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L'art précolombien en majesté à Auch dans un musée rénové

Rebaptisé musée des Amériques, le musée d'Auch a rouvert ses portes ce week-end après des années de rénovation sur son impressionnante collection d'art précolombien, la deuxième de France après celle du musée du Quai Branly-Jacques Chirac grâce à la passion d'un natif de la ville.

Avec quelque 10.000 pièces, Auch possède environ 10% des œuvres précolombiennes présentes en France, relève Fabien Ferrer-Joly, le conservateur.

Un trésor, que cette petite ville du Gers doit à un de ses natifs, Guillaume Pujos, jeune voyageur passionné d'art et d'archéologie.

Parti à 27 ans pour l'Amérique du sud, il "collectera", conformément aux us de son époque, une centaine d'objets, rapportés dès 1896, puis en 1906.

Le musée, dont il est nommé conservateur en 1911 et auquel il léguera ses collections les enrichira ensuite au fil d'acquisitions et de dotations. Au point de recevoir du ministère de la Culture le label "Pôle national de référence en art précolombien et art sacré latino-américain".

S'il n'a pas la puissance de frappe du Quai-Branly, qui détient "80% des collections d'art précolombien" -- le reste étant disséminé dans une multitude d'autres institutions -- il offre un voyage dans "2.500 ans d'histoire", au cœur des civilisations antérieures à l'arrivée de Christophe Colomb, relève M. Ferrer-Joly.

- Cultes et sacrifices -

Elles "se sont développées du nord du Chili au nord du Mexique, en incluant les Caraïbes, du premier millénaire av.J.-C. jusqu'au XVe siècle", rappelle le conservateur.

La collection auscitaine est elle constituée à 90% d'objets venant des Andes, déroulant un panorama des civilisations andines de leur formation jusqu'à la période impériale Inca.

Jalonné de céramiques, pièces d'orfèvrerie, statues, tissus et une collection unique de tableaux en plumes, le parcours muséal est décliné en thématiques, à commencer par l'organisation de l'univers dans la pensée andine, sa cosmovision.

Ainsi apparaissent sur des céramiques la représentation d'animaux symboliques des trois mondes, "les oiseaux pour le Monde d'en haut, le monde des cieux, explique M. Ferrer-Joly, les serpents, pour le Monde d'en bas, où siègent les morts, et les félins, pour le Monde terrestre".

Se détache notamment une surprenante, presque contemporaine, bouteille à goulot à décor de félin sur la panse, de culture huari (VIIe siècle).

"L'usage des céramiques dans les sociétés précolombiennes n'est pas limité à une fonction domestique", détaille le catalogue. Il "revêt aussi une dimension cultuelle et cérémonielle" que les visiteurs découvrent au fil de la visite, culte des morts et des ancêtres, céramiques érotiques.

Un vase à anse en terre cuite, représentant la tête d'un captif, des tumis, couteaux de sacrifices cérémoniels, illustrent aussi l'importance attachée aux sacrifices humains, considérés par les sociétés andines comme nécessaires au maintien de l'ordre du monde.

- "Joyau" de plumes -

Changement d'ambiance avec le passage aux salles consacrées à la plume, un "élément fédérateur des cultures précolombiennes", "qui avait plus de valeur que l'or", selon M. Ferrer-Joly.

"Seuls les hauts dignitaires avaient le droit de porter des plumes", souligne-t-il. La valeur accordée à cette matière perdurera au delà de la conquête, comme en témoigne le "joyau" du musée, une mosaïque de plumes sur bois réalisée en 1539 à Mexico, "la Messe de Saint Grégoire".

L’œuvre, un des tout premiers tableaux chrétiens du Nouveau Monde et probablement une des dernières productions de l'art aztèque, représente l'apparition du Christ devant le pape célébrant la messe, avec un luxe de détails, certains au 1/10e de millimètre: les instruments de la passion, le portrait de Judas, le livre de messe...

A cette pièce exceptionnelle, lumineuse, sont venus s'ajouter un triptyque de la Vierge, puis cinq autres tableaux de plumes faisant du musée d'Auch une des principales collections de plumasseries mexicaines en Europe.

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