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A Monaco, Jean-Christophe Maillot ressuscite "Coppél-I.A." en version futuriste et émancipée

Pour son grand retour au ballet narratif, Jean-Christophe Maillot s'est emparé de l'histoire de la belle automate Coppélia, ballet classique romantique qu'il a entièrement remodelé pour en faire à Monaco "un film chorégraphique futuriste", avec la complicité de son frère pour la musique.

Interprété par sa troupe des Ballets de Monte-Carlo qu'il dirige depuis plus de 25 ans, "Coppél-I.A." est à l'affiche sur le Rocher pour neuf représentations à partir de vendredi soir. Aboutissement de cinq ans de travail, la pièce partira en tournée en 2021.

De la version originale du XIXe siècle, maintes fois revisitée, Jean-Christophe Maillot n'a gardé que l'histoire. Fini la place du village avec ses maisonnettes de pierre où s'agrippe du lierre, ses scènes de folklore ou de sérénade au balcon.

Le rideau se lève sur un plateau plongé dans un halo de brume, sonore et visuelle, projetant le spectateur dans une cité futuriste aseptisée, où tout est blanc, et où les personnages surgissent d'abord en ombres chinoises.

Coppélius, savant fou et démiurge tyrannique, s'ingénie aux réglages de la belle Coppélia, Eve androïde aux gestes saccadés dont le jeune Frantz va bientôt tomber amoureux au grand désespoir de sa fiancée, la pétulante Swanilda. Celle-ci finira par reconquérir le coeur de Frantz après une incursion dans l'atelier de Coppélius où elle réussit à prendre la place de sa rivale.

A ce livret d'origine, Jean-Christophe Maillot a ajouté un épilogue inattendu de son cru, qui voit Coppélia s'arracher à l'étrange mélancolie de sa condition de robot et échapper à son créateur. "C'est un automate du futur. Même si elle est sans émotion, c'est déjà un corps augmenté", dit-il.

"Musicalement, j'avais beaucoup de soucis car je supportais difficilement la musique de Léo Delibes, et les images qu'elle me renvoyait de tous ces ballets traditionnels nunuches. Coppélia, dans le genre, c'est vraiment un des pires", ajoute le chorégraphe.

Après avoir approché Danny Elfman, compositeur fétiche du cinéaste américain Tim Burton, le chorégraphe a finalement fait appel à son frère, le compositeur Bertrand Maillot. Ce dernier a retravaillé la partition originale de Léo Delibes pour créer une étonnante trame composite, ni classique, ni contemporaine, et collant le plus possible à l'histoire interprétée sur scène par les danseurs.

Le postulat de départ était de se rapprocher de la musique de film et pour ça, les deux frères ont créé en simultané, faisant le pari d'une alchimie totale entre la musique et la danse.

A l'oreille, le spectateur retrouve environ 50% de la musique du XIXe siècle mais comme désarticulée et passée à la moulinette d'une autre temporalité et d'une autre structure harmonique, grâce à un mélange de manipulation audio et d'arrangements à partir d'instruments virtuels qui sont ajoutés à l'orchestration, comme le glas harmonica, sorte d'orgue de cristal.

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