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Coronavirus: rideau pour le spectacle vivant

C'était déjà une saison noire pour les théâtres, opéras et salles de concert avec les grèves. Mais le cauchemar est là avec l'épidémie du coronavirus et le spectacle vivant craint pour sa survie.

La nouvelle interdiction des rassemblements de plus de 100 personnes est un véritable coup de massue pour un secteur à l'économie déjà très fragile et qui pourrait accumuler des pertes de l'ordre de plusieurs centaines de millions d'euros.

Des petites structures risquent de déposer le bilan et le chômage menace les intermittents du spectacle. Comme ceux, par exemple, qui devaient travailler au Printemps de Bourges, un des plus importants festivals de musique en France (200.000 festivaliers l'an passé) qui a été annulé vendredi.

"On travaille pour faire en sorte que les intermittents ne soient pas trop pénalisés (car) ils ont moins de contrats et l'ouverture de leurs droits risque d'être perturbée", a commenté le ministre de la Culture, Franck Riester, interrogé au téléphone par BFM, alors qu'il est lui même en quatorzaine, testé positif au coronavirus.

"On doit penser à l'intérêt public en premier, on est citoyen avant d'être producteur et directeur de salles", a indiqué à l'AFP Jean-Marc Dumontet, propriétaire de plusieurs théâtres parisiens.

"Mais c'est d'une infinie tristesse et c'est très violent. Il y a des projets qui ne sont même pas nés et qu'on est obligé d'abandonner, on est K.O. Il y a une partie de mes équipes qui est en pleurs", a-t-il ajouté, affirmant que la période mars-août est menacée.

- "Climat très anxiogène" -

Echaudé par une grève historique de son personnel contre la réforme des retraites qui lui a coûté 16,4 millions d'euros, l'Opéra de Paris prévoit sept millions de pertes de billetterie supplémentaires avec l'annulation d'au moins 34 représentations à Bastille et Garnier d'ici le 24 avril.

Vendredi, l'institution tricententaire a décidé d'annuler jusqu'au 31 mars toutes ses répétitions de ballet et d'opéra, ainsi que les spectacles dans ses plus petites salles, l'amphithéâtre et le studio Bastille.

"On a pour le moment une trésorerie qui nous permet d'assurer toutes nos obligations, donc on n'est pas acculé", affirme à l'AFP Martin Ajdari, directeur général adjoint de l'Opéra, scène la plus subventionnée de France. "Mais toute poursuite de cette période difficile sera compliquée".

A travers la France, les annulations de spectacles et de festivals, comme celui de Banlieues Bleues, se sont accélérées ces derniers jours et les salles ont été obligées vendredi de fermer leurs portes, comme la Comédie-Française (jusqu'au 18 mars "dans un premier temps"), le Théâtre de Chaillot (22 avril), le Théâtre des Champs-Elysées (19 avril) ou la Philharmonie de Paris (7 avril).

"On joue jusqu'à dimanche devant moins de 100 spectateurs. Si les gens viennent. Après, on ferme le théâtre", précise à l'AFP Nathalie Szewczyk, administratrice du théâtre Rive-Gauche où travaillent 25 salariés et intermittents. "Le climat est très anxiogène, tout le monde est dans le flou", dit-elle, appelant à un plan d'urgence sans lequel des "théâtres pourraient disparaître".

Jackie Lombard, productrice renommée qui a dans son portefeuille, entre autres, les concerts de Paul McCartney et Céline Dion à partir de mai - pas affectés pour l'heure - s'inquiète également.

- "100.000 billets à rembourser" -

D'après elle, la filière liée aux concerts a perdu "250 millions au 1er mars, et depuis ça a dû croître encore". Pour les concerts à grande audience --jusqu'à 40.000 personnes--, quand une série de "quatre spectacles sont annulés, c'est 1.200 intermittents qui ne travaillent pas", souligne-t-elle.

Et si les grandes structures sont couvertes, les "petits producteurs ne le sont pas car les polices d'assurance coûtent trop chers et ils vont déposer le bilan". Toutes filières confondues, des appels sont lancés pour que l'Etat apporte une aide au secteur.

Les Forces Musicales, syndicat professionnel des opéras, orchestres et festivals d'art lyrique, expliquent que plus de 100.000 billets sont déjà à rembourser, un chiffre amené à augmenter.

Hors spectacle vivant, côté cinéma, les sorties sont reportées en masse, entre grosse production internationale comme James Bond ("Mourir peut attendre") et films à plus petit budget comme "Petit Pays" d'Eric Barbier, adapté du roman de Gaël Faye (sans nouvelle date) et "Police" d'Anne Fontaine, décalé au 6 mai.

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