Accueil Actu

Les journalistes sont "une cible", selon le directeur de Visa pour l'image

Les journalistes, et notamment les photographes, sont devenus une "cible" et les difficultés des médias pour travailler "commencent à s'étendre" aux pays occidentaux, comme en France lors de la crise des "gilets jaunes", dénonce le directeur du festival de photojournalisme Visa pour l'image.

"Le métier a beaucoup changé. Il y a une dizaine d'années, un photographe qui arrivait sur le terrain était un allié, quelqu'un qui allait pouvoir témoigner d'une situation. Et donc, en principe, ils étaient bien accueillis", souligne Jean-François Leroy lors d'un entretien jeudi avec l'AFP à Perpignan.

Pendant la guerre du Vietnam, "l'armée américaine réalise que la presse peut être à double tranchant, qu'elle peut monter l'opinion publique contre elle (...), les Américains se rendent compte que la guerre fait des victimes, des enfants, et pas forcément que des méchants communistes".

"C'est là qu'on commence à devenir méfiant et le phénomène ne fait que s'accentuer. Aujourd'hui le photographe est une cible, les journalistes sont une cible", ajoute-t-il. "C'est l'Etat islamique qui les décapite, qui les brûle vifs. On les emprisonne". Il y a aussi le Mexique, un des pays les plus dangereux pour la presse.

En France, lors de la longue crise des "gilets jaunes", les violences contre les journalistes étaient "des deux côtés, aussi bien de la police que des manifestants". Et "c'est la première fois depuis plusieurs décennies que Reporters sans frontières (RSF) met des points d'alerte sur la France", souligne le responsable du plus grand festival de photojournalisme du monde.

- "Méfiance des politiques" -

"Il est regrettable que les difficultés de la presse commencent à s'étendre dans les démocraties occidentales, la France cette année avec les +gilets jaunes+ en a été un exemple tout à fait tragique".

Dans son rapport 2019 sur la liberté de la presse dans le monde, RSF relevait que "l’hostilité à l’encontre des journalistes, voire la haine relayée dans nombre de pays par des dirigeants politiques" suscitait "des passages à l’acte plus graves et plus fréquents", pointant notamment une dégradation de la situation aux Etats-Unis et en Europe.

"Il y a une méfiance des politiques qui supportent de moins en moins qu'on couvre la vérité". "Il y a une crise de confiance vis-à-vis des médias. Mais, en plus, quand on a un président d'un grand pays démocratique qui dit que la presse ne cherche plus la vérité, on ne crée pas un climat de confiance très favorable".

- "Communication et information" -

Et "de plus en plus, on confond communication et information. Quand Obama a son photographe attitré, quand Sarkozy a sa photographe officielle, quand Macron a sa photographe officielle, je suis scandalisé".

"Quand vous avez tous les partis politiques qui fournissent des images et des sons aux journaux télévisés et aux radios, contrôlés et produits par leur propre société de production, je veux qu'on dise +images de communication transmises par le candidat+. Mais ça ne se fait pas".

"Quand c'est pour le lancement d'une bagnole, je m'en fous, mais quand on parle d'une élection, je veux savoir que c'est le candidat qui choisit ses images", insiste-t-il.

Sur un plan plus local, interrogé sur la candidature de Louis Aliot (RN) aux municipales de Perpignan en mars prochain, ville où l'extrême droite fait traditionnellement des scores élevés, le directeur du festival "souhaite de tout coeur que Aliot ne soit pas élu, évidemment".

Mais en cas de victoire, "je pense qu'il ne faut pas démissionner, je ne partirai pas de mon plein gré, je pense qu'il faut lutter de l'intérieur".

Ouvert samedi, le festival se poursuit jusqu'au 15 septembre dans la cité catalane, avec 24 expositions et des projections en accès libre.

À lire aussi

Sélectionné pour vous