achète en 92 une maison à Sars-la-Bruissière, dont Martin paye le loyer, alors que Dutroux retourne vivre à Marcinelle. "Je lui reprochais de nous mettre en danger, étant donné ses vols, ses travaux en noor, ses tricheries, telles que le trafic de compteur (…). En 1994, il va tester mon attachement (…) et commencer à évoquer la possibilité d’enlèvements (…). Nous n’avons plus de relations sexuelles normales (…). Marc Dutroux va me forcer à satisfaire ses besoins sexuels d’une façon violente et qui me dégoute (…). Il disait que j’étais son esclave et lui mon maitre". "Je n'ai jamais pensé qu'elles pouvaient mourir" La spirale de violence continue. "Il envisageait de 'buter' celui qui le trahissait ou qui devenait dangeureux pour lui. C’est ainsi qu’il s’est débarassé de Weinstein (…) Parfois, j’avais l’impression d’avoir le diable devant moi. Dans la colère, ses yeux étaient injectés et le regard était glacial (…). Je n’ai jamais trouvé la force de le quitter (…) Alors j’attends et je subis les choix de Dutroux. Je savais que si je le quittais (…) il serait venu nous chercher et cela aurait été pire encore (…). C’est dans le contexte que je viens de vous décrire que Dutroux et Weinstein commettent l’enlèvement de Julie et Mélissa (…). Dutroux va me raconter l’aménagement de la cache, comment sont les petites (…). Je n’ai pas eu le réflexe de sauver les fillettes (…) et mes propres enfants. (…) Marc Dutroux est arrêté le 6 décembre 1995. Il me dit de m’occuper de Julie et Mélissa (…). Je fuis chez ma mère avec mes enfants (…). Je suis bloquée quand il s’agit d’elles. Dutroux est d’une extrême nervosité. Il me dit d’arrêter de me droguer et de suivre ses instructions à la lettre. (…). Je vais apporter de la nourriture dans la cachette des enfants et m’enfuis par peur des bêtes sauvage". Sans les nourrir. Elle conclut par la phrase suivante: "Je n’ai d’ailleurs jamais pensé qu’elles pouvaient mourir. C’est avec humilité et respect que je leur demande pardon ainsi qu’à leur famille".   

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