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L'obésité est la 2e cause de cancer après le tabac: comment les cellules de la masse grasse interagissent-elles avec les tumeurs?

Vous le savez, le compteur du Télévie sera lancé ce vendredi soir. D’ici là, chaque jour, nous nous intéressons aux avancées de la recherche. Plusieurs équipes de scientifiques travaillent actuellement sur les liens entre obésité et cancer. Des études démontrent qu’il s’agit de la seconde cause de cancer, après le tabac.

Faire le lien entre cancer et obésité n’est pas neuf. Mais aujourd'hui, de nombreux chercheurs tentent de comprendre les mécanismes qui interviennent en cas de surcharge pondérale. C’est l’objet du travail des professeurs Patrice Cani et Bénédicte Jordan, en collaboration avec des doctorants et des chercheurs. "Je pense qu’il faut prendre conscience que le surpoids et l’obésité, ce n’est pas, outre les risques de maladies cardiovasculaires et le diabète de type 2, qui sont bien connus du grand public, les seules maladies", commente Patrice Cani, chercheur FNRS - WELBIO et professeur à l'UCLouvain.

L'obésité favorise l'apparition et la progression de 13 types de cancers différents 

De récentes études démontrent que le surpoids favorise l’apparition et la progression de 13 types de cancer différents. Parmi ceux-ci, le cancer du sein, mais aussi des cancers de la sphère digestive ou d’autres liés aux organes reproducteurs.


©cancer.gov/obesity-fact-sheet

Les cellules de la masse grasse produisent aussi une série d'hormones 

Au laboratoire, les chercheurs étudient l’activité des cellules de la masse grasse et leurs interaction avec les cellules des tumeurs. La masse grasse est composée de cellules dites adipeuses, qui ont pour fonction de stocker l’énergie. Mais pas seulement. Elles produisent également une série d’hormones qui agissent sur toutes les autres cellules du corps.


 

C'est l'objet de la thèse de Florian Gourgue, doctorant FNRS – FRIA. Il détaille ce qu'il a pu observer suite à des expériences sur des souris. "Ici [voir image ci-dessous], on a deux groupes de souris, on a un groupe contrôle et un groupe où on a injecté l’hormone, l'apeline, donc c’est une hormone produite par le tissu adipeux et en plus grande quantité chez les souris et les patients obèses. On constate que lorsqu'on injecte des cellules tumorales, les souris qui reçoivent cette hormone apeline ont une augmentation de la métastatisation cérébrale".


 

Perdre du poids, une fois le cancer établi, n'est pas LA solution

Perdre du poids n’est pas la solution absolue lorsque la tumeur est installée. "Le surpoids, l’obésité, le développement du cancer, ce sont des situations et des maladies qui sont multifactorielles. Il n’y a pas une seule solution pour attaquer ces différents angles, et malheureusement, arriver avec le message, si vous êtes atteint d’un cancer, perdre du poids, ça vous permettra de soigner votre cancer, c’est totalement faux, c’est beaucoup plus complexe que ça", estime Patrice Cani.

Par ailleurs, le tissu adipeux aura déjà acquis des modifications qu’il va conserver, comme l'explique Bénédicte Jordan, Chercheuse FNRS et professeure UCLouvain: "Il est utile de travailler en termes de prévention, mais une fois le cancer présent, le tissu adipeux a acquis des modifications au cours de l’obésité qu’il va conserver à posteriori, même lorsque la personne va reperdre du poids. Donc, le bénéfice pour le cancer déjà établi ne sera pas nécessairement visible. Il semble par contre qu’il pourrait y avoir un intérêt en termes de risques de récidive, donc il est intéressant d’essayer de contrôler le poids, mais nous nous intéressons surtout à l’aspect thérapeutique pour avoir des thérapies qui soient adéquates et adaptées au contexte de l’obésité de la personne et être plus efficaces dans son traitement".


 

Etudier, en direct, la façon dont la tumeur se nourrit  

Dans les labos de l'UCLouvain, une machine de pointe unique en Belgique (il y en a une trentaine dans le monde) permet de réaliser des images anatomiques très précises des tumeurs.

Elle permet également d’observer en temps réel les flux métaboliques, c’est à dire, les sources d’énergie que la tumeur va utiliser pour proliférer, ce qui est très utile dans le cadre de la recherche de l'équipe. "Nous nous posons la question de savoir si les tumeurs qui sont portées par des sujets obèses ont un métabolisme différent des tumeurs portées par des non obèses. Dans ce cas, nous pourrions envisager de futures pistes thérapeutiques si nous identifions des pistes pertinentes au niveau du métabolisme spécifique des tumeurs dans le contexte de l’obésité", détaille Bénédicte Jordan.

Une première étude 

Une étude qui a démarré cet été permettra pour la première fois de valider ou non ces hypothèses avancées en laboratoire. Elle concerne le cancer du sein. Les chercheurs vont analyser des biopsies personnes malades en lien avec leur indice de masse corporelle, de quoi nourrir l’espoir d’un futur traitement personnalisé pour ces patientes. 

Le professeur Patrice Cani était l'invité du RTL INFO avec vous ce jeudi. Revoir l'interview:

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